Promène-toi dans mes bois
Le 12 juin 2015
Quand le cinéma d’auteur rencontre celui de Jess Franco, on obtient un film unique, mystérieux, à la beauté formelle évidente.
- Réalisateur : Peter Strickland
- Acteurs : Sidse Babett Knudsen, Eugenia Caruso, Monica Swinn
- Genre : Drame
- Nationalité : Britannique
- Durée : 1h41mn
- Date de sortie : 17 juin 2015
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Quand le cinéma d’auteur rencontre celui de Jess Franco, on obtient un film unique, mystérieux, à la beauté formelle évidente.
L’argument : Une lépidoptériste (spécialiste des papillons) austère entretient une relation sadomasochiste avec sa femme de ménage, jeune et soumise à tous ses désirs.
(C) Bac Films - The Jokers
Notre avis : Présenté récemment en compétition officielle au festival Hallucinations Collectives de Lyon, The Duke of Burgundy est le troisième film de Peter Strickland. Ce long métrage est une relecture assumée des films de Jess Franco (Venus in furs ; Succubus), à la sauce moderne.
Peter Strickland s’intéresse à la relation masochiste entre deux femmes d’âge différent : l’une a la cinquantaine, l’autre une vingtaine d’années. Dans l’intimité, elles jouent à s’affirmer dans des rôles conjugaux fantaisistes, où la répétition et l’échange de casquette, donnent naissance à des mise en scène érotiques troublantes.
Oeuvre manipulatrice, à l’instar de la déroutante scène d’introduction, The Duke of Burgundy est surtout une nouvelle expérience sensorielle de l’étrange, qui parlera à un public non gêné par les rythmes lancinants, puisqu’à l’instar du précédent long métrage de Peter Strickland, Berberian sound studio, The Duke of Burgundy s’évertue à mettre en scène l’ambiance et les émotions opaques de personnages déviants, avant de combler le scénario par des rebondissements. Les jeux de rôle entre les personnages féminins, tantôt victimes tantôt bourreaux, s’expriment par la répétition, l’inversion des statuts (qui est le dominant ? qui est le dominé ?), ce qui permet des surprises dans l’évolution des caractères. L’avidité de soumission sexuelle et le masochisme prégnant, sans céder aux clichés inhérents à ces pratiques au cinéma, servent de moteur à cet exercice de style qui en impose dans la forme.
(C) Bac Films - The Jokers
Pour asseoir son atmosphère éthérée, sombre et raffinée, The Duke of Burgundy peut compter sur une somptueuse bande-son signée Cat’s eyes, évanescente, atmosphérique, d’une empreinte exquise pour caresser l’image léchée qui n’est pas sans rappeler certaines œuvres d’Andrew Blake. Tout concourt à l’extase, élevant le fétichisme au rang d’art.
Peter Strickland n’a de cesse de perdre le spectateur, tant au niveau de l’unité de lieu de l’action (une belle bâtisse aux réminiscences gothiques, située dans une forêt perdue au milieu de nulle part), que de l’espace temps, un présent qui confine à l’intemporel.
Le cinéaste saupoudre son travail de certains symboles dont chacun peut se faire sa propre interprétation – le parallélisme avec le comportement d’insectes, la mystérieuse caisse aux formes macabres d’un cercueil – et le résultat tend une fois de plus vers l’objet filmique non identifié.
D’aucuns trouveront des limites à cette démarche artistique absolue : Peter Strickland est certes un excellent metteur en scène et un réalisateur hors pair, peut-être peut-on parfois lui reprocher de se regarde filmer. Mais qu’importe, en l’état, le film, visuellement somptueux, se pose comme un bel objet de cinéma, qui nous transporte dans un univers dans lequel on aime se lover.
(C) Bac Films - The Jokers
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