Eaux troubles et stagnantes
Le 9 mars 2007
Walter Salles signe un remake appliqué, maîtrisé de bout en bout et remarquablement interprété. Sobre et sombre.
- Réalisateur : Walter Salles
- Acteurs : Tim Roth, John C. Reilly, Jennifer Connelly, Dougray Scott, Pete Postlethwaite, Camryn Manheim
- Genre : Fantastique, Thriller
- Nationalité : Américain
- Editeur vidéo : Buena Vista Home Entertainment
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– Durée : 1h45mn
– Remake de Dark water, film de Hideo Nakata (2003)
Walter Salles signe un remake appliqué, maîtrisé de bout en bout et remarquablement interprété. Sobre et sombre.
L’argument : Dahlia Williams (Jennifer Connelly), en instance de divorce, emménage avec sa jeune fille, dans un appartement glauque, au sommet d’une tour new-yorkaise grisâtre. D’étranges infiltrations d’eau dans le plafond de sa chambre réveillent ses angoisses liées à son enfance et à son rôle de mère. Fantômes ou psychose, la limite entre le surnaturel et la folie se rétrécit de plus en plus autour d’elle...
Notre avis : On ne posera pas ici la délicate question de la raison d’être de l’adaptation des succès du cinéma fantastique nippon. Non, l’adaptation de Walter Salles ne vaut pas l’original de Hideo Nakata, pour la simple et bonne raison qu’il n’en est qu’une relecture. Oui, si l’on entrait dans les détails, on trouverait sans doute d’autres raisons de préférer Nakata. Mais il faut prendre le film de Walter Salles pour un tout, et laisser aux théoriciens de la théorie le sujet de thèse qu’on pourrait sans douleur faire naître de la folie des remakes.
Walter Salles est un touche-à-tout curieux qu’on n’attendait peut-être pas à la direction de ce Dark water. Un premier bon point pour lui, son film est un modèle de sobriété et de maîtrise. Passés les quelques effets horrifiques inévitables, Dark water est d’une froideur de circonstance. Des murs au ciel, tout y est gris et triste, comme les âmes des personnages. Dans le visage de Jennifer Connelly, ses yeux (les plus beaux du cinéma contemporain, c’est une évidence depuis Requiem for a dream) expriment toute la détresse d’une enfant délaissée par sa mère et qui fait face à une maternité qui la dépasse. Car Dark water est, plus qu’un mystère fantastique, une fable sur l’enfance et la difficulté d’être mère.
Connelly-Dahlia emporte dans sa lente aux enfers les murs qui l’entourent, comme les murs l’emportent. On ne sait qui pèse sur l’autre. Au dehors, Salles imagine un New York pluvieux, sans lumière, bétonné à l’excès (on pense par instants à l’univers détrempé de Seven).
Pourtant, Dark water, paradoxalement, recèle une dose d’espoir qui sauve son histoire de la dépression sans retour. Tous les personnages secondaires (impeccables, de Tim Roth à la jeune fille de Dahlia), qui semblaient être les signes d’un monde égoïste et indifférent, vont peu à peu prendre de l’épaisseur et révéler, sous les mensonges et les apparences, une fragilité toute humaine.
Car au final Dark water parle aussi de nos failles, de nos solitudes inavouables et de notre manque de confiance en notre capacité à donner ce qui fait la vie et la lumière : l’amour.
Le DVD
Le(s) supplément(s) à ne pas rater : Comme c’est trop souvent le cas chez cet éditeur, les bonus confinent à l’auto-congratulation irritante. Sous la surface, making of d’un quart d’heure, en est l’illustre exemple ; on n’apprend rien si ce n’est que toutes les personnes investies dans cette production sont irremplaçables dans les cœurs (cf. aussi Une équipe extraordinaire). En revanche, le travail sur le son mérite que l’on s’y attarde, ainsi que l’analyse de scènes selon un différent montage avec les explications des techniciens et les raisons de leurs choix artistiques. Une édition classique en somme qui ne bouleversera les codes du genre.
Image & son : Très belle qualité formelle pour cette édition, parue chez Buena Vista, en parfaite adéquation avec le fond du film. Ambiance sinistre amplifiée par une définition chirurgicale et une gestion des contrastes parfaite (on distingue à souhait les horreurs nichées dans les zones d’ombre). Le Dolby Digital 5.1 (anglais ou français) achèvera de coller la chair de poule : les moindres effets sonores passent d’une enceinte à l’autre avec une aisance déconcertante ; le relief est impeccable donnant toute sa mesure angoissante au remake de Walter Salles.
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