Lola - Brillante Mendoza - critique

Critique : Admiré pour le néoréaliste John John, Brillante Mendoza avait suscité la controverse avec Serbis et Kinatay, réussites majeures pour les uns, poudres aux yeux exotiques et criardes pour les autres. Lola devrait susciter le consensus par sa cohérence et sa beauté discrète, tout en étant la synthèse des trois derniers opus. Les deux grand-mères courage ne sont pas si éloignées de la nourrice de John John et la discrète émotion qui se dégage du minimalisme narratif apparente Mendoza à un Rossellini ou un Satyajit Ray. Par contre, l’unité de temps et la lente suivie, caméra à l’épaule, des protagonistes, sont dans la logique de Serbis et Kinatay, auxquels fait songer également le travail en son direct dans les rues de Manille (mais sans les assourdissants concerts de klaxon).
Plus qu’un pamphlet social sur les aberrations judiciaires et l’exploitation de la pauvreté, Lola s’avère être l’évocation d’un univers à la lisière du monde réel, par des scènes étrangement fantomatiques, à commencer par celles dévoilant une fausse cité lacustre, quartier inondé dans lequel une barque transporte un beau cercueil blanc. L’eau est d’ailleurs omniprésente, et la saison des pluies offre à Mendoza une opportunité qui ne relève pas seulement de la coquetterie de style. Film urbain, sensoriel et contemplatif, Lola est une œuvre majeure du cinéma philippin.

Notes : S’il n’y a qu’un nom à retenir dans le cinéma philippin contemporain, c’est sans doute celui de Brillante Mendoza. Esthète génial du social pour les uns, archiprêtre du vide pour les autres, le cinéaste nous avait livré dans ses derniers films, Serbis et Kinatay, une tranche d’un univers sombre et violent, traversé par le fantasme, la violence et la mort. Avec Lola et l’histoire de ces deux grand-mères prises dans les tourmentes de la vie, le réalisateur semble revenir dans une note plus sociale, mais toujours en prise avec le vécu des petites gens. Deuxième service ?