Le 18 juin 2024
Loin des clichés des films de voyous et de mafieux marseillais, le troisième film de Milo Chiarini privilégie l’approche psychologique au m’as-tu-vu bruyant des cambriolages et règlements de compte.
- Réalisateur : Milo Chiarini
- Acteurs : Sabrina Nouchi, Milo Chiarini, Nicolas Morazzani, Yanisse Mahmoudi
- Genre : Drame social
- Nationalité : Français
- Distributeur : KapFilms
- Durée : 2h00mn
- Date de sortie : 19 juin 2024
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Résumé : Après vingt ans de prison, Nico retrouve la liberté, sa famille, ses amis et doit faire face aux difficultés qu’entraîne une longue absence parmi les siens. Les liens forts avec ses amis d’enfance, maintenant figures du grand banditisme marseillais, vont mettre à mal sa volonté d’avoir une vie normale, et de rattraper le temps perdu…
Critique : Vingt-deux ans sous les barreaux. Voilà le destin de Nico qui sort après des années d’ombre où il refusé jusque la moindre permission. Sa mère a vieilli, ses frères et sœurs ont grandi, pour le pire parfois, et Titi l’ami d’enfance a basculé dans le monde de la grande délinquance. Nico voudrait échapper à son déterminisme car il a tout à réapprendre de la vie, comme utiliser un téléphone mobile, conduire une voiture ou faire l’amour à une femme.
Le réalisateur, Milo Chiarini, a été policier. Il connaît bien le milieu de la mafia marseillaise. Pour autant, le propos du cinéaste s’écarte du polar traditionnel. L’enjeu pour lui est de décrire le retour à la vie d’un homme qui a été enfermé à dix-neuf ans pour un crime qu’il n’a pas commis, et doit retrouver les repères qu’il n’a jamais vraiment eus. L’amour survient à travers les traits d’une femme maghrébine, au caractère bien trempé, et dont le frère semble lui-même engagé dans des activités parallèles troubles. En fait, à quelques exceptions près, le scénario refuse de s’attarder sur les scènes de crimes ou de vengeance. Le film s’intéresse d’abord à la manière dont les personnages, et particulièrement le protagoniste, évoluent dans un milieu qu’ils n’ont pas vraiment choisis et qui pèse sur leurs choix de vie.
- Copyright KapFilms
Il y a dans Mon milieu un goût pour l’authenticité et l’écriture. Le tout manque parfois un peu de rythme et cantonne les personnages dans des rôles et des positions assez stéréotypés. Mais l’engagement des comédiens, la qualité des dialogues offrent au récit une dimension romanesque, qui à bien des égards, rappelle la patte d’André Téchiné ou même de Maurice Pialat. L’amour demeure le fil conducteur principal d’une histoire où les antagonismes ne peuvent pas se rejoindre. Milo Chiarini réécrit à la manière de Marseille le mythe de Roméo et Juliette où chacun des protagonistes est emporté dans un déterminisme social et culturel qui les retient dans des identités fermées.
Sabrina Nouchi et Milo Chiarini règnent au cœur de ces familles hantées par le goût du sang, tels deux archanges décidés à s’extraire du parcours auquel leur milieu les destine. La violence finit toujours par ressurgir à coup de testostérones et de virilité. Il faut saluer un montage très soigné qui tente de trouver l’humanité derrière ces visages virils, habités par l’agressivité et l’honneur dû à leur clan.
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Mon Milieu demeure un film honnête, engagé et sincère où le réalisateur mise sur le désir des personnages de se départir de leurs origines familiales et culturelles. Peut-être que derrière ce récit noir, se cache le drame de tout le monde, dès lors qu’il s’agit de s’inventer un avenir indépendamment des orientations que le groupe d’appartenance prend pour soi. Le réalisateur dénonce avec une certaine force la brutalité et la domination de la gente masculine sur les femmes, qu’elles soient des mères, des sœurs ou des amantes.
Cette guerre des milieux n’est pas sans faire écho aux règlements de compte qui étouffent Marseille et séparent chaque jour un enfant de sa mère. Sauf qu’ici, l’enjeu principal n’est pas le trafic de drogue, mais un amour mis à l’épreuve par les questions d’appartenance clanique. Comme toutes tragédies shakespeariennes, la trahison se mêle à l’absolutisme du communautarisme social. Mon Milieu n’est en aucun cas le film de l’année mais a le mérite de développer un récit bien construit, emprunt de fougue et de générosité.
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