Notre avis  : Lisa See, une auteure sino-américaine, met ici à profit cette double culture et signe un polar noir, à la fois politique et historique, entre amour et noirceur, entre aventure et hémoglobine.
Liu Hulan, inspectrice pékinoise est appelée en catastrophe : le corps du fils de l’ambassadeur américain vient d’être retrouvé, coincé sous la surface gelée du lac de Bei Hai, s’étendant au pied de la Cité Interdite. Pendant ce temps, David Stark, assistant du procureur général à Los Angeles, en Californie, est bientôt confronté à son premier cadavre repêché, alors qu’il surnageait dans la réserve d’eau potable du Peony, un bateau chinois rempli à craquer d’immigrants illégaux. Les deux pays les plus puissants du monde vont donc devoir mettre de côté leurs tensions, pour pouvoir avancer main dans la main et élucider ces deux crimes. Le choc des cultures, la vie à la pékinoise, mais aussi à l’américaine, sont décortiqués en arrière-plan, apportant une richesse bienvenue à l’ensemble de l’œuvre. Voilà donc David qui s’envole pour Pékin, un secret espoir dans la tête et surtout dans le cœur…
Lisa See parvient à faire monter le suspense, donnant un rythme très soutenu à son roman. Le lecteur ne se voit accorder aucun répit : meurtres, sang, scènes macabres, amour, filatures, poursuites, différends politiques… Pour autant, l’auteure est parvenue à doser précisément chacun de ces éléments et La mort scarabée compose donc un ensemble harmonieux, riche en détails historiques et politiques, riche en tension et en interrogations également.
L’enquête se disperse parfois un peu, mais c’est un procédé comme un autre pour préserver le mystère et construire un vrai page-turner. Les rebondissements sont multiples, sans pour autant qu’un coup de théâtre n’éclate toutes les deux pages : tout est dans l’équilibre et dans le doigté de Lisa See. Les révélations se font au compte-gouttes, ce qui épargne au lecteur l’inévitable réplique de deux pages, un personnage dévoilant l’envers du décor. L’auteure est bien trop fine pour se laisser aller à une facilité si grossière.
Une fois l’enquête policière bouclée et le lecteur au courant du moindre détail, les dernières pages laisseront malgré tout un goût amer d’inachevé. L’intimité des personnages, bâtie en parallèle de l’investigation, reste donc en suspens, et l’inévitable question « et donc ? » sera sur toutes les lèvres.