Le 6 mars 2024
Cette comédie aux accents burlesques, malgré des intentions louables et un jeu d’acteur à souligner, finit par s’essouffler...
- Réalisateur : Sophie Letourneur
- Acteurs : Marina Foïs, Jonathan Cohen, Jacqueline Kakou, Ayala Cousteau, Victor Uzzan
- Genre : Comédie
- Nationalité : Français
- Distributeur : Memento Distribution
- Durée : 1h41mn
- Date télé : 27 mars 2024 22:40
- Chaîne : Téva
- Date de sortie : 2 septembre 2020
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Résumé : Frédéric décide soudainement qu’il veut un enfant alors que Claire et lui étaient d’accord : sa carrière de pianiste, ses longues robes et ses récitals passeraient avant tout. Il lui fait un enfant sans qu’elle en prenne conscience, elle devient énorme et lui niais.
Critique : Dans Énorme, ce n’est pas la femme qui souhaite un enfant, pas elle qui veut mettre sa vie d’artiste entre parenthèses pendant un certain temps, pas elle qui vit la grossesse, ou si peu. Non, c’est son mari, Fred, un Jonathan Cohen survolté, celui qui gère ses rendez-vous, connaît tout le monde à l’hôpital, suit les cours de préparation à l’accouchement, mange plus, gonfle. En opérant un tel retournement, Sophie Letourneur confère à la femme le statut d’objet, de corps abritant un petit-être tant désiré par l’homme : elle est dans la lumière, lui agit dans l’ombre, tire les ficelles. Même avant la grossesse, Fred était celui qui parlait à la place de Claire, la laissant passive en tout acte – sauf face à un piano, alors qu’elle livrait ses récitals. Peu loquace, presque craintive parfois et déboussolée, souvent, la concertiste n’a pas choisi d’avoir un bébé : son imprésario-mari le lui a imposé, a remplacé sa pilule par des sucrettes à son insu. Les rôles sont inversés, pour le meilleur et pour le pire.
- © 2020 Avenue B Productions, Vito Films / Memento Distribution. Tous droits réservés.
Sophie Letourneur, qui signe avec Énorme son troisième long-métrage, aime filmer des périodes transitoires. Et quel événement l’est plus que les neuf mois où un bébé croît dans le corps de sa mère ? Cette transformation involontaire, incontrôlée, est rarement présentée du point de vue du futur père, qui n’est pas pour autant l’unique focalisateur dans ce film. Marina Foïs l’affirme elle-même à Madame Figaro, « la sentimentalité est ici masculine et le pragmatisme, féminin ». C’est elle qui a conseillé à la réalisatrice de rencontrer Jonathan Cohen et de lui proposer le rôle : elle avait déjà travaillé avec lui et pensait, à juste titre, que son humour, son aptitude à improviser et à assumer sa féminité en ferait le parfait Frédéric. En outre, l’acteur a entraîné sa mère dans le projet, puisque c’est à elle qu’il donne la réplique, dans son propre appartement "léopard", lorsqu’il va chercher un peu de réconfort maternel, après une dispute avec sa compagne. Les deux acteurs incarnent leur personnage, leur confèrent une certaine profondeur, du souffle, un contour net. Il était pourtant difficile de tourner certaines scènes sans vis-à-vis : les champs-contrechamps ayant pour cadre l’hôpital sont issus d’un astucieux montage, qui lie des images documentaires de professionnels, filmés dans l’exercice de leurs fonctions (avec des anonymes absents du cadre), aux plans montrant Jonathan Cohen et Marina Foïs, forcés de caler leur jeu sur ces scènes déjà filmées.
- © 2020 Avenue B Productions, Vito Films / Memento Distribution. Tous droits réservés.
Si la première demi-heure est franchement savoureuse, burlesque et doit beaucoup aux moues comiques et grotesques de Jonathan Cohen, jaugé par une Marina Foïs cynique ou simplement très détachée, la suite de la réalisation s’essouffle. L’humour se fait plus rare et les scènes s’étirent, souvent trop, soulignant la dimension claustrophobe que la réalisatrice a également souhaité mettre en avant, grâce au format carré adopté : le neuvième mois de grossesse, la femme est enfermée dans son corps, entre quatre murs, prisonnière de sa condition, comme le montre également le ventre de Claire, devenant soudain énorme. Le contrôle est absent de ces mois d’attente et de préparation : elle doit se confronter à elle-même et se réapproprier sa vie. Les intentions de Sophie Letourneur étaient louables – mettre en scène des médecins et des sages-femmes dans leur propre rôle, lors de séances tenant du documentaire, mettre en avant l’objectivation de la femme dans notre société contemporaine. Malgré tout, le spectateur s’ennuie et se crispe parfois devant cette succession de champs-contrechamps, qui oscille entre hyper-réalisme et incongruité, peut-être un peu trop crus et salaces. Les dialogues sont mi-écrits, mi-établis à partir d’improvisations préalables et ce mélange donne un résultat étonnant, s’inspirant parfois de la propre expérience de la réalisatrice, tout en s’interdisant de généraliser.
- © 2020 Avenue B Productions, Vito Films / Memento Distribution. Tous droits réservés.
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