P’tit Quinquin - Bruno Dumont - critique

Dès le 4 novembre, chacun pourra se procurer le DVD ou le Blu-ray de la série diffusée sur Arte les 18 et 25 septembre 2014, qui réunit 1,5 million de spectateurs dès la première semaine de diffusion. Il faut dire que cette mini-série de quatre épisodes, à la frontière du film - c’est d’ailleurs dans un format de film, d’une durée de 3h30, qu’elle fut diffusée à la Quinzaine des réalisateurs à Cannes - ne manque pas d’originalité et pousse le comique dans ses derniers retranchements.

Critiques Si la critique s’accorde plutôt bien pour lui reconnaître de grandes qualités et salue son indéniable force comique - les Cahiers du Cinéma parlent même du "film le plus drôle depuis des années" - l’avis des spectateurs est plus mitigé. En effet, avec P’tit Quinquin, Bruno Dumont - jusqu’ici plutôt coutumier de films radicaux, comme Camille Claudel, 1915 - ne fait pas dans la dentelle. Il faut savoir rire de tout : de l’accent Ch’ti, des handicapés, du racisme et même de la mort. On aime ou on n’aime pas, mais il faut avouer que le réalisateur pousse le bouchon un peu loin en mettant en scène des personnages aux "gueules" pas possibles, présentés comme des débiles profonds. De quoi déplaire aux habitants du Nord, une fois encore dépeints comme des arriérés. Pourtant, Bruno Dumont aime profondément cette région - qu’il filme avec précision - et semble plutôt avoir voulu proposer une caricature de la caricature des Ch’tis. À méditer.

© Roger Arpajou

Toujours est-il que la démarche est intéressante. P’tit Quinquin, c’est une enquête policière menée par deux gendarmes hors normes, ridicules et hilarants - dont un commandant totalement défiguré par ses grimaces et tics incessants - sur une ambiance "Guerre des boutons", entretenue par le terrible P’tit Quinquin et sa bande de copains, toujours prêts à faire les quatre cents coups. Certes, le résultat est là. Les situations sont grotesques et décalées, et les dialogues n’ont ni queue ni tête, à l’image de ces crimes improbables (des morceaux de corps humains sont retrouvés dans des corps de vaches). L’enquête suit son cours à coup de questions absurdes et de déductions totalement farfelues, prise en charge par ces deux gendarmes qui semblent tout droit sortis d’un film muet et servent un comique de gestes savoureux. Quelques scènes clés d’humour grinçant - telles que celle de la folklorique cérémonie d’enterrement - viennent rythmer le tout et font la force principale de la série. Du "tragique-comique", en somme. C’est ainsi que Bruno Dumont qualifie son œuvre. Toutefois, l’intrigue se traîne un peu et le comique s’essouffle à la longue, une fois l’effet de surprise dépassé. Reste à voir si la saison 2 saura apporter du renouveau.

© Roger Arpajou

Le DVD
Quant au coffret DVD (2 DVD de deux épisodes chacun + un entretien avec Bruno Dumont par Philippe Rouyer), il est techniquement de qualité correcte, même si l’image souffre parfois d’un manque de netteté. En ce qui concerne les suppléments, il n’y en a qu’un seul, un entretien avec Bruno Dumont (20mn). Dans cet entretien précieux, le réalisateur évoque le projet de la série, le tournage, le choix des acteurs - tous amateurs - et enfin l’importance du montage et de la fabrication du comique. De quoi donner des clés pour mieux comprendre les enjeux de cette œuvre originale et offrir quelques anecdotes à se mettre sous la dent...