Dialogue de sourd
Le 1er juillet 2011
Un film concept en hommage à Pierre Etaix et Jacques Tati qui ne passe pas.
- Réalisateur : Pascal Rabaté
- Acteurs : Dominique Pinon, François Morel, Jacques Gamblin, Maria de Medeiros, François Damiens
- Genre : Film muet
- Date de sortie : 29 juin 2011
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– Durée : 1h29mn
Un film concept en hommage à Pierre Etaix et Jacques Tati qui ne passe pas.
L’argument : C’est enfin le week-end, un week-end de printemps sur le littoral atlantique. Ce week-end-là, deux retraités se rendent dans leur résidence secondaire, une maisonnette aussi vaste qu’un timbre poste, et croisent un couple de punks ayant pour gîte une maison dessinée sur le sable d’une plage. Plus loin, deux imposteurs vêtus d’orange et de vert se mettent au golf non loin d’une procession funéraire. Au même moment, un représentant en parapluies a rendez-vous avec une maîtresse sado-maso dans un hôtel du bord de mer où séjournent deux couples dont l’existence sera chamboulée par un cerf-volant perdu. Il est aussi question d’étudiants des beaux arts, de voitures de sport, de voitures sans permis, de voitures de golf, de voitures volées, de caravane, de toile de tente, de lecteur de code-barres, de cadre photo décoré de coquillages et de tempête nocturne. Un week-end où les destins, les classes sociales, les générations, les sentiments, les douleurs comme les joies, se croisent. Un week-end à la mer, en somme.
Notre avis : Connu pour la finesse de son humour et le charme discret de personnages passe-partout, Pascal Rabaté, cinéaste français et auteur de bande-dessiné, déçoit avec ce nouveau film en salle. Alors que l’on se délectait des aventures extraordinaires de notre Emile si extraordinaire dans (Les petits ruisseaux), ici une distance entre spectateurs et protagonistes se creuse et pire, s’installe durant ces très longues soixante-dix-sept minutes de vacances sans paroles.
Construit sur le parti-paris (contestable) d’un scénario sans dialogues, le film, ponctué d’onomatopées, de grognements, et de soupirs, ressemble à l’arrivée à un véritable dialogue de sourd. Pourtant une certaine poésie se dégage de l’histoire et comme toujours chez le cinéaste, de ces décors minimalistes si singuliers. Entre la cabane pièce unique ou les meubles de la maison se range sous le parquet, la tente dénudée de la famille boy-scout dressée à la baguette, et la très flâneuse voiture sans permis devenue la marque de fabrique du cinéaste. Une bonne ambiance de départ qui donne certaines fois lieu à d’amusantes situations et à des rencontres comiques. La scène du supermarché en liquidation totale et aux étagères dépouillées en est un bel exemple.
Scène d’introduction pour trois personnages (le couple de nomades punks et la jeune fille rentrée au pays pour enterrer son père), l’absurdité du lieu et du système (le caissier traçant à la main les codes barres de produits comptés sur les doigts de la main) fait rire et questionne sur le réel problème de désertification des campagnes. Au fond c’est là toute l’histoire du film Ni à vendre ni à louer : celle d’une résistance. Résistance face à la dérive de ce petit village côtier abandonné des touristes pour de plus exotiques destinations, résistance face à la dérive capitaliste marchande qui pousse à aller toujours plus vite et toujours plus loin, et résistance à l’uniformisation de modes de vies prêts-à-l’emploi. Ici rien ne se vend, rien ne se loue, rien ne s’achète et les vacances se vivent dans l’air du temps. Sur une botte de foin à la poursuite d’un cerf-volant, dessinant de jeunes filles nues sur les berges, buvant leurs cafés sur une table en plastique, nos héros d’un jour se contentent de peu, et peut-être même de l’essentiel. Une fraicheur qui sauve tout le reste dans ce film qui tourne en rond sur les plages de l’Atlantique. L’on en arrive même à s’ennuyer à la mer, un comble.....
De bonnes idées, comme cette planification au sol des emplacements de tentes et des maisons imaginaires (très jolie scène du couple punk qui se dessine un toit sur le sable), le retournement de caravanes après la tempête qui met sans dessus dessous la vie de famille des vacanciers (les filles à papa se sont envoyées en l’air), et d’autres de plus mauvais goûts (le périple du sadomasochiste que l’on voit se débattre de son lit en fer forgé pendant plus d’une heure et demie...).
Au final trop de mutisme pour un film qui aurait gagner en profondeur si on lui avait offert des dialogues. Une originalité qui coûte cher et qui ne se s’acquitte pas par le jeu d’acteurs trop homogène et peu expressif. Cette belle image de la vie, des vacances, des amours, et du temps qui passe, est gâchée par l’hermétisme d’une histoire silencieuse et vagabondante. On reste sur sa faim.
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