Chute libre
Le 4 février 2015
Pour son premier film, Saar Klein filme l’errance d’un père de famille modèle en perdition. Entre fonds d’écran Windows façon Malick et niaiseries chroniques, notre cœur balance.
- Réalisateur : Saar Klein
- Acteurs : Wes Bentley, Haley Bennett, Vinessa Shaw, Jason Isaacs
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h50mn
- Date de sortie : 18 février 2015
L'a vu
Veut le voir
Année de production : 2014
Pour son premier film, Saar Klein filme l’errance d’un père de famille modèle en perdition. Entre fonds d’écran Windows façon Malick et niaiseries chroniques, notre cœur balance.
L’argument : Bill Scanlon, un père de famille dévoué, perd son travail du jour au lendemain. Il n’a alors pas d’autre choix que celui d’entrer, presque à son insu, dans l’illégalité. Braquages, vols et errances s’immiscent bientôt dans son quotidien. Mais quand il se lie d’amitié avec un inspecteur de police, c’est la double vie qui est désormais la sienne qui risque à terme d’être révélée…
Notre avis : Par-delà toute morale, par-delà tout raisonnement logique – comme muer par une sauvagerie irrépressible -, il est certains actes ou comportements que l’être humain, en dépit de tout, ne parvient pas ou plus à réprimer. "Things People Do", assène en guise de titre ce premier long métrage de Saar Klein. Mensonges, vols, impétuosité... chacun au fond serait prêt à tout, au gré de l’existence et des contingences, pour préserver sa liberté, les siens et soi-même. Et qu’importe alors la bienséance. La preuve par dix, selon Klein : même un gentil commercial père de famille tout ce qu’il y a de plus rangé, équilibré et malléable peut basculer du jour au lendemain dans la folie – ici à cause d’un licenciement. Dès lors, c’est l’instinct primaire de survie qui prend le pas sur le reste, et l’individu se défait malgré lui de son masque social. Dans Things People Do, ce paravent nécessaire à chacun pour rester maître de soi est symbolisé par la piscine de la maison, matrice-métaphore qui va se dégrader au fil du délitement psychologique de Bill et de sa famille. D’abord cristalline et accueillante – voir la première séquence à la Malick où toute la famille se baigne sous un soleil couchant –, cette marque de stabilité financière et affective n’est bientôt plus qu’une mare croupissante et corrosive.
Via ce tableau de l’Amérique et par extension du monde moderne – le récit se veut universel –, le réalisateur cherche donc à illustrer comment la vie consiste à composer, parfois en en passant par la transgression la plus absolue, avec les obligations que nous imposent la loi, la morale, l’éthique ou encore l’amour. Contrairement aux apparences, le cheminement de la vie ne serait donc pas toujours limpide, semble comprendre le cinéaste. À l’être humain de s’accommoder de ces paramètres pour se maintenir à flot, lui et sa tribu. Problème : 2h de fadaises et pseudos fonds d’écran Windows sont-ils vraiment nécessaires pour élucider pareilles évidences ? Rien n’est moins sûr. Hitchcock ou Lynch, pour ne citer qu’eux, n’y auraient pas consacré plus d’une dizaine de minutes – qu’on se replonge dans L’inconnu du Nord Express ou Twin Peaks : Fire Walk with Me pour s’en convaincre.
Une chose est sûre, en revanche : difficile de ne pas s’ennuyer ferme devant Things People Do. À ses heures monteur pour Terrence Malick, Saar Klein se croit visiblement pousser des ailes en tentant des séquences dans le ton Tree of Life. Malheureusement, pas le moindre plan ici ou là pour soutenir la comparaison… et ce dans le fond comme dans la forme. Pour sauver ce film du naufrage, reste l’acteur Wes Bentley, qui restitue parfois fidèlement l’idée qu’on se ferait d’un père de famille en crise. Mais la nuance ne semble pas être le fort du comédien, qui tombe lui aussi rapidement dans la formule.
"Il n’y a ni bien, ni mal – seulement des gens qui agissent, font des choses", lance Frank McTiernan, l’inspecteur de police désabusé qui croise par hasard la route de Bill. Une position nihiliste intéressante mais que le réalisateur ne semble pas même chercher à exploiter à travers la mise en scène. À trop hésiter entre veine mainstream grand public – disons Chute Libre de Joel Schumacher voire Breaking Bad – et dimension auteuriste – par exemple, Take Shelter, de Jeff Nichols –, Saar Klein signe un film malade et médiocre. De quoi, éventuellement, occuper votre dimanche après-midi un lendemain de soirée.
© Chrysalis Films
Galerie Photos
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.