Le 1er mars 2017
Excellent film noir méconnu, tout en tension et efficacité.
- Réalisateur : Leslie Stevens
- Acteurs : Warren Oates, Kate Manx, Corey Allen
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Noir et blanc
- Nationalité : Américain
- Durée : 1h19mn
- Reprise: 7 septembre 2016
- Titre original : Private Property
- Date de sortie : 29 juin 1960
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Sortie DVD & blu-ray : le 1er mars 2017
Résumé : Duke et Boots sont deux voyous. Un jour, alors qu’ils traînent du côté d’une station service ils voient une jeune femme à bord d’une belle voiture et décident de la suivre. Ils s’installent à côté de chez elle dans une villa inhabitée afin de l’épier...
Notre avis : Premier film de Leslie Stevens dont la brève carrière reste peu connue, Propriété privée est une série B noire impressionnante de maîtrise et profondément originale ; à partir d’une idée somme toute simple, deux marginaux épiant puis s’invitant chez une jolie blonde, le cinéaste installe une tension subtile, que les dernières minutes dénouent dramatiquement. Mais c’est aussi l’occasion de faire un portrait sarcastique de l’american way of life, avec ce couple idéal formé par Ann, la blonde suave, et Roger, le parfait homme d’affaires intéressé par toujours plus d’argent. Piscine, vue sur la ville, grande maison au goût exquis dans une résidence calme, ils ne manquent de rien ; sauf qu’on comprend très tôt qu’Ann est frustrée (elle met un nouveau négligé, il s’endort) et qu’elle est un objet parmi d’autres, à qui on donne de l’argent de poche, qu’on habille et nourrit. A-t-on déjà parlé de manière aussi franche de l’aliénation et du désir féminins (n’oublions pas que le film date de 1960 !) ?
Mais Stevens scénariste excelle aussi à installer un malaise et à le rendre durable ; dès le début, les deux voyous semblent dangereux avec le garagiste, puis avec un automobiliste qu’ils obligent à les emmener, mais ils en restent à la menace explicite, si bien que l’on ignore de quoi ils sont capables. De même les rapports entre Ann et Duke (remarquablement interprété par Corey Allen) sont-ils longtemps ambigus : Duke est-il amoureux ou méprisant, travaille-t-il pour son complice ou pour lui ? Si la fin clarifie les enjeux, la plus grande partie du film reste dans une zone grise permanente.
- VERSION RESTAURÉE © 2016 CINELICIOUS PICS. Tous droits réservés.
L’ambiguïté est aussi présente dans le personnage de Boots (formidable Warren Oates) : défini très tôt comme puceau, il déclare se réserver pour le mariage mais voudrait que Duke lui « arrange un coup » ; or d’une allusion à une homosexualité cachée à son impuissance finale, Stevens le dévirilise en même temps qu’il le complexifie. On pense quelquefois à Des souris et des hommes en les voyant tous deux, le fruste et le malin, déambuler, en plein désœuvrement : Boots riant exagérément à la fenêtre, s’en remettant à Duke pour aimer, lui faisant des reproches enfantins, n’est pas loin du Lennie de Steinbeck.
- VERSION RESTAURÉE © 2016 CINELICIOUS PICS. Tous droits réservés.
Et, comme dans le roman, les conséquences du pari initial ne peuvent être que catastrophiques.
On sent bien tout au long du film qu’il a été tourné avec peu de moyens (et en dix jours seulement) ; mais ici, avec si peu de personnages et de décors, le manque n’est en rien une gêne, d’autant que Stevens use remarquablement des effets à sa disposition : voir par exemple le beau travelling qui accompagne la danse d’Ann et de Duke, ou l’ivresse de la jeune femme vue à travers un verre au premier plan ; d’une manière générale, ce cinéaste débutant maîtrise le cadrage, avec de belles occurrences des contre-plongées, ou les deux combats nocturnes, tous deux stupéfiants de précision.
Certes on a parfois l’impression d’une mise en scène un peu gratuite ; de même la musique alourdit-elle certaines séquences ; mais globalement, on tient là une belle découverte, soignée et efficace. Cerise sur le gâteau, le fin qui se veut rassurante est contredite par un beau plan débullé qui montre que rien n’est réglé.
Après une reprise sur le grand écran pour le moins réussie, Carlotta dévoile l’édition DVD et Blu-ray pour les curieux qui n’ont pas pu fréquenter les quelques salles françaises qui ont programmé ce joyau du cinéma noir.
Les suppléments :
Ce film rare et méconnu bénéficie d’un supplément de 18mn en HD, une interview du photographe Alexander Singer, qui se souvient de cette expérience de cinéma étrange.
L’éditeur propose également la bande-annonce proposée lors de la reprise, en 2016.
L’image :
L’expérience visuelle n’est pas des plus grandioses pour une restauration d’une oeuvre du répertoire, mais propose une certaine profondeur de champ et une restitution tout à fait agréable du noir et blanc. Un atout majeur.
Le son :
Point de français, heureusement par ailleurs. Une version originale gratifiée d’un DTS-HD Master Audio 1.0 et d’une piste PCM 1.0. Cela relève les dialogues sans pour autant permettre à l’environnement sonore, limité par son époque, de s’envoler.
Format 1.66 respecté.
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