Nos vies bouleversées

Le parcours doux-amer d’une femme d’une quarantaine d’année en Israël.

L’argument : Nurit, maman de deux enfants, est chauffeur de bus en Israël. Un jour, lassée d’un quotidien éreintant, elle décide de refaire sa vie à Tel Aviv. Elle engage Mushidi, une Ghanéenne, pour garder ses enfants. Peu à peu, l’attirance entre les deux femmes se fait plus vive.

Notre avis : Petit film apparemment fauché, Nos vies bouleversées raconte d’abord une trajectoire (à ce propos, le titre anglais, traduit par "aller-retour", est plus parlant que celui choisi ici). Celle d’une femme, Nurit, qui lassée d’assumer matériellement la vie de sa famille pendant que son mari, au chômage, s’occupe des enfants, décide de le plaquer pour aller vivre à Tel Aviv. Là, bien qu’elle soit en butte aux mêmes difficultés matérielles et au mécontentement de ses enfants, elle va s’épanouir sous la double action de la ville émancipatrice et de la rencontre avec la nounou qu’elle engage, une femme africaine qui lui permet de se (re)découvrir, en assumant sa féminité et sa maternité. Ces deux aspects sont au cœur du personnage. Au début du récit, Nurit dispose en effet de nombreux attributs masculins : elle seule travaille, en exerçant un métier considéré comme peu féminin (elle conduit un bus, avec lequel elle semble faire corps) et c’est son mari qui s’occupe des enfants (et accessoirement lui donne des ordres). C’est pourtant en acceptant d’aimer une autre femme, bien différente d’elle, qu’elle s’ouvre et se rapproche de ses enfants.
Cependant, tout est bien loin d’être rose dans cette histoire, et le film se veut aussi la peinture de la société israélienne d’aujourd’hui. Le réalisateur Shahar Rozen adopte ainsi un style d’une sobriété proche du documentaire, en prenant le temps d’installer ses personnages, d’établir de justes rapports humains et de décrire la vie quotidienne, dans toutes ses difficultés. Vivante, active, la société israélienne est aussi présentée comme misogyne, peu libérée en matière de mœurs et raciste. La réalité est âpre, et c’est bien un goût amer qui reste à la fin de ce beau film riche.

Le DVD

Le(s) supplément(s) à ne pas rater : L’éditeur offre un seul bonus, La mouette, court métrage issu du collectif L’@mour est à réinventer, dix histoires d’amour au temps du sida, 1996. La réalisation un peu abrupte de Nils Tavernier contraste avec le propos, touchant et bien servi par les talents naissants et déjà frémissants de Marion Cotillard et Natacha Régnier.

Image & son : Rien de particulier à signaler dans ce domaine. Les choix du réalisateur, appropriés au sujet (et probablement à ses moyens), semblent parfaitement respectés.