Le 19 juin 2017
Les portraits sensibles d’une pré-adolescente et de sa petite sœur, élevées par leur mère et sa nouvelle compagne.


- Réalisateur : Pepa San Martín
- Acteurs : Mariana Loyola, Agustina Muñoz, Julia Lübbert
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Argentin, Chilien
- Distributeur : Outplay Distribution
- Durée : 1h28min
- Date de sortie : 21 juin 2017
- Festival : Festival de Berlin 2016

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Résumé : Depuis le divorce de leurs parents, Sara, 12 ans, et sa petite sœur Cata vivent avec leur mère et la compagne de celle-ci. Leur quotidien, fait de tendresse et de complicité, ressemble à celui d’autres familles. Lorsque leur père tente d’obtenir leur garde, l’équilibre de la famille semble mis à l’épreuve…
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Critique : On croirait la première scène sortie du film de Gus Van Sant, Elephant. La caméra suit une jeune fille dans les couloirs d’un établissement scolaire, en un long travelling, ne la lâche pas : c’est la confrontation avec un groupe de pré-ados qui arrête le mouvement et annonce symboliquement la place qu’occupera Sara, tout au long du film : celle d’une handicapée sociale, dans un pays -le Chili- où l’homoparentalité et le divorce sont encore jugés avec sévérité. Ce rejet se cristallise à travers un dessin d’une des deux enfants, qui représente toute la famille : la mère apprend qu’elle est convoquée par l’établissement scolaire. La peur de la discrimination explique également une réticence chez Sara à organiser un anniversaire à son domicile, avec tous ses amis, en dépit des exhortations de sa meilleure amie, Pancha. La fête se déroulera finalement chez le père, là où la reconfiguration familiale (belle-mère, père) répond à une "orthodoxie", ne contrevient pas à ce que dicte un ordre social. Ces difficultés permettent à l’ex-mari de reprendre la main, si l’on peut dire, et de faire pression pour avoir la garde de ses filles. Jamais les scènes de conflits qui opposent les deux ex-conjoints ne montrent les deux personnages dans le même champ, mais la pression est réelle, pèse à la fois sur les enfants, et sur les deux femmes qui les élèvent. On présume que la joyeuse harmonie de cette famille recomposée, déclinée à travers de magnifiques scènes du quotidien, simples, spontanées, sera anéantie par une société pour qui cette situation n’est pas bienséante.
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En plus de ces difficultés, Sara doit gérer des interrogations propres à l’adolescence dans laquelle elle entre pas à pas, notamment son rapport avec les garçons. Sa préférence hétérosexuelle est contrariée par l’opinion de sa meilleure amie, qui, rapportant les propos de sa sœur, suppose que le lesbianisme est d’origine génétique. A travers elle, transitent des préjugés qui essentialisent les individus, les contraignent également à s’identifier, sous couvert d’une écoute bienveillante : ainsi, dans une scène édifiante, une psychologue appelée par le père, cherche à en savoir plus sur les deux jeunes filles. L’aînée comprend que cette parole sera sournoisement utilisée pour obtenir leur garde et ne livre qu’un minimum d’informations. Pourtant, il lui faudra bien accepter une situation qu’elle n’a pas choisie...
Ce très beau premier film, qui sonde la complexité des familles d’aujourd’hui, a le mérite de ne pas gâcher avec une maladresse démonstrative la force de ses engagements.
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