Le 17 avril 2023
Le documentaire de Florie-Anne Berrehar explore des modèles alternatifs d’éducation à travers différents pays du monde. Un film généreux et instructif.
- Réalisateur : Florie-Anne Berrehar
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Distributeur : Saint-André des Arts
- Durée : 1h21mn
- Date de sortie : 12 avril 2023
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Résumé : "À la Poursuite de mes Rêves", c’est l’histoire de quatre jeunes adultes qui ne sont presque jamais allés à l’école traditionnelle. Ils ont grandi dans des « écoles démocratiques » où les cours ne sont pas obligatoires et où l’on apprend uniquement ce que l’on a envie d’apprendre, de ses quatre à ses dix-huit ans. Nous les accompagnons dans la quête du job de leurs rêves : en Argentine, en Espagne, en Angleterre et en France, tandis qu’ils nous racontent de quelle façon leur éducation a impacté leur manière de voir le monde. Les écoles démocratiques semblent faire des enfants heureux... Mais feront-elles des adultes heureux ?
- Copyright Saint-André-des-Arts
Critique : Éducation auto-dirigée, unschooling, école démocratique constituent des voies parallèles à un apprentissage dans des structures dites traditionnelles. Et ce sont quelques-uns de ces chemins qu’explore le documentaire de Florie-Anne Berrehar, à travers plusieurs pays, des institutions comme Sudbury ou Summerhill, et quatre jeunes personnes, dont les désirs individuels se sont épanouis ailleurs que dans l’acquisition planifiée des savoirs et le contexte d’une transmission verticale.
Ici, pas de corps contraints par des classes, des chaises, des professeurs. Mais de larges espaces à ciel ouvert, au plus près de la nature, où s’incarne l’idée qu’on apprend surtout par soi-même, au sein d’un environnement favorable, en interaction avec les autres, si on le souhaite, dans un modèle d’autogestion éducative. Les témoignages de l’Espagnole Paula, du Hollandais Hildebrand, de l’Argentin Emiliano et de la Canadienne Frances, nous confirment que les épigones de Rousseau, Pestalozzi, Neill ou Freinet, accordent naturellement leur confiance à l’enfant et l’adolescent, en leur laissant le temps d’identifier leurs désirs ou leurs appétences, loin des récompenses et des punitions, loin du stress engendré par la contrainte scolaire, dont Peter Gray, professeur de psychologie au Boston College, évoque notamment les effets désastreux sur une partie de la jeunesse états-unienne. Ces chemins d’apprentissage offrent quelques nuances, mais ils convergent tous vers l’idée d’un bonheur, ce mot si oublié dans bien des systèmes scolaires de notre monde actuel, ou d’une coopération entre les individus, à rebours d’une sélection darwinienne des élèves, qui défend les vertus de la compétition.
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Pour autant, les paroles des différents intervenants sur le devenir de ces jeunes sont-elles totalement déliées d’une validation de l’efficacité, voire de la performance ? Dans la deuxième partie du film, relative à la situation professionnelle de Hildebrand ou Emiliano, des diplômes sont exhibés, qui attestent la solidité d’une méthode, suggérant aussi de manière troublante que certains enfants peuvent être méritants, selon l’idée que l’institution s’en fait (examens réussis) et la manière dont celle-ci ritualise la récompense (la cérémonie de remise d’un titre universitaire à un ancien élève de Summerhill).
Or, on aurait aimé que le documentaire explore cette aporie : comment un propos peut-il, tout en étant rétif aux injonctions de l’école traditionnelle, accepter comme allant de soi certaines gratifications sur le mode de la validation individuelle qui sont justement ce que le système scolaire promeut ? La réponse à cette question aurait permis d’aborder ce qui est véritablement l’angle mort du film, c’est-à-dire les déterminismes culturels, économiques et sociaux à l’œuvre dans tout parcours humain, qu’on soit assis sur les bancs d’un établissement scolaire lambda ou invités à choisir ses activités dans le cadre d’une pédagogie bien plus horizontale. Quelle est finalement la valeur de cette liberté trop vite associée à des modèles éducatifs différents, comme si l’environnement familial de l’enfant ne constituait pas un facteur de détermination majeure, surtout quand ce sont les parents qui choisissent les voies institutionnelles de l’apprentissage en collectivité ?
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Autre question que suscite ce film : le bonheur d’un individu à identifier ses centres d’intérêt, à trouver sa voie, puis à satisfaire une vocation dans un métier, le met-il à l’abri de toute conflictualité propre aux relations humaines ? Le documentaire n’évoque les éducations alternatives qu’en tant qu’épiphanies, sur le mode de l’utopie réalisée, en absentant une distanciation plus critique qui aurait densifié l’approche et remis certains plaidoyers en perspective. Une séquence à Summerhill esquisse un début de problème, mais le segment se clôt très rapidement dans une concorde générale, comme s’il fallait éluder tout rapport oppositionnel, alors que cette configuration fonde l’idée même de communauté.
Ces réserves ne remettent pas en cause le geste fondamental du film et son utilité essentielle : montrer que l’apprentissage ne peut et ne doit pas être réduit à un seul modèle d’éducation.
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