Les amours clandestins
Le 26 novembre 2013
Pour leur premier long-métrage, Anne Weil et Philippe Kotlarski signent avec Les Interdits un film historique hybride qui accumule avec intelligence les points de vue.
- Réalisateurs : Anne Weil - Philippe Kotlarski
- Acteurs : Stéphanie Sokolinski, Vladimir Friedman , Jérémie Lippmann
- Genre : Drame
- Nationalité : Français, Canadien, Allemand, Russe
- Durée : 1h40mn
- Date de sortie : 27 novembre 2013
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Pour leur premier long-métrage, Anne Weil et Philippe Kotlarski signent avec Les Interdits un film historique hybride qui accumule avec intelligence les points de vue.
L’argument : 1979. Carole et Jérôme ont 20 ans et partent en voyage organisé à Odessa, derrière le rideau de fer. Ils sont cousins et se prétendent fiancés. Le jour, simples touristes, ils visitent monuments et musées. Le soir, ils faussent compagnie au groupe et rencontrent clandestinement des refuzniks, Juifs harcelés par le régime soviétique pour avoir voulu quitter le pays. Ils découvrent un monde inconnu, brutal et absurde. Si Carole est animée par l’engagement et le goût du risque, pour Jérôme, la vraie motivation de ce voyage, c’est Carole.
Notre avis : Premier long-métrage de ses deux réalisateurs, à savoir Anne Weil et Philippe Kotlarski, Les Interdits ambitionne l’impossible : retracer, à travers l’interdit d’une histoire amoureuse incestueuse, la dramatique situation des juifs sous le régime soviétique. Nous sommes en 1979, Carole et Jérôme, jeunes cousins étudiants en sciences politiques, se rendent à Odessa en qualité de touristes. Mais le motif de leur voyage est tout autre : guidés par leur idéal de liberté, les jeunes français sont venus rencontrer clandestinement des refuzniks, juifs coincés dans leur pays par les autorités, dans l’objectif de les tirer de cette accablante et paradoxale situation de prisonniers de leurs propres terres.
Derrière ses palpables aspects romanesques, Les Interdits trouve son origine dans l’histoire personnelle d’Anne Weil qui, dans sa jeunesse, a elle-même expérimenté ce voyage risqué, clandestin, et, d’une certaine manière, militant – bien qu’elle se défende du terme. La fiction s’impose naturellement au film dans le caractère omniscient de ce dernier, qui présente avec autant d’intérêts les motivations personnelles, et presque opposées, de ses deux protagonistes principaux. L’optimisme de Carole se retrouve en effet confronté à la froideur de Jérôme, dont la présence ne se justifie que par le souhait de partager cette incroyable expérience avec sa cousine pour laquelle il éprouve des sentiments. Cet équilibre scénaristique qui oppose deux visions différentes d’un événement qui pourtant les relie, offre au film une profondeur sentimentale qui se retrouve propulsée par l’acte sexuel que s’offrent, de manière très naturelle, les deux cousins. De cet interdit par excellence naissent des questionnements très complexes sur le communautarisme ou encore l’affirmation de soi par la foi ; questionnements auxquels le film ne répond pas car là ne repose pas son ambition. Et heureusement.
A la manière de nombreux films du genre qui suivent un schéma narratif similaire – propulser les petites histoires individuelles dans la grande –, Les Interdits pèche dans sa manière de lier avec cohérence ses nombreux cheminements. Son attrait nettement trop assumé pour un sensationnalisme presque artificiel – était-il vraiment nécessaire d’imposer aux protagonistes tous ces maux, notamment dans la dernière partie qui se déroule dix ans plus tard ? – provoque un inéluctable détachement du spectateur vis-a-vis des dramaturgies qui lui sont déversées sans aucune retenue, et avec un symbolisme certes souvent naïf, mais qui pourtant apporte une surprenante touche d’émotion.
L’intérêt d’un film si sérieux, qui ambitionne de canaliser avec pragmatisme une multitude d’enjeux si importants, qui vont du devoir de mémoire, à la question de l’assimilation, en passant évidemment par la problématique de l’inceste ou encore du rôle prépondérant du voyage initiatique dans l’affirmation de l’individu, repose finalement dans sa manière d’ériger en héros ordinaires ces enfants de la liberté dont les idéaux nous paraissent, aujourd’hui, véritablement salutaires et utopistes. Dans le bon sens du terme.
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