Film culte
Le 20 juillet 2022
Une suite de gags crescendo qui s’achève en apothéose visuelle délirante.
- Réalisateur : Blake Edwards
- Acteurs : Peter Sellers, Claudine Longet, Natalia Borisova, Jean Carson, Marge Champion, Al Checco
- Genre : Comédie, Film culte
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Splendor Films
- Editeur vidéo : MGM/United Artists
- Durée : 1h39mn
- Date télé : 19 avril 2024 20:50
- Chaîne : Ciné+ Classic
- Reprise: 20 juillet 2022
- Date de sortie : 13 août 1969
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Résumé : Hrundi V. Bakshi, un acteur indien, est engagé par un studio hollywoodien pour interpréter un soldat indigène dans un remake de "Gunga Din". Faisant preuve d’une terrible maladresse, il fait exploser un coûteux décor. Exaspéré, C.S. Divot, le producteur, demande à ce que le nom de Bakshi soit inscrit sur une liste noire. Mais suite à un quiproquo, le comédien indien se retrouve en fait invité à la soirée annuelle du studio...
Critique : Réalisé en 1968, The Party reste un film relativement méconnu en France, en dépit d’un potentiel comique toujours intact, plus de cinquante ans après sa sortie en salle.
- © Splendor Films
L’intrigue est inexistante et tout le film repose sur le déchaînement paroxysmique des gags. En privilégiant un comique presque exclusivement visuel, Edwards s’inscrit dans la grande tradition du burlesque américain qu’il revisite et remodèle : au lieu de l’enchaînement rapide des gags chez les grands maîtres du genre, il impose un rythme beaucoup plus lent, plaçant le spectateur en situation d’attente. Ce dernier n’est plus passif devant l’écran mais pénètre au contraire beaucoup plus dans le film, y participe presque, en tentant d’imaginer une chute toujours différée. Edwards joue sur l’exaspération de l’attente du spectateur et l’étirement à l’extrême des situations comiques ; certaines scènes sont d’une excessive longueur, à l’instar des premières minutes du film (le clairon Bakshi dont l’agonie bruyante paraît interminable) ou de l’anthologique scène des toilettes. Mais si Edwards évite l’ennui à son spectateur, c’est parce qu’il ponctue son film de gags improbables et imprévisibles. En retardant à outrance la chute, il instaure une atmosphère très particulière dans son film : l’inattendu reste la seule certitude dans cet univers chaotique où pèse la menace constante de l’irruption du gag.
Chaque apparition de Hrundi V. Bakshi à l’écran stimule et met en éveil les sens du spectateur, qui guette avec délectation l’instant critique où celui-ci commettra l’irréparable ; sa présence cataclysmique suffit à elle seule à transformer le lieu le plus anodin (des toilettes !) en spectacle de désolation, l’objet le plus insignifiant (une chaussure, un pistolet à fléchettes, un panneau de télécommande) en arme redoutable. Sa maladresse destructrice semble même irradier les autres personnages du film : un serveur alcoolique (interprété par l’excellent Steve Franken), un majordome proche de la crise de nerfs...
L’enchaînement des gags va crescendo pour s’achever en apothéose visuelle absolument délirante quand Bakshi décide de purifier l’éléphant souillé par les slogans hippies de Molly, la fille de la maison, et de ses amis. La villa des Clutterbuck est envahie par la mousse et la party se déchaîne sous les yeux du maître des lieux, résigné et étrangement flegmatique. Au petit matin, la party s’achève dans une atmosphère mélancolique.
- © Splendor Films
La réalisation, d’une implacable efficacité, ne souffre d’aucun défaut. En situant son action dans un lieu unique (exceptées les cinq premières et les cinq dernières minutes du film), en jouant avec des espaces dénudés (une villa immense et truffée de gadgets) et avec le temps (scènes longues, plans larges, peu de mouvements de caméra), Edwards concentre toute l’attention du spectateur sur ses personnages hauts en couleur : riches producteurs fumant le cigare, stars alcooliques, starlettes et coiffeurs efféminés... Le réalisateur se plaît à filmer cette faune hollywoodienne, superficielle et excentrique, au milieu de laquelle évolue le trublion Sellers.
The Party demeure, dans la forme et le fond, un film inclassable. Comédie burlesque, satire, conte moral : c’est un peu tout cela à la fois, comme si Blake Edwards avait voulu nous offrir un mélange des genres. Au final, on a un petit chef-d’œuvre, qui doit autant aux maîtres du muet du début du siècle qu’à Tati (chaque personnage du film est spectateur des autres et source de spectacle). Un film indispensable.
– Reprise en salles : 26 juillet 2022
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