Le 9 janvier 2023
Au petit matin, Joseph K., un bureaucrate à priori sans histoire, est mis en état d’arrestation. Orson Welles adapte Franz Kafka à sa propre démesure. L’œuvre est plutôt une réussite.
- Réalisateur : Orson Welles
- Acteurs : Suzanne Flon, Jeanne Moreau, Romy Schneider, Orson Welles, Michael Lonsdale, Anthony Perkins, Fernand Ledoux, Akim Tamiroff, Madeleine Robinson, Elsa Martinelli, Arnoldo Foà, Jess Hahn, Billy Kearns, Guy Grosso, Maurice Teynac, Jean-Claude Rémoleux, Katina Paxinou
- Genre : Drame, Fantastique, Noir et blanc, Film de procès
- Nationalité : Français, Allemand, Italien, Yougoslave
- Distributeur : Les Acacias, Potemkine Distribution, Comacico, StudioCanal
- Editeur vidéo : Studiocanal
- Durée : 2h00mn
- Date télé : 3 juin 2024 23:35
- Chaîne : Arte
- Reprise: 8 février 2023
- Titre original : The Trial
- Date de sortie : 21 décembre 1962
- Festival : Festival de Cannes 2022
– Reprise en version restaurée : 8 février 2023
– Sélection officielle Cannes 2022 : Cannes Classics
Résumé : Joseph est réveillé à l’aube par des policiers présents dans son appartement. Ni une ni deux, il est embarqué et traîné devant un tribunal sans savoir ce qui lui arrive. Ce fonctionnaire pris dans les rouages d’une société tentaculaire et absurde va tout faire pour s’en sortir…
Critique : Le périple de Joseph K. que l’on ne lâche jamais relève du cauchemar éveillé. Dans un noir et blanc laiteux, avec des angles inquiétants, les locaux paraissent démesurés, comme désincarnés, avec des portes gigantesques aux poignées inaccessibles. Les autres personnages, comme dans les mauvais rêves, vont et viennent, peuvent apparaître là où on ne les attend pas, et s’éclipser de la même manière.
Fidèle au célèbre récit de Franz Kafka écrit en 1926, le cinéaste réussit néanmoins à y intégrer des éléments évoquant des préoccupations plus contemporaines : la scène du tribunal rappellant les procès du maccarthysme, une explosion tenant du champignon atomique, des hommes décharnés et hagards, avec une pancarte au cou indiquant un numéro, comme des prisonniers de camps de concentration.
- © Potemkine Films
Dans un dédale de grands ensembles, le malheureux Joseph K. va se défendre bien maladroitement d’une accusation abstraite dans un monde policier où une administration tentaculaire domine.
Si le film peut paraître abstrait voire abscons et parfois trop bavard, il n’en démontre pas moins les qualités d’adaptation et de mise en scène d’Orson Welles, jamais avare de projets démesurés. Dans celui-ci, il réunit un casting luxueux autour d’Anthony Perkins : notamment Jeanne Moreau, Romy Schneider, Elsa Martinelli, ou encore Michael Lonsdale et Fernand Ledoux. Il se réserve le rôle d’un avocat libidineux, qui paraît être doté d’une taille imposante, et ne sort guère de son lit !
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JIPI 11 mai 2012
Le procès - Orson Welles - critique
« Porter des chaînes est parfois plus sur que d’être vivant »
K est ciblé, laminé puis éliminé par un ou plusieurs pouvoirs anonymes munis de forces destructives broyant un organisme de défenses harcelé par des interrogatoires uniquement basés sur l’auto persuasion d’un mal en soi.
Le complexe de culpabilité s’entretient dans des décors démesurés. Un processus d’extermination comprime un homme dans des pièces basses de plafonds pour soudainement le projeter dans des salles gigantesques robotisées ou accusatrices jumelées à un Adagio répétitif.
Il faut atteindre péniblement des tribunes surélevées. Côtoyer des créatures offertes sur des tonnes d’archives servant de support d’étreintes. Encaisser de soudains revirements incohérents. Se miniaturiser dans un péplum architectural archaïque ou moderne.
Survivre à la claustrophobisation d’une pièce exiguë scrutée par des regards adolescents joueurs et moqueurs. S’enfuir terrorisé dans des passages criblés de raies de lumières. Soutenir l’impossibilité de communiquer à travers une baie vitrée.
K endure son Golgotha dans un cauchemar de dominances et de soumissions en alternances. Certains tyrans se retrouvent tyrannisés par leurs propres systèmes. Les femmes s’offrent sans tarder puis congédient rapidement. K perd pied en s’enfonçant dans le royaume le plus redoutable : L’incompréhension.
L’acharnement administratif procédurier fait rage, l’incohérence, le rabaissement continuel par un geste éprouvant autant qu’inutile lamine un visage de plus en plus décomposé. L’escalade est prescrite afin de se disculper devant des accusateurs lubriques entretenant une paranoïa individuelle par un pseudo procès susceptible de toucher n’importe lequel d’entre nous. Le système n’a pas la maturité de s’apercevoir qu’en pulvérisant une ressource il se dynamite de l’intérieur.
Orson Welles cinéaste surdimensionné en lui-même et dans son œuvre offre un travail exceptionnel. Le procès opus de référence d’un noir et blanc indispensable à sa valeur livre des clairs obscurs magnifiques. Certains plans extérieurs d’une luminosité blafarde offrent des brèches contemplatives étonnantes.
Un processus de démolition cauchemardesque calibré dans une technique contenant quelques pépites de Citizen Kane font de cette merveille paranoïaque un esthétisme baroque de premier ordre.
« Le procès » œuvre maîtresse d’un technicien hors pair déploie les vérités d’un visuel déprimant mais terriblement accrocheur, presque attirant.