Le point Godwin du bis
Le 23 novembre 2018
Malgré son pitch improbable, il ne s’agit pas d’un film (ni moins encore d’une comédie) horrifique avec des militaires mais bien d’un film de guerre avec des morts-vivants. Une nuance à laquelle le réalisateur s’accroche avec une redoutable efficacité.


- Réalisateur : Julius Avery
- Acteurs : Pilou Asbæk, Wyatt Russell, Mathilde Adepo, Mathilde Ollivier
- Genre : Épouvante-horreur, Film de guerre
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Paramount Pictures France
- Durée : 1h48mn
- Âge : Interdit aux moins de 16 ans
- Date de sortie : 21 novembre 2018

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Résumé : À la veille du débarquement, un groupe de parachutistes est largué en France occupée. Alors qu’ils luttent pour accomplir ce qui ressemble à une mission impossible, ils tombent sur un laboratoire secret dans lequel sont menées des expériences surnaturelles, aussi étranges que terrifiantes.
Notre avis : La notion de « zombis nazis » avait de quoi rebuter. Il faut rappeler que cette association nous avait apporté quelques films d’exploitation peu recommandables – à commencer par Le lac des morts-vivants, le nanar culte de Jean Rollin – qui, même quand le filon était prolifique, étaient aussitôt relégués dans les tréfonds de nos vidéoclubs (que de bons souvenirs !). On avait même un temps pensé qu’il avait atteint son point de non-retour avec la balourdise que fut Dead Snow, il y a déjà près de 10 ans. Difficile dès lors – à moins bien sûr d’en avoir la bande-annonce qui en dévoile beaucoup d’éléments du dernier acte – d’envisager comment cet Overlord, réalisé par un parfait inconnu et scénarisé par un auteur à la filmographie loin d’être glorieuse, allait pouvoir redonner ces lettres de noblesse à ce sous-genre éminemment hybride. Seule la caution « Produit par J.J. Abrams » avait de quoi rassurer un minimum, et en particulier les spectateurs qui savent le goût prononcé du fondateur de Bad Robot pour la culture geek.
© 2018 Paramount Pictures. Tous droits réservés.
Il est en effet difficile, même sans être soi-même féru de jeux vidéo, de ne pas voir l’inspiration vidéoludique (les gamers avérés sauront en donné quelques titres, à commencer par Wolfenstein) dans la mise en scène de certains passages d’action et/ou de suspense au cours desquelles la caméra reste rattachée au plus près du personnage principal. Mais là où la maîtrise de Julius Avery se révèle la plus frappante, c’est dans celle des codes du film de guerre, et plus encore dans sa capacité à y rester accroché jusqu’au bout malgré les dérives scénaristiques. Ce savoir-faire se ressent dès la scène d’ouverture qui, par son réalisme, son intensité et son pouvoir immersif permis notamment par le mixage son et des effets spéciaux signés ILM, semble toute droit sortie d’Il faut sauver le soldat Ryan. Une pure réussite en guise d’introduction qui implique inévitablement ensuite une baisse de rythme, mais sans pour autant qu’Avery tombe dans la facilité de la compenser par un virage radical dans le grand n’importe quoi horrifique, façon Une Nuit en Enfer. C’est d’ailleurs là que ce situe la déception de la part du public qui assimilait automatiquement les « zombis nazis » à de la pure comédie gore.
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Pourtant, ce n’était visiblement pas là la volonté qui animait le projet Overlord, qui s’est donné pour défi d’intégrer le mythe comme quoi les expérimentations menées par les scientifiques du IIIème Reich leur auraient permis de créer des super soldats quasi immortels (un argument bien connu des geeks amateurs de cinéma fantastique car notamment exploité dans Hellboy ou Captain America) dans un récit le plus réaliste possible. La représentation du mort-vivant est dès lors radicalement différente de celle héritée des films de George Romero. L’imagerie qu’en donne Avery n’est jamais propice ni aux outrances grand-guignolesques ni à l’explosion d’hémoglobine d’un film délirant, mais en fait un antagoniste purement monstrueux. Malgré son récit éminemment ultra manichéen peu propice à la subtilité, le long-métrage limite le fantastique à ce seul argument scénaristique, qui monte crescendo, sans dériver de la volonté de le filmer par le prisme des codes du film de guerre. C’est assurément cette maîtrise à mêler les genres sans en transgresser les poncifs qui fait de ce film un exemple de ces films de série B tels qu’on regrette de ne plus en voir souvent sur grand écran.
© 2018 Paramount Pictures. Tous droits réservés.