Droit au coeur
Le 16 janvier 2014
Un documentaire à vif sur les auteurs du génocide Indonésien. La réalité dépasse la fiction, sans même avoir eu besoin d’essayer.
- Réalisateur : Joshua Oppenheimer
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Britannique, Suédois, Norvégien
- Durée : 1h55mn
- Titre original : The Act of Killing
- Âge : Interdit aux moins de 12 ans avec avertissement
- Date de sortie : 10 avril 2013
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Un documentaire à vif sur les auteurs du génocide Indonésien. La réalité dépasse la fiction, sans même avoir eu besoin d’essayer.
L’argument : Lorsque Joshua Oppenheimer se rend en Indonésie pour réaliser un documentaire sur le massacre de plus d’un million d’opposants politiques en 1965, il n’imagine pas que, 45 ans après les faits, les survivants terrorisés hésiteraient à s’exprimer. Les bourreaux, eux, protégés par un pouvoir corrompu, s’épanchent librement et proposent même de rejouer les scènes d’exactions qu’ils ont commises. Joshua Oppenheimer s’empare de cette proposition dans un exercice de cinéma vérité inédit où les bourreaux revivent fièrement leurs crimes devant la caméra, en célébrant avec entrain leur rôle dans cette tuerie de masse. "Comme si Hitler et ses complices avaient survécu, puis se seraient réunis pour reconstituer leurs scènes favorites de l’Holocauste devant une caméra", affirme le journaliste Brian D. Johnson.
Une plongée vertigineuse dans les abysses de l’inhumanité, une réflexion saisissante sur l’acte de tuer.
Notre avis : Indonésie, 1965. Suharto prend le pouvoir. Sur ses ordres, plus d’un million d’opposants au régime sont exécutés. Indonésie, 2013. Rien n’a changé. Anwar Congo, ancien bourreau à la solde du pouvoir, s’est laissé séduire par la caméra de Joshua Oppenheimer. Avec ses compagnons de l’époque, ils ont accepté de jouer et mettre en scène leurs agissements d’alors. Le résultat en est sidérant.
Sur l’affiche de The act of killing, Werner Herzog annonce d’ailleurs “Je n’ai jamais vu de film si puissant, effrayant et surréaliste”. Le documentaire est tout autant un douloureux témoignage d’évènements atroces, peu connus de nos sociétés occidentales, qu’un travail cruel sur l’âme humaine. Jamais le concept de bien et de mal ne nous aura paru aussi lointain. Que peut conduire un être à torturer et massacrer de la plus vile manière qui soit un de ses semblables ? L’empathie ne serait-elle qu’une grossière idée utopiste ?
Psychanalyse barbare, The act of killing est une main sanglante tendue vers le spectateur. Anwar Congo, septuagénaire, explique que sa fascination pour les films de gangsters est à l’origine même de ce qui devint sa profession de foi. Recruté en 1965 par la milice, il est devenu un emblème du génocide. Le long-métrage revêt des allures surréalistes de making-of, où la culture indonésienne se mêle au septième art américain. Congo est félicité en direct sur un plateau de télévision pour le nombre de communistes qu’il a mis à bas. Les tableaux du documentaire, invraisemblables et bigarrés, mêlent réalité et fiction dans une sarabande endiablée.
Oppenheimer flatte l’orgueil de ces tortionnaires afin d’en faire jaillir l’essence absurde. “Plus réussi est le méchant, plus réussi sera le film” affirmait Hitchcock. Or, il n’est de scélérat plus terrifiant que celui qui nous côtoie. Une telle entreprise ne peut qu’être félicitée. Elle n’en reste pas moins incroyablement dérangeante, par la force dont il faut faire preuve face à une telle abomination. La scène où l’on voit des petits commercants chinois terrifiés se faire extorquer est par exemple insupportable.
Une apocalypse morale en quelque sorte.
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