Marie et les Naufragés - la critique du film

Nous immergeant dans l’univers décalé de quelques trentenaires paumés, Sébastien Betbeder nous propose une réflexion pleine de charme sur l’amour, la vie, la mort.

L’argument :« Marie est dangereuse » a prévenu Antoine. Ce qui n’a pas empêché Siméon de tout lâcher, ou plus exactement pas grand-chose, pour la suivre en secret. Oscar, son colocataire somnambule et musicien, et Antoine, le romancier en mal d’inspiration, lui ont vite emboîté le pas. Les voilà au bout de la terre, c’est-à-dire sur une île. Il est possible que ces quatre-là soient liés par quelque-chose qui les dépasse. Peut-être simplement le goût de l’aventure. Ou l’envie de mettre du romanesque dans leurs vies.

Notre avis :Après avoir réalisé en 2013 cette bien jolie comédie romantique intitulée }2 automnes et 3 hivers}, Sébastien Betbeder récidive sur le même mode singulier et charmant avec ce nouveau long métrage. La scène d’ouverture, nous offrant un superbe jeu d’acteurs entre Siméon (Pierre Rochefort) et un inconnu résume parfaitement la teneur de cette étrange et attachante histoire. Il y sera question de vie et de mort avec un mélange de détresse et de joie.
(C) UFO Distribution
Le réalisateur laisse ensuite ses personnages se présenter un à un face caméra, histoire que chacun nous dévoile les moments importants de sa vie, indice essentiel pour suivre sans se perdre la trajectoire de ces naufragés de la vie. Continuant à s’intéresser à cette génération de trentenaires en déroute, (Après avoir vaguement tâté du journalisme, Siméon est au chômage, il vit toujours en colocation, il peine à se lier affectivement. Son ami Oscar, musicien à ses heures, se trouve dans la même instabilité), il nous attache à ces personnages fantasques et imprévisibles qui, en s’unissant, tentent, non sans humour, de vaincre leur mal-être. Mêlant les genres artistiques, il inclut le récit de son histoire en faisant d’Éric Cantona, qui révèle ici un vrai talent de comédien dans ce rôle sans cesse en équilibre entre force et fragilité, un écrivain. Comme des poupées russes qui se superposent les unes aux autres, celui-ci fera de Marie, puis de Siméon les héros de son roman. Une malicieuse pirouette scénaristique pour gentiment brouiller les pistes.
(C) UFO Distribution
Le lunaire Siméon, fabuleux Pierre Rochefort au jeu intériorisé et au regard plein de douceur, est le pivot du film . Il indique à ses comparses la direction à suivre. Sans doute plus inconscient (mais il n’a pas grand-choses à perdre) ou tout simplement poussé par son amour pour Marie, il fuit en Bretagne, à la recherche de cette jeune femme romanesque, fascinée par la mort. Dans sa quête du bonheur, il poussera ainsi les autres à entremêler leur destin au sien dans sa quête du bonheur, sur cette île de Groix, désertée et sauvage qui participe largement à l’atmosphère mystérieuse du film. Sa célèbre plage convexe des Grands Sables donnera lieu à une scène cosmique portant l’imaginaire à son paroxysme, en faisant d’André Wilms le naufragé en chef. Hormis qu’elle nous permet de retrouver ce comédien toujours aussi drôle et sympathique, elle est ennuyeuse et n’apporte rien de plus au sujet, bien au contraire. Il ne s’agit là que d’un incident de parcours ne remettant pas en cause la fraîcheur et la fantaisie de cette comédie actuelle, judicieusement accompagnée de la belle musique mélancolique de Sébastien Tellier. Le couple formé par Pierre Rochefort et Wimala Pons n’est, à coup sûr, pas étranger à la beauté de cette histoire d’amour peu banale qui vient revisiter la comédie romantique de la manière la plus irrésistible.