Le 14 octobre 2014
Après Coraline, les studios Laika ont-ils trouvé le parfait successeur à leur bijou d’animation ?
- Réalisateurs : Graham Annable - Anthony Stacchi
- Genre : Animation, 3D
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h37mn
- Titre original : The Boxtrolls
- Date de sortie : 15 octobre 2014
- Plus d'informations : Marla’s Movies
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Un nouveau bijou des studios Laika ? Pas forcément...
L’argument : Les Boxtrolls est une fable qui se déroule à Cheesebridge, une ville huppée de l’époque victorienne, dont la principale préoccupation est le luxe, la distinction et la crème des fromages les plus puants. Sous le charme de ses rues pavées, se cachent les Boxtrolls, d’horribles monstres qui rampent hors des égouts la nuit pour dérober ce que les habitants ont de plus cher : leurs enfants et leurs fromages. C’est du moins la légende à laquelle les gens de Cheesebridge ont toujours cru. En réalité les Boxtrolls sont une communauté souterraine d’adorables et attachantes créatures excentriques qui portent des cartons recyclés comme les tortues leurs carapaces. Les Boxtrolls ont élevé depuis le berceau un petit humain orphelin OEuf, comme l’un des leurs, explorateur de décharge et collectionneur de détritus mécaniques.
Ils deviennent soudainement la cible d’un infâme dératiseur Archibald Trappenard qui voit dans sa disposition à éradiquer les trolls son ticket d’entrée au sein de la bonne société de Cheesebridge. La bande de bricoleurs au grand cœur doit alors se tourner vers celui dont ils ont adopté la responsabilité, ainsi qu’une jeune fi lle de la haute qui n’a pas froid aux yeux, Winnie afin de concilier leurs deux mondes, au gré des vents du changement... et du fromage...
Notre avis : Ce qui frappe dès les premières images des Boxtrolls, c’est la beauté visuelle de l’ensemble. On retrouve la technique d’animation en stop-motion et l’univers à la Tim Burton qui avaient fait le succès de Coraline, né dans les mêmes studios Laika et sorti en 2009. Henry Selick, le réalisateur, avait été le complice de Burton pour L’Étrange Noël de Monsieur Jack (1993). Dans Les Boxtrolls, Graham Annable et Anthony Stacchi empruntent la figure de l’inventeur à Edward aux mains d’argent (1990) et la machine terrifiante en fin de film rappelle celle du père alternatif de Coraline dans le jardin nocturne. Les réalisateurs refusent l’esthétique Disney et la rapprochent de ce que proposait Don Bluth, notamment dans Charlie (1989).
© Universal Pictures
Coraline s’adressait déjà aux adultes : il les mettait en garde contre les dérives de l’enfant roi, et la faute de certains parents qui, à aimer trop fort et trop mal leurs petits, leur cousent des boutons à la place des yeux.
Les Boxtrolls ouvrent un autre débat, celui du racisme, du pouvoir et du capitalisme. Les Boxtrolls - qui, comme leur nom l’indique, sont de petits trolls se déplaçant dans des boîtes - sont accusés par les chapeaux blancs (la haute société) de voler leur fromage et de dévorer les enfants. On reconnaît aisément dans cette allégorie le discours intolérant vis-à-vis des étrangers, et les préjugés, par exemple contre les Roms, d’être des voleurs d’enfants.
Le méchant est d’ailleurs appelé le « déparasiteur » : il promet de débarrasser la ville des Boxtrolls, comme certains politiques promettent de débarrasser leur pays des « parasites, » se référant souvent aux étrangers venus « manger le pain » (ou le fromage, au choix) des honnêtes gens. Dans Les Boxtrolls les nantis se vautrent littéralement dans le fromage, et le méchant rêve de les rejoindre, pour goûter à son tour aux fromages les plus fins, bien qu’il y soit allergique.
Si Mowgli a grandi heureux parmi les loups, Œuf vit heureux parmi les Boxtrolls, dans une esthétique inversée proche de La famille Addams (le beau, c’est le laid, et inversement.) Il tentera, avec l’aide d’une "pauvre petite fille riche," de prouver au monde que les Boxtrolls sont des monstres gentils.
© Universal Pictures
Le film pourrait être réussite, mais le débat, hélas, tourne court : les questions politiques soulevées sont caricaturées, la dénonciation du racisme est louable mais trop facile et superficielle. D’autre part, la dimension sombre de l’œuvre et ses dialogues parfois effrayants (la petite fille a un discours quasiment trash) choqueront peut-être les plus jeunes. Même la bande originale est décevante : le numéro du méchant travesti apparaît comme une pâle copie du spectacle musical de Miss Spink et Miss Forcible dans Coraline.
Les Boxtrolls relance le débat d’un cinéma qui s’adresse à un public adulescent, ni tout à fait adulte ni tout à fait enfant. Le film manque de joie, d’humour et de rêve pour vraiment décoller.
Dernière image salutaire, celle, en fin de générique, rendant hommage aux artistes du film, qui ont passé des mois à donner vie aux Boxtrolls, avec passion, avec patience. Voilà un film, en somme, qui vaudra surtout pour son making-of, où l’on découvrira avec intérêt le travail de ces marionnettistes invisibles.
Somptueux visuellement, extrêmement bien doublé (en français comme en anglais) Les Boxtrolls manque hélas de contenu, là où Coraline nous faisait réfléchir avec finesse sur l’enfance et ses paradoxes. Un film d’animation superbe mais creux, à réserver, peut-être, aux enfants devenus grands.
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