Le Nord a Bob Dylan, le Sud a Violeta...
Le 24 novembre 2012
Après La buena vida et Mon ami Machuca, le cinéaste chilien Andrès Wood s’attaque au biopic d’une légende nationale : l’artiste Violeta Parra.
- Réalisateur : Andrés Wood
- Acteurs : Francisca Gavilán, Thomas Durand, Christian Quevedo
- Genre : Biopic
- Nationalité : Brésilien, Argentin, Chilien
- Durée : 1h50mn
- Titre original : Violeta se Fue a Los Cielos
- Date de sortie : 28 novembre 2012
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Après La buena vida et Mon ami Machuca, le cinéaste chilien Andrès Wood s’attaque au biopic d’une légende nationale : l’artiste Violeta Parra.
L’argument : Violeta Parra, chanteuse, poète et peintre, est une véritable icône de la culture chilienne. Violeta retrace le destin d’une femme hors du commun, ses succès et sa déchéance. De son enfance aux côtés d’un père alcoolique, en passant par son apprentissage de la guitare, son rapport brutal et déterminé à la maternité et au monde, ses engagements esthétiques et politiques, jusqu’à sa fin tragique.
Rythmé par ses chants poignants et minéraux, tout droit sortis des entrailles de la terre chilienne, et construit avec une grande liberté, le portrait de cette artiste tourmentée et passionnée est porté avec une grâce magnétique par Francisca Gavilan.
Notre avis : Les biopic ont le vent en poupe et c’est tant mieux. Avec Violeta, Andrès Wood tente à son tour l’aventure. La mythique poétesse chilienne n’est pourtant pas femme facile à cerner. Enjouée, mélancolique, têtue, engagée, fragile, violente et excessive, la chanteuse passionnée brûle de vivre coûte que coûte, quitte à consumer ses ailes. Son art, porte-voix de toute une nation, crie avec justesse les inégalités sociales et l’espoir utopique d’un monde meilleur. Et pour Violeta, créer c’est recueillir. Carnet à la main, elle choisit de partir à la rencontre des paysans et des indiens, à la recherche de leur tradition musicale.
Sur son chemin, elle croise Gilbert Favre, l’amour de sa vie.
Insoumise et profondément habitée, Violeta est l’une de ces artistes absolues dont le magnétisme attire, bouleverse, et trouble le coeur. Face à son trop plein d’émotion et sa douleureuse rage de vivre, on ne peut rester insensible.
Et comme pour mieux respecter la révolte libertaire de la chanteuse, le cinéaste fait dans ce biopic le sacrifice de la linéarité dramatique au profit d’une construction chaotique. Guidée par l’instinct plus que par la logique, l’intrigue chemine sur deux continents et trois temporalités : l’enfance chilienne populaire, la naissance artistique en Europe, et enfin, la consécration et la chute sur sa terre natale. Un choix audacieux, qui se révèle payant, la chronologie saccadée accompagnant à merveille les élans lyriques et humanistes de Violeta. Armée de sa guitare, la chanteuse part, poing levé, à la conquête du monde laissant derrière elle mari et enfants. A Paris, elle expérimente une vie bohème axée sur la création : peinture, céramique, tissage, son expression se tisse et s’épaissit à l’infini. En 1964, elle est la première femme à exposer au Louvre. De la Russie à l’Italie, de la Finlande à l’Argentine, de l’Allemagne à la France, elle sillonne la planète. Tout lui réussit, sauf l’amour qui s’enfuit. Gilbert la quitte. Rentrée au pays l’année suivante, elle noie sa mélancolie dans une nouvelle aventure : l’ouverture d’un centre culturel populaire sur les hauteurs de Santiago. Sous son chapiteau de cirque, Violeta accueille et produit des artistes de tous horizons. Et surtout, elle chante, spontanément et sincèrement.
Pour elle, ’’La création est un oiseau sans plan de vol qui n’ira jamais tout droit’’.
Une authenticité d’autant plus magnifiée par l’interprète (Francisca Gavilan), poignante de sincérité. Habituée des planches, elle s’est fait connaitre au théâtre mais dit n’avoir jamais chanté avant. On peine à la croire à l’écoute du film, tant la puissance du timbre vocal balaye tout sur son passage. Francisca semble bel et bien avoir réussi à saisir l’intensité de Violeta, son mal être aussi. La symbiose est d’ailleurs telle, que l’on aperçoit presque danser dans les yeux de Francisca, la flamme de Violeta. Seul bémol à la partition d’Andrès Wood, un certain clacissisme dans la mise en scène qui contrebalance l’audace d’une narration déstructurée et inspirée. Une timidité heureusement rattrapée par l’éclatant travail sur la lumière.
Sombre, poussiéreuse et contrastée, l’image crépusculaire de Violeta embarque d’un seul coup d’oeil le spectateur dans la tourmente de son héroïne. Un tourbillon relayé par une caméra en mouvement, une focale dévorant le visage de l’artiste et une esthétique mêlant cadrages intimistes et portraits picturaux. Embarqué auprès d’elle, le spectateur se prend d’empathie pour les coups de coeur de Violeta. Pour ses coups de sang aussi. Et quand un matin, elle choisit de se donner la mort, loin de la condamner, on se prend à admirer son ardente fierté dans la tempête.
Avec plus de trois mille oeuvres diverses et variées, Violeta reste et restera l’intemporelle figure chilienne. Un morceau sans fausse note pour cette envolée poético-cinématographique.
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