Le 17 février 2016
Une célébration enchantée des corps et de la danse, à travers la réécriture d’un des plus beaux mythes antiques.
- Réalisateur : Marcel Camus
- Acteurs : Breno Mello, Lourdes de Oliveira, Marpessa Dawn, Léa Garcia, Adhemar Ferreira da Silva
- Genre : Drame, Romance, Musical
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Solaris Distribution, Lux Compagnie Cinématographique de France
- Durée : 1h45mn
- Reprise: 11 août 2021
- Date de sortie : 12 juin 1959
- Festival : Festival de Cannes 1959
Résumé : Orphée vit à Rio. Il est conducteur de tramway et fiancé à Mira. Pendant le carnaval, il tombe éperdument amoureux d’Eurydice, traquée par des tueurs. La jeune femme meurt électrocutée. Orphée ramène son corps à la favela avant d’être lui-même tué par Mira.
Critique : Récompensé en son temps, adoré par un large public, même si le Brésil y voyait un regard étranger et superficiel, Orfeu negro est à la fois la seule réussite reconnue d’un cinéaste à la carrière erratique et un mélange étonnant de diverses influences avouées ou pas. On le sait, Camus refusait l’idée d’une transposition du mythe d’Orphée (son film s’appuie sur une pièce de théâtre écrite par Vinicius de Moraes) mais il en conserve nombre d’éléments : non seulement l’argument, mais aussi des indices épars (le chien s’appelle Cerbère, par exemple). Réactualiser des mythes, d’autres et de très glorieux s’y sont essayé, de Giraudoux à Cocteau, sans oublier la version très controversée de Jacques Demy, Parking. L’originalité de Camus est de transposer l’amour tragique au pays de la danse et du carnaval, dans une ambiance de fête continuelle, ce qui permit de faire découvrir le Brésil et sa musique, et en particulier la bossa nova.
- Copyright Cinéma Public Films
Orphée conduit un tramway ; il rencontre la belle Eurydice alors qu’elle fuit la mort (un homme qui veut la tuer). Ils finissent par s’aimer mais la mort la pourchasse et finit par l’emporter. Dès le début, donc, le tragique et son destin inéluctable sont présents ; dans les dialogues évidemment, mais aussi de manière plus subtile par le jeu permanent avec la couleur. Car Eurydice porte une robe blanche, blanche comme la cérémonie finale, blanche comme la morgue. Tout l’enjeu du film est de lutter contre cette prédestination : un marchand aveugle lui offre un collier jaune avant qu’elle ne débarque et le jaune se retrouve à de nombreuses reprises (le cerf-volant, les costumes des amants pour le carnaval, mais aussi le soleil, qu’Orphée « fait lever » par son chant). À cette symphonie de couleurs s’ajoute le redoutable rouge des enfers, éclatant dans la scène de la mort d’Eurydice. Des échos parsèment le film : le canari emprisonné qui revient deux fois, par exemple.
- Copyright Cinéma Public Films
Mais Orfeu negro est surtout une ode au rythme et à la danse, que le cinéaste contemple longuement. Sa fascination pour l’énergie débordante et les corps en perpétuelle agitation contamine la moindre scène jusqu’à faire des déplacements de la mort un ballet silencieux. Partout et à tout âge, la vitalité s’exténue en des mouvements aussi répétitifs que l’est le rythme lancinant qu’il enregistre en des séquences étirées. Pour peu qu’il soit sensible à cette musique, le spectateur est à son tour emporté par la danse, à laquelle Marcel Camus prête un érotisme latent : les corps sont souvent fins et musclés et les gestes parfois explicites. Célébration de la vie, de l’amour et du mouvement, Orfeu negro raconte aussi la jalousie, le tragique, mais il y mêle un esthétisme coloré qui perdure au-delà de la mort (voir la scène de la chute et les amants enlacés dans une corolle de verdure).
On ne compte pas les séquences réussies de ce film atypique, des surgissements de la mort (belle idée du masque) à la danse de possession en passant par la poursuite en un long travelling de la femme jalouse. Mais on garde une tendresse infinie pour la toute fin, qui voit se perpétuer le mythe avec de nouveaux Orphée et Eurydice : alors qu’un nouveau soleil pointe, la vie recommence et, avec elle, inséparable, la danse. Tout peut advenir encore : le drame est effacé, peut-être n’existera-t-il plus.
– Palme d’Or Festival de Cannes 1959
– Oscar du meilleur film en langue éttangère 1960
– Cannes Classics 2021
Galerie photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.
trucdeouf 19 mai 2019
Orfeu Negro - Mario Camus - critique
Bonjour
On ne "réactualise" pas ! C’est un pléonasme...On actualise tout simplement...A+