Sus aux urnes !
Le 24 octobre 2017
Avec ses répliques savoureuses, ses situations cocasses et son discours féministe, Les Conquérantes est un film qui raconte les luttes des femmes d’hier pour parler de celles d’aujourd’hui.
- Réalisateur : Petra Biondina Volpe
- Acteurs : Maximilian Simonischek, Ella Rumpf, Marie Leuenberger , Sibylle Brunner
- Genre : Comédie, Drame
- Nationalité : Suisse
- Distributeur : Version Originale / Condor
- Durée : 1h36mn
- Date télé : 11 mars 2020 21:00
- Chaîne : Arte
- Titre original : Die Göttliche Ordnung
- Date de sortie : 1er novembre 2017
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Résumé : Woodstock, Flower Power, révolution sexuelle : trois ans se sont écoulés depuis mai 68 mais la vague de libération ne semble pas avoir atteint le petit village suisse d’Appenzell. En mère au foyer exemplaire, Nora ne conçoit d’ailleurs pas sa vie autrement. Pourtant, à l’approche d’un référendum sur le droit de vote des femmes, un doute l’assaille : et si elles s’affirmaient davantage face aux hommes ? A mesure que Nora propage ses drôles d’idées, un désir de changement s’empare du village, jusque chez les plus récalcitrantes…
Notre avis : Trois ans après son premier long-métrage, Traumland, où elle abordait les thèmes délicats de la prostitution, du libertinage et de la fragilité de l’amour et des liens familiaux, Petra Volpe revient avec un nouveau film tout aussi attentif à la condition féminine en Suisse : Les Conquérantes nous ramène quarante-six ans en arrière, en 1971, alors que le droit de votes des femmes en Suisse n’existait pas encore dans toutes les communes ; que, tandis qu’en France et en Europe, la libération du féminin connaissait une vague sans précédent, poussée par les événements de Mai 68, les femmes du petit village d’Appenzell vivent encore en petites épouses et mères au foyer exemplaires, écrasées par le patriarcat.
Parmi elles, il y a Nora, une femme tout à fait comme il faut : elle a un mari, Hans, deux enfants (des garçons qui n’ont jamais fait la vaisselle de leur vie) et ne s’occupe de rien d’autre que des tâches domestiques. Son époux lui, travaille dans un atelier de menuiserie, dirigée d’une main de fer par une patronne farouchement opposée au droit de vote des femmes et à leur accès au débat public, car c’est contraire à l’ordre divin. « Je n’ai pas besoin d’être libérée », pense Nora. Et pourtant.
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On retrouve là toute l’ambiguïté du féminisme radical, qui veut que les hommes, le patriarcat, soient les seuls responsables de l’oppression des femmes, omettant trop souvent de reconnaître que certaines femmes participent également de la dictature du genre et de la domination masculine, comme l’a montré, entre autres, Georges-Claude Guilbert dans son essai C’est pour un garçon ou pour une fille.
Le film de Petra Volpe n’est cependant pas de ces films hyper politisés, abreuvés de marxisme et moralisateurs. Ce qui intéresse la réalisatrice, c’est explorer la manière dont les femmes de ce petit village suisse ont lutté, avec force et cependant sans violence pour un droit qui nous apparaît aujourd’hui parfaitement légitime. Mais n’oublions pas qu’en France, les femmes n’ont obtenu l’accès aux urnes qu’à la Libération, en 1944, alors que de nombreux autres pays le leur avaient accordé dès la fin de la Première Guerre mondiale.
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Ainsi, Nora va se dresser contre son mari – qui, soit dit en passant, ne la regarde plus ni ne la touche depuis longtemps – réunir de nombreuses femmes autour d’elle, encouragé par la vieille Vroni et la très indépendante Graziella, qui a repris le café du village. C’est dans cet espace cosy, attablées ou accoudées au bar, que les femmes vont libérer leur parole et leur conscience dans des dialogues croustillants et élaborer leur plan d’attaque : une grève générale. Réunies dans une salle commune, elles ne vivront plus qu’entre elles, laissant à leurs maris le soin de tenir la maison. Si Hans, l’époux de Nora, tente de ramener sa femme à la « raison » (« Tu ne peux pas faire ça sans mon autorisation, c’est la loi ! »), il va justement devoir se faire une raison et surtout, se mettre à la cuisine et à la lessive.
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Encore une fois, il ne s’agit pas pour Petra Volpe de se venger des hommes, à qui elle finit par rendre justice, mais de leur apprendre qu’ils n’ont ni le monopole du travail professionnel et que les femmes n’ont pas celui du travail domestique. La cinéaste porte un regard bienveillant sur tous ses personnages (même les plus odieux) ; il n’y a aucune agressivité, ni dans ses propos, ni dans sa mise en scène à la photographie plutôt douce et au montage sobre. Son film rappelle simplement qu’aucun droit n’est acquis par essence (ce qui est d’autant plus vrai pour les femmes), mais qu’il n’est parfois nul besoin de recourir à la violence et à l’anarchie pour les acquérir.
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