Le 27 septembre 2018
Sans vraiment se faire remarquer Snowfall poursuit pourtant son ascension qualitative alors qu’elle s’attache à plonger ses personnages dans des rouages immuables infernal.
- Acteurs : Emily Rios, Sergio Peris-Mencheta, Damson Idris, Carter Hudson, Isaiah John
- Genre : Drame, Thriller
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 19 juillet 2018
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Résumé : En 1983, le trafic de cocaïne règne en maître dans la Cité des anges et distille ses ravages dans toutes les couches de la société. Pauvreté, violence, drogue et prostitution constituent l’ADN de la ville, tandis que la ségrégation raciale bat toujours son plein. Aux blancs les villas luxueuses et la cocaïne hors de prix, aux noirs les quartiers mal famés et la marijuana. Seul point de jonction entre les deux univers : le trafic.
- Copyright : FX
Notre avis : Petit bond dans le temps pour Franklin Saint et son entourage. L’arrivée à l’image du crack aura lentement pris forme au cours d’une saison 1 introductive nécessaire, et la saison 2 choisit l’ellipse légère pour ne pas trop s’attarder sur le lancement démocratique de cette drogue populaire. La série reste attachée à montrer les débuts d’un nouveau business mais qui tire déjà profit d’une grosse fanbase. Saint a pris des galons, et Snowfall aussi. Le glissement d’atmosphère au cours de la première saison s’étend à la seconde qui vient logiquement prolonger la lourdeur si palpable d’un Los Angeles perfide. Suivant les traces d’aînés bien connus, la série produite par John Singleton emprunte énormément mais recycle intelligemment les poncifs des œuvres sur le trafic de drogue. Bien peu de retournements de situation ou de magouilles surprendront réellement, mais leur enchaînement révèle une dynamique implacable où les intrigues chorales s’entremêlent avec logique et fluidité. Délaissant un peu son approche historique (notamment avec le récit de Teddy), Snowfall rentre dans un moule plus classique par son propos mais garde pour lui toute sa crédibilité et son énergie, pour nous immerger dans cet enfer finissant par brûler les ailes de tout le monde.
- Copyright : FX
On reconnaît dans cette cartographie d’un Los Angeles des bas-fonds (au cadre idyllique pernicieux) un talent pour l’immersion immédiate dans un chaos ambiant. Même si le récit sur Teddy ne manque pas de pics de suspense, l’ADN de Snowfall se retrouve particulièrement dans le business de Franklin et dans une moindre mesure dans celui de Lucia et Oso. Et la série ne s’y trompe pas lorsqu’elle choisit sciemment d’orienter la quasi-intégralité de sa saison finale sur le cas de Saint, définitivement le personnage principal de cette série. Montrer comment le ghetto peut transformer la vie d’un homme, voilà l’obsession la plus évidente venant des showrunners. Cela ne signifie pas l’amoindrissement de l’intérêt pour le côté bureaucratique et international de Snowfall, qui parvient à renouveler son intrigue avec l’apparition du frère de Teddy (joué par Jonathan Tucker, toujours un plus) et de la DEA. En tant qu’ensemble d’épisodes, cette saison conserve une constance significative dans la manière qu’elle a de happer son spectateur ; et en tant qu’ensemble de scènes, chaque épisode atteste de l’efficacité d’une écriture qui ne faiblit jamais en rythme. L’intensité placée dans cette seconde fournée la rend addictive et touche même dans sa recherche du divertissement immersif l’épiderme de la joue du spectateur.
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La rue, les showrunners de la série FX la connaissent parfaitement et parviennent à la rendre dangereuse sans jamais y montrer une violence quotidienne banale. Snowfall use d’une violence de proximité avec ses personnages. Elle n’explose que rarement à l’écran, mais se dissémine pourtant dans la globalité de la saison. Ces acteurs du crack business baignent dedans et n’en sortent jamais. Cette pression imprègne l’écran par un rythme enflammé d’accumulation de problèmes qui s’emboîtent les uns dans les autres avant d’exploser avec fatalisme. Que le spectateur sache exactement où les cercles vicieux vont mener l’oblige à assister avec impuissance à la finalité des événements. Les acteurs pris dans la torpeur, s’ils essayent de résoudre les problèmes en évitant la casse, sont montrés sous un jour humain et faillible. Si encore une fois Teddy officie comme une exception, même si derrière son impassibilité se lit une inquiétude grandissante, Franklin et Lucia (et leur clan respectif) sont pointés du doigt comme des personnes inadaptées à leur milieu. L’idée du "You’re not built for this" revient à chaque épisode, au travers de dialogues explicites ou bien de situations cacophoniques saisissantes, à la fois jouissive et effrayante par leur grande authenticité. Ancrée dans un esprit de désillusion évident, cette saison n’épargne rien à ses personnages, et surtout pas la chute de leur cellule familiale.
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Classiques au genre gang/mafieux, les trahisons internes prédominent dans l’ensemble des perturbations rencontrées par les protagonistes. Ce vecteur commun aux intrigues fait de Snowfall un drame familial pesant et généreux en enjeux malgré une lourdeur d’écriture parfois perceptible, rendant le cheminement des mentalités de personnage un peu grossier. Avec la contrainte du format de 42 minutes, pas le temps de tergiverser. Il aboutit de ce format étriqué une obligation de concentrer son histoire, de ne pas s’éparpiller et d’aller à l’essentiel. Ainsi dégarni de tout superflu, Snowfall avance comme une lambo volée sur l’autoroute I-405, sans trop regarder ce qu’elle laisse derrière. Présentées rapidement par quelques éléments, très peu de sous-intrigues existent en terme d’épaisseur. Des fragments nous sont présentés (la relation Franklin /Melody), mais jamais approfondis. Paradoxalement, alors que la série propose une vision très familiale du business de la drogue, elle ne s’attarde que bien peu à tout ce qui peut faire une famille. Toutes les scènes doivent être connectées aux intrigues principales, ne laissant aucune place au reste, malgré l’intelligence des scénaristes pour faire exister un sens du clan, de la fraternité et de la trahison à l’intérieur de ses séquences. Snowfall constitue la preuve que le format télévisuel n’est pas encore totalement ce nouvel eldorado pour les auteurs, mais démontre également que de la contrainte naît la nécessité d’adaptation, et que de cette adaptation peut naître une réflexion créatrice sur l’œuvre.
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