Le 2 mai 2021
Un premier roman qui tente de saisir l’essence même de la vie dans des marais, au début des années 1960. En reprenant leur vocabulaire, Virginie Barreteau dresse un portrait sans fard de personnages simples et courageux, où la douleur du corps supplante celle des esprits. Un livre sur les âmes abîmées qui, parfois, se mettent à nu.
- Auteur : Virginie Barreteau
- Editeur : Editions Inculte
- Genre : Roman
- Nationalité : Française
- Date de sortie : 3 mars 2021
- Plus d'informations : Site de l’éditeur
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Résumé : Un médecin de campagne sillonne les marais pour faire la tournée des maux des habitants. Confronté à la misère et au sous-développement de ces contrées vendéennes, il tente de les mettre en lumière en les photographiant, pour lui, par souci de fixer ces patients atteints par la dureté de leur vie. Un jour, Pacot, l’un d’entre eux, disparaît, venant bousculer la vie quotidienne des maraîchins.
Critique : Virginie Barreteau écrit pour le théâtre et cela se ressent dans ce roman : les paroles et la langue des habitants des marais sont partout présentes, que ce soit dans les nombreux dialogues ou la précision des descriptions. Les maisons sont des « bourrines », habitations traditionnelles du nord de la Vendée, les barques des « plates », car à fond plat. Le docteur se définit uniquement par sa fonction, les femmes par leur place dans la famille (la mère Tresseau ou la fille Rabiller). Mais il y aussi celles qui ont leur propre identité : Françoise ou Véronique, la femme du médecin, dont l’amitié partagée leur confère une certaine intimité.
Le roman se veut parfaitement naturaliste, dans la mesure où c’est bien le milieu dans lequel évolue les personnages qui leur attribue des traits spécifiques. L’écriture poétique et pudique capture les personnalités, leur environnement et leur manière de penser. Les événements clés de la vie, à savoir la naissance et la mort, donnent ici lieu à des scènes rudes mais simples, comme peut l’être le milieu qui les entoure. Le docteur est ainsi central à l’intrigue, à la fois en dehors des gens qu’il soigne, mais aussi happé par ces rencontres, torturé, concerné par la vie de ses patients.
Sa passion pour la photographie ne s’explique pas, il veut saisir cette vie qui remplit son quotidien, celle des habitants de ces marais. Il cherche à les convaincre de poser pour lui, se heurtant souvent à de l’incompréhension et des refus obstinés. De ces photos, il ne fait pas grand-chose, si ce n’est qu’elles lui donnent l’impression de mieux voir à travers eux. En soignant les corps, il tente aussi d’apaiser les esprits, témoin impuissant des ravages d’un dur labeur quotidien, mêlé à la misère des terres isolées.
Les non-dits sont nombreux, dans ce village où les gens sont peu causants, soucieux de quiétude et de s’occuper de ce qui se passe chez soi. Mais la disparition de Pacot inquiète, d’une manière que le docteur a du mal à saisir : pourrait-il simplement s’être enfui vers la ville ? Faut-il vraiment faire la lumière sur cette disparition, cela nous regarde-t-il vraiment ?
Parfois, la dureté de la réalité apparaît comme dans un flash. La lumière, qui joue un rôle à la fois bienveillant et protecteur dans ces zones humides et sombres, ne parvient jamais réellement à se répandre. On ne sait jamais vraiment ce qui se passe chez les gens, même lorsqu’on est celui qui les ausculte.
L’écriture de ce roman peut paraître déroutante au début, mais c’est pour mieux accompagner le lecteur dans cette atmosphère qui rappelle la Louisiane, à travers les romans typiques américains et que l’on retrouve assez peu dans la littérature française. L’histoire de ce livre résonne grâce à la galerie de portraits impeccable et la minutie des mots choisis par l’auteur, dans chaque situation.
198 pages - 16,90 €
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