Papilles perverses
Le 17 décembre 2002
Un premier roman qui nous parle de sens et de perversions, de folie et d’ambition.
- Auteur : Béatrice Joyaud
- Collection : Série noire
- Editeur : Gallimard
- Genre : Polar, Roman & fiction
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On ne peut pas dire que Balthazar Chacun soit né avec une petite cuiller en argent dans le bec. Trouvé dans un panier ou né dans une huître, la différence n’est que poétique. Il va pourtant, en quelques années, savoir transformer ces débuts malencontreux en une des plus belles histoires de l’art culinaire. Génie des saveurs, virtuose des papilles, rien n’est jamais laissé au hasard pour faire de ses créations des perles de perfection.
Mais ce serait peu que de s’en tenir là. La curiosité et l’ambition de Balthazar Chacun ne sont jamais en paix, et c’est l’escalade. Le goût n’est plus seul en cause. On parle des sens, de tous les sens, ouverts par le choc des papilles, la saveur inspirée, la magie des mélanges, le soupçon de sorcellerie. Balthazar s’enferme dans son laboratoire secret, chiffre et porte dérobée, pour tester, penser, manier les substances les plus rares, les plus insolites, qui feront de lui l’unique. Poussières minérales, humeurs humaines, racines vénéneuses, les limites du tabou se font de plus en plus lointaines, de plus en plus floues, jusqu’à l’irréparable.
Béatrice Joyaud s’est, à l’évidence, beaucoup amusée en imaginant cet univers de la perversion des sens. L’écriture est gourmande, rapide, débridée, disant avec autant de justesse l’ambition et son instrument. On salive devant ces trouvailles culinaires et esthétiques, fouillées jusqu’à la moindre pincée de muscade.
Dommage, pourtant, bien dommage, que plane sur tous ces plaisirs, l’ombre importune de Jean-Baptiste Grenouille ! Du goût au Parfum, la frontière est mince et l’héritage de Patrick Süskind dur à oublier. Il y a aussi du Huysmans, dans cette esthétique des sens, qui nous renvoie au fameux "dîner noir" de À rebours. L’exercice était périlleux. Mais au final... Pourquoi bouder son plaisir ? Béatrice Joyaud sait raconter et ses mots s’avalent d’un trait. Alors, on attend la suite ! Une mise en bouche n’est là que pour nous faire saliver !
Béatrice Joyaud, Plaisir en bouche, Gallimard, coll. "La Noire", 2001, 196 pages, 14,50 €
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