Sucker Punch, quelle claque !
Le 30 mars 2011
Oubliez l’univers de Tron l’héritage, le nouveau film de Zack Snyder repousse encore plus loin les limites de l’imaginaire.
- Réalisateur : Zack Snyder
- Acteurs : Jena Malone, Abbie Cornish, Carla Gugino, Vanessa Hudgens, Emily Browning
- Genre : Fantastique, Action
- Nationalité : Américain
- Date de sortie : 30 mars 2011
- Plus d'informations : Site officiel du film
– Durée : 1h50mn
Oubliez l’univers de Tron l’héritage, le nouveau film de Zack Snyder repousse encore plus loin les limites de l’imaginaire.
L’argument : Fermez les yeux. Libérez-vous l’esprit. Rien ne vous prépare à ce qui va suivre.
Bienvenue dans l’imaginaire débordant d’une jeune fille dont les rêves sont la seule échappatoire à sa vie cauchemardesque... S’affranchissant des contraintes de temps et d’espace, elle est libre d’aller là où l’entraîne son imagination, jusqu’à brouiller la frontière entre réalité et fantasme...
Enfermée contre son gré, Babydoll a toujours envie de se battre pour reconquérir sa liberté. Combative, elle pousse quatre autres jeunes filles - la timorée Sweet Pea, Rocket la grande gueule, Blondie la futée, et la loyale Amber - à s’unir pour échapper à leurs redoutables ravisseurs, Blue et Madame Gorski - avant que le mystérieux High Roller ne vienne s’emparer de Babydoll.
Avec Babydoll à leur tête, les filles partent en guerre contre des créatures fantastiques, des samouraïs et des serpents, grâce à un arsenal virtuel et à l’aide d’un Sage. Mais ce n’est qu’à ce prix qu’elles pourront - peut-être - recouvrer la liberté...
Notre avis : En plus de s’inscrire avec une belle cohérence dans la filmographie de Zack Snyder (cette idée du « gardien », image du (super) héros, sens du sacrifice), Sucker Punch risque fort de marquer une nouvelle date dans l’ère du numérique. Depuis toujours, le cinéma a cherché à se débarrasser du poids de la caméra. Qu’il s’agisse du célèbre plan-séquence de Profession : Reporter d’Antonioni où la caméra venait littéralement traverser une grille à celui de Panic Room où la caméra passe-partout de David Fincher passait à travers l’anse d’une cafetière. Avec Sucker Punch, Snyder franchit un nouveau palier, le film semblant entériner l’abolition pure et simple de la caméra, de sa place dans le cadre. Le réalisateur de 300 s’amuse d’abord à réaliser des plans « impossibles » comme lorsque la caméra s’introduit à travers un trou de serrure (jusque-là, rien d’original) pour plonger dans l’œil de l’héroïne afin de donner à voir ce que cet œil capte, le tout dans un même travelling avant (on pense à ce plan fabuleux du miroir dans Contact de Robert Zemeckis, dans lequel on retrouvait déjà la jeune Jena Malone). Par la suite, Snyder n’hésite justement pas à passer de l’autre côté d’un miroir avec une telle aisance qu’on vient à peine de le remarquer. Et bien sûr, c’est dans les univers imaginés par Babydoll que la caméra se fera la moins présente pour acquérir une liberté de déplacement proprement sidérante.
Car, en même temps que la caméra, c’est aussi le réel qui s’estompe pour laisser sa place à un imaginaire qui atteint ici une forme d’apogée. Sucker Punch s’inscrit de fait complètement dans cette mouvance qui aura (surtout) marqué le cinéma hollywoodien de l’année 2010 : de Shutter Island à Inception en passant par Scott Pilgrim. Et le film de Snyder représente en quelque sorte une synthèse de ces trois films - représentation d’un espace mental, superposition des couches, illustration d’un univers fantaisiste comme échappatoire -, en même temps qu’il en amplifie les codes visuels au point d’en arriver à un point de rupture. Le délire graphique de Snyder risque en effet d’en laisser quelques-uns sur le côté mais, en bien ou en mal, on peut difficilement rester insensible à la décharge visuelle et sonore du film. Dès lors, on ne s’étonnera pas de voir le long-métrage emprunter largement au jeu vidéo (où l’image de ce média y est entièrement générée par ordinateur). Il en reprend d’abord sa construction (la quête des objets, les niveaux successifs à passer, les Boss à combattre) mais aussi son esthétisme (design des personnages). Plus encore que Watchmen, Sucker Punch régurgite in fine, avec un talent incroyable, tout un pan de la pop-culture, et condense tout l’imaginaire hollywoodien de ces dernières années (on passe de l’heroic-fantasy à une bataille de première guerre mondiale peuplée de soldats allemands zombies en passant par des samouraïs géants).
Ce patchwork visuel s’appuie également sur une musique omniprésente qui participe à la jouissance procurée par le film, laquelle ne se montre jamais gratuite dans son utilisation (elle a un vrai rôle dans l’histoire). Dès l’introduction fabuleuse débutant comme un conte cauchemardesque, Sucker Punch prend ainsi le spectateur aux tripes avec cette nouvelle version de Sweet Dreams d’Eurythmics. Tout au long du film, on retrouve comme ça des tubes célèbres retravaillés pour l’occasion qui participent à son émotion. Même lorsqu’il sort des séquences imaginaires, Snyder se montre plutôt à l’aise au milieu de toutes ces femmes dont la sensualité ne quitte jamais le film (la distribution est impeccable). Pendant près de deux heures, Sucker Punch multiplie ainsi les morceaux de bravoure dans un maelström d’images et de sons qui laisse tout simplement admiratif.
La bande-annonce : ICI
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Jean-Patrick Géraud 4 avril 2011
Sucker Punch - la critique
Le film de Zack Snyder repose sur une architecture délicieusement simple et qui séduit par sa pure gratuité. D’où une expérience libératoire très forte, proche de la catharsis, ce à quoi Nolan échouait. Sucker Punch ne s’embarrasse d’aucune vraisemblance et se donne surtout à voir comme une expérience visuelle et auditive - on notera le goût du cinéaste pour les scènes "muettes", très fortes, et qui renouent avec les origines du langage cinématographique (cf le prologue). A la manière d’un Tarantino, Snyder s’approprie avec talent tous les codes de la culture populaire (clip, musique punch, et surtout jeu vidéo) pour bâtir un univers personnel et authentique.
Et pourtant - sans doute en raison de ces qualités - on ressort du film un peu abruti. Sur un thème qui aurait pu s’y prêter, Sucker Punch manque d’humour et donne parfois l’impression, contrairement à Watchmen, d’avoir mal digéré ses références "geek". La surenchère permanente d’effets tend à faire oublier le point d’ancrage du récit et donc, à balayer tout discours sur notre monde. Evacuée la question du réel, que reste-t-il à voir ? C’est la question que formule ce film lucide et visionnaire... au risque de nous rendre aveugles et, pire encore, amnésiques.
Frédéric Mignard 16 avril 2011
Sucker Punch - la critique
Quelque part entre le jeu vidéo et la clip musical, Sucker Punch étonne par son brio artistique et ses ambitions formelles qui dépassent les limites de l’imaginaire, sans pour autant en oublier les personnages. Dans un récit cadre complexe et surtout d’un pessimisme à toute épreuve, Snyder décrit le calvaire métaphorique de la femme avec originalité.