Amour et autres contrariétés
Le 2 septembre 2024
Ce que l’usure du temps fait à un couple ordinaire... un drame minimaliste, attachant, et efficace.
- Réalisateur : Derek Cianfrance
- Acteurs : Michelle Williams, Ryan Gosling, Mike Vogel, John Doman, Maryann Plunkett
- Genre : Drame, Romance
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Films sans Frontières
- Durée : 1h54mn
- Date de sortie : 15 juin 2011
- Plus d'informations : Le site officiel
- Festival : Festival de Cannes 2010
Résumé : À travers une galerie d’instants volés, passés ou présents, {Blue Valentine} raconte l’histoire d’un amour que l’on pensait avoir trouvé, et qui pourtant s’échappe. Dean et Cindy se remémorent les bons moments de leur histoire et se donnent encore une chance, le temps d’une nuit, de sauver leur mariage vacillant. Le titre est une référence directe à la chanson éponyme de Tom Waits.
Critique : Symboliquement, Blue Valentine s’ouvre sur un cri : Frankie, la fille du couple, est à la recherche de son chien, retrouvé mort peu de temps après par Dean (Ryan Gosling). À l’image de cette séquence inaugurale, le film sera habité par la présence invisible et impalpable d’une crainte. Celle de la rupture, du divorce ? Derek Cianfrance et Cami Delavigne, sa scénariste, ne cachent pas combien leur propre enfance a été hantée par la séparation (réelle ou redoutée) de leurs parents. Du reste, le film se propose, avec une sincérité indéniable et dans un registre assez proche du documentaire - il a été en bonne partie improvisé - de diagnostiquer l’intimité du couple. La démarche est d’une précision médicale étonnante (Cindy est médecin) : grâce à la caméra, on ausculte le quotidien des personnages, leur passé, leurs jalousies et angoisses.
Pourtant, Blue Valentine ne s’apparente qu’à demi à un drame familial : c’est une histoire comme toutes les autres. Le bonheur y est aussi fragile que le film lui-même, sa structure alambiquée (il repose sur une succession de flash back), son éclairage bleu et triste. La belle performance des acteurs n’est pas pour rien dans le charme qu’il opère : leur fragilité nous est parfois étrangement proche. La mise en scène tient à quelques détails et délaisse les artifices pour nous donner à voir les conflits des personnages dans toute leur violence et leur simplicité (belle construction dramatique, qui culmine lors du "pétage de plomb" à la clinique).
Certes, Blue Valentine ne bouleverse pas : le parti pris du "drame anodin" fait que l’image renvoyée au spectateur supplante bien vite son intérêt pour l’intrigue. C’est un peu le piège dans lequel tombe le réalisateur, trop soucieux de vouloir nous identifier à Dean et Cindy. Forcément subjective, cette fausse histoire d’amour - d’un amour à retrouver - nous épargne néanmoins les maladresses auxquelles on aurait pu s’attendre. De belles scènes (un mariage onirique) ponctuent un récit simple, économe, et assez fluide. Inoffensif, peut-être, mais élégant.
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Jujulcactus 30 juillet 2011
Blue Valentine - Derek Cianfrance - critique
« Blue Valentine » est un film sur l’amour qui s’étiole, il s’articule autour de deux périodes de la vie d’un jeune couple espacées de 6 ans : la rencontre et une grave crise. Ce croisement temporel est d’une grande subtilité, chaque scène venant en résonance à une autre, le récit est étonnamment fluide. Et lorsque le réalisateur nous met les sourires béas des prémices en parallèle des déchirements de ce même couple usé par le temps, c’est d’une efficacité troublante. « Blue Valentine » est un drame où l’émotion sourde touche dès les premières minutes et nous rend otage d’un couple qui se consume à petit feu. Plein de petites étapes de la vie dont émane humanité, simplicité et grâce, pour nous amener vers un final inévitable. Aussi cruel que magnifique, doux et violent à la fois, le film étonne par sa justesse de tout les instants... Une réussite qui doit beaucoup aux partitions impressionnantes des deux interprètes principaux : Ryan Gosling et Michelle Williams. Leurs jeux épatants arrivent à rendre les personnages attachants malgré leurs travers, et leur alchimie à l’écran est indiscutable. Deux futurs grands noms à l’avenir des plus radieux, non content d’une prouesse d’acteur, Gosling a même participé à la superbe BO avec son ukulélé ! Quand on sait que « Blue Valentine » est la première réalisation de Derek Cianfrance, ça laisse rêveur... Son film coupe littéralement le souffle par son soucis du détail, son réalisme et son émotion constante. Beau, subtil, élégant mais pourtant terrible : Coup de coeur !