Le 5 décembre 2014
- Plus d'informations : http://midiminuitfantastique.com/
Sortie en librairie : février 2013
Avant l’Ecran Fantastique et Mad Movies, les amateurs de cinéma de genre avaient Midi Minuit, revue culte, compilée dans un magnifique ouvrage anthologique aux éditions Rouge Profond, sous la direction de Michel Caen et Nicolas Stanzick.
Dix ans de vie, 24 numéros... Midi Minuit Fantastique est une revue spécialisée dans le cinéma de genre gothique, née en 1962, à une époque où l’on répondait souvent, chez les critiques du moins, par le mépris au fantastique, pourtant déjà adulé par un public fidèle. Avec l’avènement de la Hammer, le macabre a désormais son antre et des noms comme Topor, Yves Boisset, Tavernier, Jean Rollin, Ionesco viennent partager leur culture d’une plume experte sur cette revue qui est une première européenne. Le nom s’inspire d’une salle permanente spécialisée sur les Grands Boulevards, ouverte de... midi à minuit, de 1939 à 1985.
Le premier numéro déploie un magnifique hommage à Terence Fisher, réalisateur de la Hammer par essence, avec en couverture, un loup-garou old-school qui terrifia en son temps les jeunes spectateurs, au moins de par ses images fortes, incarnées par Oliver Reed dans le mythique et tragique La Nuit du Loup garou. La déclaration d’amour à la cinématographie gothique fantastique d’outre-Manche est totale : de nombreux textes, des photos en noir et blanc, généreuses, débridées avec poitrines plantureuses pour célébrer les années 60 et sa révolution culturelle pop, même des reproductions géniales, et en couleur d’affiches de l’époque... Ce sont les "Swinging sixties" de l’épouvante, où l’on place Dreyer derrière Fisher, où les fantasmes d’érotisme et de sadisme deviennent l’objet d’une analyse dans l’oeuvre du réalisateur du Cauchemar de Dracula, sous la plume de Michel Caen. Où le sang et le château fantastique deviennent sources d’inspiration pour de beaux chapitres insolites. Alors qu’IMDB et ses filmographies n’était même pas envisageables, la revue, en dehors de ses posters sublimes reproduits aux côtés des photos d’exploitation qui habillaient les entrées de cinéma, se composait aussi de filmographie insensées, d’artistes spécialisés, qu’on ne pouvait évoquer ailleurs...
L’anthologie, magnifique témoignage de l’empreinte mélancolique du temps sur le cinéma qui bâtit des sensibilités riches et variées, se poursuit avec un deuxième numéro en forme d’hommage total, et donc pionnier dans son genre, aux femmes dans le cinéma d’épouvante, goules, vampires et vamps, robots ou félines... Elles sont déclinées telles des matérialisations oniriques, avec des textes érudits de Boullet et Jean-Claude Romer, très littéraires, dont on sent l’influence de la pensée surréaliste, qui ponctue d’ailleurs les illustrations avec des dessins ou des toiles de Félix Labisse. La jubilation est partagée. Sorcières sublimes du panthéon américain ou britannique, elles dévoilent leur mystères de façon impudiques (pour l’époque) sur les pages d’un numéro mythique qui reste dans les esprits des lecteurs.
Le troisième numéro, publié en novembre 1962, ose consacrer ses pages à l’exotique King Kong, singe lubrique qui viole l’innocence de la femme blanche sur la couverture franchement audacieuse, lui arrachant sa robe par le haut... La revue est accompagnée d’une préface-citation de l’auteur de Gulliver, Jonathan Swift ; il sera donc question de voyages lointains, sur les rivages d’un cinéma qui défie l’espace et le temps pour téléporter ses lecteurs dans l’ailleurs salvateur. Swift est-il l’auteur de King Kong, se demande Jean Boullet ? Ou est-ce Conan Doyle avec son Monde Perdu ? Quand nous nous demandons, s’il n’est pas le Steven Spielberg de son temps, la satire en plus pour donner du sens à ses voyages marins. Les traces de la littérature sont imperturbables dans cette cinéphilie érudite. Midi Minuit Fantastique aime convoquer les arts, brasser les talents. Tous les arts, tous les talents. Les frissons des effets spéciaux d’antan, animation en volume immortalisée par l’œil du photographe qui s’arrête sur l’image, sont constants au gré des photographies riches, alors que Elliot Stein s’interroge sur King Kong, film social ?. Bonne question, passons à l’analyse, puis à la critique, à la genèse du mythe et à un panorama d’affiches fascinantes et de produits marketing... Ce numéro sur King Kong ne serait-il pas l’un des meilleurs ouvrages jamais écrits sur ce poids lourd du cinéma ?
Avant de prolonger la séquence de magazines, s’intercale L’entracte du Midi-Minuit, souvenirs de strip-teases donnés par des jeunes femmes durant l’entracte, l’occasion de déshabiller généreusement l’actrice Marie Devereux, en photo. Un article de Michel Caen et Francis Lacassin, publié dans Les Cahiers du Cinéma en 1965, donne la parole à Fellini, sorti de plateau à Rome, où il évoque les polars, films de gangster et fumetti. Toujours étrange que de lire le réalisateur de La Dolce Vita en train d’évoque le héros de BD Dick Tracy. Rare, classe et d’une pertinence absolue. Puis, l’on trouve quelques pages sur Edith Scob, vedette des Yeux sans visage et récemment d’Holy Motors. L’actrice est sollicitée pour sa participation à un projet audacieux dont on ne sait rien... Fantasmagorie, moyen métrage de 37mn de Patrice Molinard, source d’interrogation et encore une fois de fantasmes pour l’auteur Nicolas Stanzick.
Au bout de 440 pages (la compilation est énorme, de son format, et de son poids), démarre le numéro double, 4 et 5, de janvier 1963, qui aurait pu faire l’objet de la première publication, tant le nom est fort en évocation : l’immortel Dracula va hanter ce numéro où l’on trouve même une lettre du géant Christopher Lee. Photos, documentations diverses, analyses... Bram Stoker est une légende, à l’image de son mythe, et ce numéro ne nous manque de nous le rappeler. Près de 90 pages plus loin, ou 5 mois, dans le temps, en juin 1963, c’est déjà le 5e Midi Minuit Fantastique, qui vient pointer. Il s’intéresse de façon exhaustive à La Chasse du Comte Zaroff.
Ce premier volume sera très prochainement suivi de 2 autres ouvrages pour compléter l’intégralité de cette revue de référence. Un achat nécessaire pour tout amateur d’épouvante, en particulier à l’heure du 2.0, où le fantastique a quelque peu perdu de sa fraîcheur surannée d’antan.
Un DVD spécial Midi-Minuiste, est proposé pour rendre l’ensemble immanquable et d’autant plus collector. Il est composé d’émissions étranges, et même de deux films dans le ton de l’époque, Le puits et le pendule et une version surréaliste de La Vénus à la Fourrure, Barbara et ses fourrures, court métrage mettant en scène la magnétique Barbara Steele.
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