Jean Marais et le mythe Cocteau
Le 18 août 2013
Transposition du mythe d’Orphée dans l’univers de Saint-Germain-des-Prés, ce poème symboliste contribua à assurer la réputation mondiale de Jean Cocteau en tant que cinéaste à part entière.
- Réalisateur : Jean Cocteau
- Acteurs : Jean Marais, François Périer, Henri Crémieux, Jacques Varennes, Jacques Doniol-Valcroze, Jean-Pierre Mocky, Maria Casarès, Juliette Gréco, Julien Maffre, Pierre Bertin, Roger Blin, Marie Déa, André Carnège, Claude Borelli, Renée Cosima, René Lacourt, Henri San Juan, Victor Tabournot, Édouard Dermithe
- Genre : Drame, Fantastique, Romance, Expérimental, Noir et blanc
- Distributeur : Unzero Films, Discina
- Editeur vidéo : M6 Vidéo
- Durée : 1h35mn
- Reprise: 26 octobre 2011
- Date de sortie : 29 septembre 1950
- Festival : Festival de Venise 1950
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Résumé : Orphée est un poète reconnu. Un jour, alors qu’il est au café des poètes de sa ville, il voit arriver un jeune poète saoul, accompagné d’une femme élégante. Ce dernier provoque une bagarre générale dans le café, et lors de cette altercation générale, il se fait renverser par deux motards qui prennent la fuite. La femme (qui est la Princesse) fait transporter le jeune poète dans sa voiture et ordonne à Orphée de l’accompagner. Arrivé chez la Princesse, le jeune poète est mort. Son spectre se réveille, et reconnaît la Princesse comme étant sa propre mort. Il la suit à travers un miroir, pour passer dans l’autre monde...
Critique : Orphée marque l’apogée de la collaboration de Cocteau avec Jean Marais, qui avait été révélé dans L’éternel retour (J. Delannoy, 1943), dont le poète avait écrit le scénario et les dialogues. C’est aussi, avec La Belle et la Bête (1946), le film le plus connu des deux artistes. Orphée retranscrit le célèbre mythe dans le décor du Paris des années 50, avec ses cafés littéraires et sa jeunesse dorée de Saint-Germain-des-Près. Un parfum d’existentialisme imprègne du coup le récit, accentué par le présence de Juliette Gréco (Aglaonice) et le thème de l’au-delà qui n’est pas sans rappeler Les jeux sont faits (J. Delannoy, 1947), écrit par Sartre. Mais c’est bien l’univers symboliste de Cocteau qui est ici prépondérant, l’œuvre se voulant parabole et réflexion sur le devenir de l’artiste parmi les hommes. Les poètes naviguent ainsi entre la réalité et un autre monde. Cégeste (Edouard Dhermitte) bascule de l’autre côté du miroir dès l’ouverture, quand le poète revendicatif (Roger Blin) n’a pas encore franchi le pas. Heurtebise (François Périer) fait « la navette » entre les deux sphères au gré de ses missions célestes. Quant à Orphée (Jean Marais), il semble partagé entre les deux mondes. À son existence bourgeoise et convenue avec Eurydice (Marie Déa, rescapée des Visiteurs du soir), la tentation des amours sombres avec une belle princesse incarnant la mort (Maria Casarès) finira par être plus forte.
Cinq ans après Les dames du bois de Boulogne, l’actrice apporte à nouveau sa gravité et son magnétisme en incarnant une destinée fatale. Si l’étrangeté caractérise la plupart des personnages, on notera des figures plus conventionnelles : le commissaire de police (Pierre Bertin) incarne la logique terrestre quand le procureur de l’autre monde (Jacques Varennes) applique la même rationalité froide. Orphée est, avec Les yeux sans visage, la plus belle incursion du fantastique en France, même si l’on est ici plus près de la poésie d’un univers d’auteur que des conventions d’un cinéma de genre. On notera la beauté des trucages artisanaux et de ce que l’on ne nommait pas encore les « effets spéciaux », à l’image des séquences tournées à l’envers pour l’enfilage des gants et la levée des corps, ou du plan tourné à la verticale d’un plateau au sol, quand Orphée et Heurtebise traversent le miroir. Échec commercial à sa sortie (le grand public n’était visiblement pas préparé pour apprécier un tel film), Orphée devint rapidement un classique de ciné-club et assoira la renommée de Cocteau en tant que réalisateur majeur. Il restera pourtant sans tourner pendant dix ans et il faudra attendre Le testament d’Orphée (1960) pour apprécier le nouveau (et dernier) jalon de son œuvre de cinéma.
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