Le 11 novembre 2017
En suivant les pas de son héros obstiné, Amir Naderi crée un archétype particulièrement attachant dans ce film sobre et puissant.
- Réalisateur : Amir Naderi
- Acteurs : Madjid Niroumand, Moussa Tourkiradeh
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Iranien
- Distributeur : Splendor Films , Utopia
- Durée : 1h34mn
- Reprise: 15 novembre 2017
- Box-office : 4.427 entrées (10 semaines sur Paris Périphérie)
- Titre original : Davandeh
- Date de sortie : 12 novembre 1986
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– Année de production : 1984
Résumé : Amiro, jeune garçon vivant seul sur les bords du Golfe persique, a très tôt appris à survivre. Rêvant de nouveaux horizons, il aimerait savoir où vont ces avions et cargots qu’il voit autour de lui. Il veut réussir et sait qu’il doit lutter et surtout courir, courir et encore courir. Pour lui, deux sortes de courses, l’une qui lui sert à gagner sa vie, et l’autre, spirituelle, à se former.
Notre avis : Amiro est un petit garçon qui aime jouer au foot, faire du vélo et adore le cinéma. Mais Amiro est aussi un Iranien pauvre, contraint d’exercer des petits métiers pour survivre : ainsi le voit-on ramasser des bouteilles dans la mer, vendre de l’eau fraîche ou cirer des chaussures. On ne saura pas pourquoi il est seul, ni rien de son histoire : pas d’explication, peu de dialogues, puisque Amir Naderi choisit d’observer son personnage au présent, refusant aussi bien le misérabilisme que la proximité ; ainsi y a-t-il peu de gros plans, comme pour empêcher l’inévitable apitoiement, aucun effet (excepté un ralenti vers la fin), ni musique. On est dans le brut, pas dans le mélo. Inutile de dire que ce parti pris fait la richesse d’un film âpre, presque sauvage.
- Copyright Splendor Films
Dans l’une des séquences marquantes de ce métrage qui en comporte beaucoup, Amiro tente de gravir une colline de pierres qui se dérobent sous lui : ce pourrait être une métaphore de l’obstination d’un Sisyphe enfantin, tout autant préoccupé par ses menus boulots que par les rêveries d’un ailleurs : à preuve les nombreux plans dans lesquels il hurle à la fois d’impuissance et d’émerveillement devant les bateaux et les avions qu’il ne prendra jamais, qui ne l’emmèneront pas vers un monde meilleur. Ces avions dont il collectionne les photos, ornement dérisoire d’un abri précaire (un bateau-épave) qu’il partage avec un poussin et les lampes inutiles qu’il accroche, rythment un récit linéaire et heurté, un récit qui fait la part belle aux instants de joie, mais aussi aux souffrances et dangers. Les dangers, ce sont les requins, les voleurs, les resquilleurs ; les souffrances, ce sont les courses entêtées pour rattraper un cycliste qui n’a pas payé son verre d’eau ou un adolescent qui lui a pris son pain de glace. Car, le titre le dit assez, Amiro court. Il court sans cesse, avec parfois des conséquences dérisoires : ainsi dans l’une des dernières scènes participe-t-il à une compétition sauvage qui s’achève sur un gain minimal. Mais l’important n’est pas là, dans ce pain de glace plus qu’à moitié fondu : l’important, c’est la lutte, l’énergie folle dispensée sans compter. Au fond, Amiro est vivant par le mouvement perpétuel qui l’anime, soutenu par une rage inépuisable.
- Copyright Splendor Films
La remarque presque anodine d’un marchand de journaux lui fait prendre conscience d’un manque : il ne sait pas lire. Il mettra la même rage à réciter l’alphabet, toujours en mouvement, qu’il met à poursuivre les fraudeurs, la même volonté d’aller au bout de ses capacités. De ce vainqueur obstiné, Naderi fait un portrait attachant et fort, sans facilités ni mièvreries, trouvant dans son jeune acteur le remarquable vecteur d’une dénonciation camouflée : molesté, rabroué, volé, pauvre dans un univers dont les étrangers semblent posséder les richesses, Amiro devient sans insistance le héros d’une épopée modeste, celle des gens de peu qui combattent pour vivre debout. Et s’il n’y a ni deus ex machina ni retournement final, ce cousin de la Rosetta des frères Dardenne donne une leçon d’optimisme et d’espoir salutaire.
Box-office : Le film connut une sortie confidentielle en France en 1986, en étant distribué en exclusivité dans une seule salle parisienne, à l’Utopia, où il glana pas moins de 1.195 coureurs en première semaine, pour finir sa course avec dignité au-dessus des 4.000 entrées. Cette même semaine du 12 novembre 86 voyait des sorties comme Down by law de Jarmusch (10 salles à Paris) ou encore le premier film de Olivier Assayas, Désordre (16 salles). La grosse sortie du jour était un Burt Reynolds au flop notable, Banco (27 salles).
Festival des trois continents en 1985 : Montgolfière d’Or
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