Au nom du père
Le 11 décembre 2020
Un prix du jury bien mérité pour le drame carcéral du britannique David MacKenzie au dernier festival international du film policier de Beaune. Porté par un Jack O’Connell habité par son rôle, le film en impose.
- Réalisateur : David Mackenzie
- Acteurs : Jack O’Connell, Rupert Friend, Ben Mendelsohn, Peter Ferdinando, Sam Spruell, David Ajala, Sian Breckin, David Avery, Matt Faris, Anthony Welsh, Shane McCaffrey, Ryan McKenna
- Genre : Drame
- Nationalité : Britannique
- Distributeur : Wild Side Films
- Durée : Starred Up
- Date télé : 11 décembre 2020 20:40
- Chaîne : OCS Choc
- Titre original : 1h40mn
- Date de sortie : 4 juin 2014
- Festival : Festival du film Policier de Beaune
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Résumé : Jeune délinquant particulièrement violent, Éric passe de façon prématurée de l’environnement carcéral pour adolescents à celui, beaucoup plus sinistre, de la prison pour adultes. Alors qu’il lutte pour s’affirmer face aux surveillants et aux autres détenus, il doit également se mesurer à son propre père, Nev, qui a passé la majeure partie de sa vie derrière les barreaux. Éric et d’autres prisonniers apprennent à canaliser la rage qui est la leur, tout en découvrant les nouvelles règles de la survie en prison. Certaines forces y sont à l’oeuvre et, constamment, menacent de le détruire…
Critique : Depuis 2002, le cinéaste britannique David MacKenzie alterne drames (Young Adam, My Name is Hallam Foe, Perfect Sense) et comédies à tendance romantique (Toy Boy, Rock’n’love) avec plus ou moins de succès. Avec Les poings contre les murs, son nouveau film, il revient au drame, à la fois familial et social, dans l’univers carcéral balisé. Pour apporter un nouveau souffle au film de prison, genre très codifié pouvant très vite se laisser aller à la vulgaire photocopie des classiques (La grande évasion, Midnight Express, L’évadé d’Alcatraz, Les évadés, Un prophète pour citer quelques-uns des plus marquants), on est en droit d’attendre une vision différente et des personnages au développement plus inattendu. On se lasserait rapidement de banals rapports de forces entre détenus au sein de l’enceinte sécurisée si l’on ne trouvait pas un peu plus de matière autour. En ce sens, MacKenzie remplit parfaitement son contrat en parvenant à traiter le sujet avec originalité. Son petit plus ? Aborder les relations (épineuses) entre un père et son fils détenus dans les mêmes geôles.
Eric (Jack O’connell), jeune délinquant de dix-neuf ans, au caractère bien trempé et au très fort degré de violence, retrouve son paternel Nev (Ben Mendelsohn) condamné à purger une peine de prison à perpétuité. Père et fils se connaissent à peine puisque Nev est en cabane depuis le plus jeune âge de sa progéniture. Eric, sans point de repère, a fini par mal tourner, au point de s’être fait incarcérer pour meurtre. L’arrivée de ce "surclassé" dans ce monde d’adultes connu pour sa dureté (un traitement réservé aux jeunes individus les plus violents) va commencer comme un exutoire et un moyen de ne pas passer pour un faible en usant des provocations (le passage à tabac d’un voisin de cellule suivi par une confrontation musclée et "bien huilée" avec les gardiens).
Comme pour beaucoup de films carcéraux des années 2000 (Felon, Un prophète et le récent R), MacKenzie choisit une approche tournée vers le réalisme du milieu où la violence est omniprésente. Faire ses preuves par la force et trouver une bande est ici primordial pour ne pas finir dérouillé en permanence, jouer les larbins ou encore servir d’objet sexuel. Avec un père connaissant les moindres recoins du pénitencier qui s’est acoquiné au grand caïd des lieux, cela paraît forcement plus simple de s’acclimater. Mais Eric ne cherche pas un traitement de faveur, et veut se faire tout seul : c’est aussi pour lui une façon de s’opposer à son père, coupable de l’avoir délaissé.
Le relationnel père/fils est particulièrement bien traité et il s’agit surement de la plus grande réussite du film. Une dualité s’en dégage mais au fond les liens du sang et l’amour paternel reprennent le dessus, ce qui donne lieu à des séquences parfois touchantes, comme lorsque Eric et Nev se retrouvent placés en quartier d’isolement, ou bien lors de la dernière scène du transfert. Le film n’échappe cependant pas à certains clichés (mais lorsqu’on choisit de jouer la carte du réalisme, peut on vraiment y échapper ?) : directeur ordurier, règlement de comptes et jalousies entre détenus, matons qui ferment les yeux sur certaines pratiques, agressions dans les douches, gros caïd toujours actif en détention. Il a en revanche la bonne idée de s’étaler sur un terrain à caractère social, celui de la réinsertion après peine. Eric est invité à rejoindre le groupe de parole de gestion de la violence d’un psychologue (Rupert Friend) afin de l’aider à se canaliser. Le psy va jouer un rôle de médiateur pour le jeune homme, l’aider à exprimer ce qu’il cache au fond de lui et le libérer de ses excès de colère. Le travail n’a rien de facile comme on pourra le constater mais s’avère néanmoins précieux, donnant même lieu à des dialogues parfois cocasses entre les participants. Enfin nous n’oublierons pas de saluer la prestation d’un David O’Connell au jeu très inspiré, complètement habité par son rôle : c’est une véritable révélation, tant sa prestation est intense.
Abreuvé d’amour et de haine, le film de David MacKenzie laisse éclater ses instincts bestiaux pour mieux s’adoucir. Cette recherche de rédemption paternelle en milieu carcéral en impose.
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