Y-a-t-il un scénariste à bord ?
Le 7 mai 2020
Décollant d’un pitch a priori malin et flippant, cette première série Netflix belge finit par se crasher, victime d’une écriture plein gaz qui fait clignoter tous les voyants sur le tableau de bord.
- Réalisateurs : Inti Calfat - Dirk Verheye
- Acteurs : Laurent Capelluto, Pauline Étienne, Stefano Cassetti, Jan Bijvoet
- : Netflix
- Durée : 6 épisodes de 35 à 41 minutes.
- VOD : NETFLIX
- Genre : Fantastique
- Titre original : Into The Night
- Âge : Interdit aux moins de 13 ans
- Date de sortie : 1er mai 2020
- Plus d'informations : Into The Night
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Résumé : Les passagers et l’équipage d’un vol de nuit détourné se lancent dans une course contre le soleil alors qu’un mystérieux événement sème le chaos dans le monde.
Notre avis : « Un problème à la fois », comme le répète à l’envi le pilote de ce vol de nuit. Certes. Dommage que le scénariste de cette première production francophone belge de Netflix, adaptée du roman numérique de Jacek Dukaj, The Old Axolotl (*), ne se soit pas également approprié ce mantra, en mode « un seul twist, à la fois », histoire de calmer le rythme infernal de ces six épisodes. D’autant plus dommage que le pitch de départ est assez malin avec, a priori, un boulevard pour un suspense bien tendu sur fond apocalyptique. Un vol de nuit partant de Bruxelles à destination de Moscou, se voit détourné par un militaire de l’OTAN, avec ordre de ne voler que vers l’Ouest. Sa justification fumeuse étant qu’il faut s’échapper du soleil, et donc voler de nuit. Pourquoi ? Parce qu’au soleil, un truc tue tout le monde. Rien que ça…
Comme le militaire a déboulé dans la cabine en tout début d’embarquement, il n’y a quasiment personne à bord au moment du décollage. Il est alors évident qu’on va faire connaissance avec ces rares passagers et que selon les règles usuelles du petit manuel du showrunner, d’autres histoires, secrets et embrouilles vont forcément se greffer. C’est même clairement une promesse de la série, puisque chaque épisode a pour titre le prénom d’un des passagers, et s’ouvre sur un flashback le mettant en scène. Le premier est ainsi titré « Sylvie », ancienne militaire et pilote d’hélicoptère. Ah ben, tiens, ça tombe bien… La politique de la maison étant de ne point spoiler, nous en resterons là.
- Tss, tss, un problème à la fois… »
- Copyright Netflix
Le premier épisode dépote sévère, avec installation de la situation au pas de charge, bien anxiogène, et rapide présentation de tous nos personnages, bonne bande-annonce des enjeux connexes à venir pour un drame a priori en vase clos, selon des raisons évidentes. Ce premier opus, plutôt bien mené, donne, avouons-le, l’envie d’enchaîner avec le suivant. Et donc nouveau flashback d’ouverture sur un autre passager. Curieux, mais on sent presque pointer un syndrome à la Lost.
On sent surtout que la narration, déjà presque à plein régime, va sérieusement s’emballer, au risque de noyer les moteurs ou les faire exploser. D’ailleurs, un problème technique vient vite enrayer la machine : une prise de son et un mixage altérant sérieusement la compréhension de dialogues, au sein de ce microcosme cosmopolite, russe, turc, belge flamand, italien ou marocain. Bref, passons. Le souci vient surtout d’un empilement frénétique de situations, d’intrigues secondaires et de twists, pour une série de seulement six épisodes de 45 minutes. Ça cavale tellement que les grosses ficelles sur lesquelles on ne s’attarde pas habituellement, nous turlupinent vite. Personne - enfin globalement - ne conteste la télé-transportation dans Star Trek, les sabres laser de Star Wars, le fonctionnement de la DeLorean de Retour vers le futur où le fait que la fine équipe de la saga des Ocean’s travaille avec du matos digne de la CIA et d’un groupe de BTP réunis ? Pourquoi ? Parce que les intrigues sont solidement tenues, les dialogues souvent soignés et que tout cela nous détourne définitivement de stupides et futiles interrogations qui feraient immédiatement retomber le soufflet.
- Tss, tss, un problème à la fois… »
- Copyright Netflix
Les épisodes se déroulent, mais à force d’empiler les problèmes accompagnés de cette réplique gimmick « un problème à la fois », ils ne résolvent en fait pas grand-chose, tout du moins de façon à nous endormir. Endormir, au sens de se laisser capter et porter par le suspense. Malgré l’obscurité ambiante, la fragilité de l’écriture devient lumineuse, et par effets domino réduit les comédiens - le casting est pourtant bon - à se débrouiller avec des psychologies primaires et des dialogues simplistes, caricaturaux, voire creux. Ce vol de nuit échoue à nous endormir comme il conviendrait. On reste ainsi éveillé au moindre détail qui cloche : « mais s’il est arrivé ça, c’est impossible que… ». Et quand bien même un personnage commence à donner un début d’explication, en mode circulez il n’y a rien à réfléchir, c’est bancal ou il s’échappe, illico embarqué par un nouveau twist. Résultat : on persiste sur « oui, mais n’empêche, s’il est arrivé ça, alors c’est forcément impossible que… ». Terrible démonstration que trop de twists tuent le twist.
Si bien qu’Into The Night, à mi-chemin de son infernale course contre le soleil, qui de toute façon se devrait de finir au bout 24 heures, s’épuise et le pire qui puisse arriver se produit : on n’y croit plus et on décroche. Et ce malgré un ultime twist ou cliffhanger - on ne sait plus trop - avec porte (façon de parler) vers une suite dont on a, en l’état, une molle envie. À moins que Netflix, si autorisation de nouveau décollage est accordée, impose un pilote showrunner à bord…
- Tss, tss, un problème à la fois… »
- Copyright Netflix
(*) Pour les curieux et amateurs de ce type d’expérience, cela se passe ici : https://jacekdukaj.allegro.pl/en/#landing
- Copyright Netflix
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