Le 10 mai 2017
Ce biopic platement illustratif ne rend guère hommage à la fascinante trajectoire de Lou Andreas-Salomé.
- Réalisateur : Cordula Kablitz-Post
- Acteurs : Liv Lisa Fries, Katharina Lorenz, Nicole Heesters
- Genre : Biopic
- Nationalité : Allemand, Suisse
- Durée : 1h45min
- Reprise: 31 mai 2017
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Résumé : Lou Andreas-Salomé, égérie intellectuelle, romancière et psychanalyste, décide d’écrire ses mémoires… Elle retrace sa jeunesse parmi la communauté allemande de Saint-Pétersbourg, marquée par le vœu de poursuivre une vie intellectuelle et la certitude que le sexe, donc le mariage, place les femmes dans un rôle subordonné. Elle évoque ses relations mouvementées avec Nietzsche et Freud et la passion qui l’a unie à Rilke. Tous ses souvenirs révèlent une vie marquée par le conflit entre autonomie et intimité, et le désir de vivre sa liberté au lieu de seulement la prêcher comme ses confrères…
Notre avis : Cette co-production germano-suisse, particulièrement convenue, retrace le parcours extraordinaire de Lou Andreas-Salomé, égérie du monde artistique allemand au tournant du dix-neuvième et du vingtième siècle, qui fascina tout à la fois Rilke, Nietzsche et Freud. La structure du film repose sur une très classique analepse, à partir des Mémoires que l’artiste dicta au terme de son existence à Ernst Pfeiffer, tandis que le nazisme s’en prenait à tout ce qui avait constitué son univers intellectuel. La vieille femme, devenue malade et vaguement acariâtre, est évoquée comme une sorte de statue du Commandeur, figée puisque mythifiée, alors que son scripteur, chargé de recueillir ses paroles, est assigné au rôle de jeune homme transi d’admiration. La caméra valide cette relation de maître à élève par les champs-contrechamps attendus. Tout aussi plates sont les situations de conflit que génère l’émancipation intellectuelle de l’insoumise vis-à-vis de son entourage : dans une scène de repas, la jeune femme se heurte à la morale coercitive de son temps et la caméra se contente de reproduire paresseusement la grammaire du cinéaste lambda, en alternant plans moyens et gros plans sur les visages furibards.
Toutefois, le film offre quelques moments intéressants, surtout lorsque Nietzsche et la jeune femme s’opposent sur la relation qu’ils veulent entretenir : le célèbre philosophe vérifie par le menu et bien malgré lui ce qu’il avait théorisé dans La naissance de la tragédie, à savoir l’opposition entre le dionysiaque et l’apollinien : sa folle envie de passion charnelle s’oppose à la rationalité intellectuelle de l’inflexible jeune femme. Celle-ci ne bradera jamais la promesse qu’elle s’est faite et qui contrevient à ce que la noblesse russe dont elle est issue abhorre : une destinée de femme qui n’obéira à aucun sermon de fidélité, ni de maternité, ni ne s’accommodera d’aucun rapport abrasif au contact d’un homme. Cette dernière promesse ne résistera pas pourtant pas aux assauts d’un Rilke pétris de vers et d’affection. Les deux êtres vivent une passion amoureuse, qui se transformera bientôt en une magnifique amitié. Pour comprendre qui elle est véritablement, Lou Andréas-Salomé finira sur le divan du docteur Freud.
Au bout du compte, on a l’impression de regarder un aimable téléfilm, d’autant plus décevant qu’une existence aussi riche et audacieuse aurait mérité un autre traitement cinématographique.
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