Ma mère
Le 29 janvier 2010
Portrait de mère complexe et fascinant sur son lit de thriller sombre. Une recette coréenne savoureuse servie par le chef Bong Joon-Ho.
- Réalisateur : Bong Joon-ho
- Acteurs : Won Bin, Kim Hye-ja, Song Sae-Byeok
- Genre : Thriller
- Nationalité : Sud-coréen
- Date de sortie : 27 janvier 2010
- Plus d'informations : Le site officiel du film
- Festival : Festival de Cannes 2009
– Durée : 2h09mn
Portrait de mère complexe et fascinant sur son lit de thriller sombre. Une recette coréenne savoureuse servie par le chef Bong Joon-Ho.
L’argument : Une veuve élève son fils unique Do-joon qui est sa seule raison d’être. A 28 ans, il est loin d’être indépendant et sa naïveté le conduit à se comporter parfois bêtement et dangereusement ce qui rend sa mère anxieuse. Un jour, une fille est retrouvée morte et Do-joon est accusé de ce meurtre. Afin de sauver son fils, sa mère remue ciel et terre mais l’avocat incompétent qu’elle a choisi ne lui apporte guère d’aide. La police classe très vite l’affaire. Comptant sur son seul instinc maternel , ne se fiant à personne, la mère part elle-même à la recherche du meurtrier, prête à tout pour prouver l’innocence de son fils...
Notre avis : Une vieille femme s’avance à pas lents dans un champ désert. Elle s’arrête et semble perdue, au milieu d’herbes balayées par une légère brise, quand elle exécute soudain une danse inexplicable, avec une grâce fragile qui nous émeut autant qu’elle nous surprend. C’est le point de départ délicieusement incongru du nouveau film de Bong Joon-Ho, auteur de l’excellent The host et du chef-d’œuvre noir Memories of murder. Bien qu’étant également un thriller sombre, doté d’effets de suspense haletants, Mother n’a pas la puissance narrative de ce dernier mais compense largement ce handicap en s’élevant au-dessus de la simple trame policière, à l’instar de ces mouvements de caméra amples et aériens, afin de développer une réflexion fascinante sur le dévouement névrotique d’une mère envers son fils.
- © Diaphana Films
La question cruciale et hautement morale posée par le cinéaste est la suivante : jusqu’où une mère peut-elle aller pour sauver son fils ? Il ne s’agit pas ici de bons sentiments univoques ni de courage maternel aveugle comme on aurait pu en trouver chez n’importe quel tâcheron hollywoodien. Non, l’affaire est plus complexe que cela et repose avant tout sur le désir inconscient de rédemption d’une femme surprotectrice, vis-à-vis de son enfant, car prisonnière d’un lourd secret que nous ne révélerons pas. Le titre du film est aussi l’unique identité ainsi que la raison d’être du personnage. Cette femme n’est plus une femme, c’est une mère. Elle n’est au monde que sous ce statut, d’ailleurs tout le village l’appelle « maman », et elle préfère se couper un doigt plutôt que d’arrêter de protéger son fils.
- © Diaphana Films
Bong Joon-Ho aime les monstres. Dans Memories of murder c’est un tueur insaisissable et dans The host c’est une créature fantastique. Ici, c’est une mère aimante. Par définition, le monstre est différent, à part, au-delà de la morale, par-delà le bien et le mal. Le lien maternel est-il monstrueux ? Oui il peut l’être, semble nous dire Joon-Ho, en ce sens qu’il s’oppose parfois au lien social, se substitue à l’ordre moral, bref s’extrait de la civilisation pour s’isoler dans un cocon dont l’illusoire apesanteur finit par rendre fou. Ainsi cette femme n’a rien d’un modèle, elle n’est pas remarquable, elle est juste folle d’amour pour son fils comme le souligne l’humour incestueux présent dans le film. Cette déraison s’exprime et prend corps dans la danse initiale et finale. Par ce biais, elle se purge et expulse ses sentiments de culpabilité envers la société.
Pour ce magnifique rôle, Joon-Ho a choisi tout naturellement une grande figure maternelle coréenne, mais inconnue chez nous, Kim Hye-Ja. Il faut saluer son approche très sobre du personnage, là où d’autres en auraient rajouté dans la surcharge émotionnelle « oscarisante », si l’on peut dire. Sa rage contenue et le feu intérieur qui l’habite sont des atouts supplémentaires faisant de Mother l’un des grands films de ce début d’année.
- © Diaphana Films
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Norman06 31 janvier 2010
Mother - la critique
Après le fantastique et la science-fiction, Bong Joon-Ho prouve qu’il maîtrise aussi le genre criminel avec ce polar hors norme, qui débute comme une comédie policière pour basculer vers la plus totale noirceur psychologique et narrative. Un régal !
’Boo’Radley 7 février 2010
Mother - la critique
Les molles évolutions d’un mère « prête à tout pour sauver son fils ». Un film réussi dans le style mais ruiné par les poncifs et le comique balourd typique du cinéma sud-coréen. Le récit inutilement embrouillé pour masquer la minceur du propos se traîne deux heures durant, aussi peu palpitant que possible. Soyons cependant reconnaissant à Joon-ho Bong de nous avoir réservé le meilleur pour la fin qui est très belle. Le tout est de l’attendre.
roger w 8 février 2010
Mother - la critique
Certes on n’ira pas jusqu’à dire que ce film est d’une grande profondeur, mais la maestria visuelle sert toutefois un drame puissant où les exclus sont pour une fois mis en avant et d’où il ressort une grande ambiguïté morale. Le "couple" formé par la mère et son fils n’est pas banal et si l’intrigue traine un peu la patte, c’est pour mieux saisir l’évolution psychologique des personnages. Sans être un chef d’oeuvre, Mother est un exemple de plus du savoir-faire coréen. Ceux qui sont réfractaire à ce cinéma passeront leur chemin.
Sébastien Schreurs 8 septembre 2012
Mother - la critique
« La danse expiatoire »
"Mother" reste une oeuvre au-dessus de la mêlée même si le résultat final est un peu frustrant au vu des qualités de "Memories of murder" et "The host", surtout que le cinéaste évoque une fois encore les incompétences de la société sud-coréenne. En dépit de certaines scènes somptueuses, dont le recours magistral à l’ellipse lors de la danse de la mère, Joon-ho Bong, sans grande inspiration, tourne en rond en puisant dans un terreau déjà exploité, celui de "Old boy".