Le 3 octobre 2007
Stigmatisé par le sceau d’une interdiction aux moins de 18 ans, Quand l’embryon part braconner sort ce mercredi. Un symbole douloureux des menaces de censure qui planent de plus en plus sur une production cinématographique que certains voudraient plus aseptisée. Le pire des mondes en quelque sorte !
Stigmatisé par le sceau d’une interdiction aux moins de 18 ans, Quand l’embryon part braconner sort ce mercredi. Un symbole douloureux des menaces de censure qui planent de plus en plus sur une production cinématographique que certains voudraient plus aseptisée. Le pire des mondes en quelque sorte !
La commission de classification fait encore parler d’elle. En interdisant aux moins de 18 ans le film japonais Quand l’embryon part braconner, elle soulève de nouveau la polémique, exerçant indirectement une véritable censure économique qui induit une méfiance des exploitants à l’égard du potentiel de l’oeuvre interdite aux mineurs et empêche sa diffusion sur une chaîne publique. Tout cela avec la bénédiction d’un gouvernement consentant puisque la Ministre de la Culture a effectivement entériné cet avis ce mardi 2 octobre. Une décision d’une rigidité rare pour une petite œuvre subversive des années 60 qui s’adresse pourtant à un public autrement plus mature que des lycéens, et qui s’oriente exclusivement vers une diffusion dans le circuit art et essai. Celui-ci, fréquenté principalement par des étudiants, des intellectuels et des curieux - majeurs, cela va sans dire - n’a jamais cessé de programmer des spectacles alternatifs permettant ainsi de sonder toute la complexité de l’humanité jusque dans ses extrêmes. Bataille dans le ciel, Le livre de Jérémie, La bête aveugle, Audition ou Calvaire ne sont que quelques exemples de films « adultes » parmi d’autres proposés dans ces salles. Actes amoraux ; barbarie ; rapports sexuels non simulés... On y a tout vu, sans que cela ne blesse vraiment quiconque et que tombe le couperet de la maudite interdiction qui relègue les oeuvres à de la pornographie. Les salles Mk2, Diagonal ou Utopia n’ont jamais vraiment été le berceau de la délinquance française, ni de la corruption juvénile. Ce n’est pas Quand l’embryon part braconner qui allait changer la donne. Mais certains hauts dirigeants bien-pensants en ont décidé autrement.
Le coup est d’autant plus inquiétant qu’il intervient un peu moins d’un an après la décision d’interdiction aux moins de 18 ans de Saw 3 (sa suite Saw 4 qui sort en novembre n’est, à ce jour, pas encore passé en commission plénière), spectacle commercial hyper violent, fustigé à tort alors que d’autres productions cousines comme Wolf creek ou Hostel 2 s’en sortaient avec une classification moindre. Décision hypocrite et symbolique qui frappait cette fois-ci une œuvre attendue qui de toute façon allait être téléchargée illégalement, voire louée et achetée en supermarché par des milliers de mineurs en toute impunité. Car oui, si l’interdiction est plus ou moins appliquée en salle, tout le monde sait que dans les vidéoclubs et les centres commerciaux, les ados sont souvent des petits kings qui ridiculisent les plus grands prèzidènts (et oui, désormais il faut le prononcer à l’Américaine) en cédant à l’appel de l’interdit.
Alors que la France, à la surprise générale, semble virer de cap en politique étrangère, la culture semble elle aussi prendre des sentiers insolites, assujettie à des exigences morales bien conservatrices. La sexualité et la violence redeviennent taboues. Alors que nous avions pendant longtemps profité d’un système d’une grande ouverture d’esprit unique au monde - il n’y avait qu’à voir l’Angleterre des années 80-90 engluée dans une censure haineuse, les donneurs de leçon imposent leur voix. Les parangons de la vertu cinématographique (les USA et le Royaume Uni en premiers) lâchent du lest, mais la France, elle, s’offusque. L’Europe commence à marier ses homosexuels, mais l’Hexagone, lui, semble vouloir s’enfermer à nouveau dans des dilemmes moraux d’un autre temps sous prétexte qu’il faut protéger les petits. Un bien curieux prétexte pour des jeunes que l’on n’écarte en rien des dangers de la surconsommation par ailleurs. Et oui, l’art serait devenu nocif ; mais pas les téléphones portables. Et comme il faut taire les esprits subversifs toujours prompts à ébranler les fondements de l’Etat, autant commencer par le cinéma. Voilà qui est bien pathétique, vous en conviendrez !
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