Le 24 janvier 2017
A deux doigts du ratage complet.


- Acteurs : Patrick Warburton, Neil Patrick Harris
- Genre : Comédie, Drame, Fantastique
- Nationalité : Américain
- Chaîne de TV : Netflix
- Titre original : A Series of Unfortunate Events
- Date de sortie : 13 janvier 2017

L'a vu
Veut la voir
Résumé : Le comte Olaf cherche par les plus vils moyens à dépouiller les trois orphelins Violette, Klaus et Prunille de leur héritage. Les enfants doivent se montrer plus malins que lui, mettre en échec ses plans tordus et le reconnaître sous ses pires déguisements, afin de découvrir la vérité sur le mystérieux décès de leurs parents.
Notre avis : On sait combien il serait risqué de soumettre la nouvelle adaptation des romans cultes de Daniel Handler (sous le pseudo de Lemony Snicket) à une comparaison avec la première transposition de 2004. La tentation est forte, mais pêcherait par son manque de pertinence. Si seconde adaptation il y a, on se doute bien que la proposition différerait du film de Brad Silberling. Bien plus fidèle et « complète », la série menée par Neil Patrick Harris s’accapare la saga littéraire très didactiquement, avec 2 épisodes pour chaque roman, la première saison s’occupant des 4 premiers tomes. Malgré la grande réussite du film, on ne pouvait que se réjouir de connaître une adaptation dans un format qui lui permettrait de pleinement déployer la densité des 13 livres, quand le long-métrage s’était approprié les 3 premiers, les avait modelés à son avantage (et l’avait très bien fait), pour un film qui se suffisait à lui-même. Au final, cette réjouissance disparaît aussi rapidement que les parents Baudelaire dans cette histoire.
- Copyright : Netflix
Malgré la meilleure volonté possible, difficile de détacher son esprit du travail de Silberling. Non pas dans un esprit de comparaison, mais dans un esprit nostalgique. On découvre les épisodes de la série un à un, et le film nous manque de plus en plus. Il nous manque parce qu’il pouvait s’éloigner des romans, son interprétation se rapprochait du savant mélange de Handler entre l’humour absurde, souvent grotesque, et la tragédie de la trajectoire des enfants Baudelaire. Le blockbuster de Netflix, en lorgnant du côté de l’univers de Wes Anderson, tout en couleur et en carton-pâte, échoue à y mêler la mélancolie et surtout l’empathie pour le trio d’orphelins. Visuellement trop ambitieux pour ne pas connaître plusieurs ratés (certains effets spéciaux, ceux de Prunille et sa tête en Play Doh notamment), Les Désastreuses Aventures des Orphelins Baudelaire semble s’être trop focalisé sur la forme, certes unique dans le paysage télévisuel, pour y délaisser l’écriture de ses personnages, aussi factices que n’importe lequel des décors de la série. Les tuteurs successifs (et Monsieur Poe) se jouent de la tolérance du spectateur par leur crétinerie surréaliste, et la série confond loufoque et stupidité. Et si l’idée consistait à confronter des enfants matures et malins à un monde d’adultes peuplé d’abrutis, le résultat ne convainc guère. Lemony Snicket, narrateur envahissant du show, peut s’évertuer à nous vanter l’intelligence des orphelins, on peine à y croire lorsque Klaus, dans un élan de génie, prévient le Comte Olaf de la découverte de son plan maléfique, au lieu d’y chercher une solution, et surtout avant même de prévenir sa sœur, la première concernée (au lieu de lire du Proust, il aurait mieux fait de lire Hercule Poirot, ça lui aurait évité d’être aussi bête).
- Copyright : Netflix
De la même manière intrusive et inutile nous est asséné la pseudo-horreur de la série, les spectateurs vont « sangloter, crier, hurler comme des bébés » nous répète Neil Patrick Harris dans le générique d’ouverture, quand ce n’est pas Lemony Snicket qui s’y colle, en cassant au passage le rythme d’une série sans cela déjà bien peu passionnante. Aussi persévérant que le Comte Olaf pour l’héritage des Baudelaire, on cherche alors le travail d’adaptation au milieu de ce fiasco, mais on peine à voir dans Les Désastreuses Aventures des Orphelins Baudelaire version télévisée autre chose qu’un copié / collé redondant, inspiré visuellement, mais désespérément fade pour le reste.
- Copyright : Netflix
Sans surprise, si la série évite la catastrophe (mais de peu), on le doit essentiellement à la présence de Neil Patrick Harris pour donner vie au Comte Olaf. Si le spectateur esquisse quelques sourires par épisode, de rares légers rires également, on le doit à ce personnage succulent et inquiétant, jadis tenu par Jim Carrey au sein du film de 2004. A cet époque déjà on avait reproché à l’adaptation de ne valoir le coup d’œil que pour le personnage à la cheville tatouée et son interprète, on émettra quelques réserves là-dessus (Emily Browning, Liam Aiken et Jude Law, on en parle ?), cependant, l’évidence s’impose d’elle-même pour cette première saison. Cette interprétation (et les dialogues qui y sont associés, très bien écrits et malicieux) vampirise absolument tout le reste (à commencer par Malina Weissman, Louis Hynes et Patrick Warburton), si bien que l’ennuie s’immisce dès que le Comte quitte le cadre. Problème, s’il occupe une place de premier choix dans les 2 épisodes introductifs, puisqu’il s’agit du premier tuteur des orphelins Baudelaire, sa présence s’amenuise à mesure que la série avance, et que sa qualité diminue (oui, tout cela est corrélé).
- Copyright : Netflix
On pourrait croire à une seconde saison de meilleure qualité, mais ces 8 premières épisodes répondent par la négative. Tout simplement parce que l’immense déception se lie à des choix artistiques et narratifs volontaires, et non de ratages involontaires. Si Les Désastreuses Aventures des Orphelins Baudelaire propose une esthétique aussi factice et une tonalité très théâtrale, c’est qu’elle a choisi d’être ainsi, au risque de laisser de côté la mélancolie et l’émotion rattachée au destin du trio principal. De même que le caractère infantilisant des adultes, très immatures et bêtas, résulte d’une volonté clairement affichée par les têtes pensantes de la série, dont l’on se demande même si leur but n’était pas de produire une série pour enfants. Bien évidemment cette première saison loupe le coche sur de nombreux aspects, mais même modifiés, elle ne pourra jamais, avec de tels parti-pris, s’élever à la hauteur du potentiel du matériau originel.
On adhère ou pas. En tout cas, il y avait tellement mieux à faire...