La recette du dorayaki
Le 29 avril 2024
Ce bijou d’émotion et de poésie est peut-être le film le plus accessible de Naomi Kawase. Il a fait l’ouverture de la section Un Certain Regard de Cannes 2015.
- Réalisateur : Naomi Kawase
- Acteurs : Masatoshi Nagase, Miki Mizuno, Kirin Kiki, Kyara Uchida
- Genre : Comédie dramatique
- Nationalité : Japonais
- Distributeur : Haut et Court
- Durée : 1h53mn
- Date télé : 31 décembre 2016 20:50
- Chaîne : Canal + Cinéma
- Date de sortie : 27 janvier 2016
- Festival : Festival de Cannes 2015
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Résumé : Sentaro est le gérant d’un stand de restauration rapide. Un jour, il se voit proposer les services d’une vieille femme...
Critique : Après le splendide Still the Water, Naomi Kawase a fait son retour à Cannes avec les honneurs de l’ouverture de la section Un Certain Regard. Adapté d’un roman de Durian Sukegawa, AN est un très joli conte qui marque à la fois une continuité et une rupture dans son œuvre, puisque ses thèmes de prédilection (dont la communion entre l’homme et la nature) et son style contemplatif sont ici mêlés à une touche d’émotion qui devrait élargir son public. On est même surpris par la limpidité et la linéarité du scénario chez une artiste qui avait parfois joué la carte de l’ésotérisme dans des œuvres de la dimension de Shara ou Hanezu. Le récit relate avec finesse les relations entre trois personnages plus ou moins meurtris par l’existence. Sentaro est un homme divorcé qui vit de la vente de doyarakis : ce sont des pâtisseries traditionnelles japonaises composées de deux pancakes fourrés de pâte de haricots rouges, « AN ».
- Copyright Neue Visionen Filmverleih
Un secret lié à son passé semble le tourmenter. Wakana est une lycéenne sensible et curieuse, qui rêve d’horizons lointains. Tokue est au crépuscule de sa vie. Elle propose à Sentaro de l’aider dans la préparation des doroyakis, dont elle connaît la recette avec précision. La petite échoppe devient vite un endroit incontournable... Le début du récit, traité parfois sur un mode à la fois léger et mélancolique, pourrait laisser croire que Kawase perd son âme en s’accrochant à l’archétype d’un certain « film de festival ». Ce sentiment est renforcé lorsque les gros plans sur la pâte qui cuit ou les haricots que l’on déverse font songer à un cinéma de l’art culinaire, celui qui a concocté des films touchants mais fortement consensuels, du Festin de Babette à The Lunchbox. On se dit que Naomi Kawase veut enfin son gros succès populaire, elle dont l’audience n’a pas dépassé celle d’un cinéma d’auteur confidentiel.
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Et l’on a tort, car AN est en fin de compte intransigeant dans ses exigences esthétiques, ce qui est particulièrement marquant dans la seconde partie de la narration. Une subtile réflexion sur la maladie, la mort et la culpabilité imprègne alors un film en perpétuel état de grâce, et dont la beauté culmine avec des prises de vue effectuées dans la forêt d’un sanatorium, près de Tokyo. Kawase suggère par ailleurs une surprenante mise en abyme, l’approche documentaire faisant presque irruption dans le dernier tiers du film. La réussite de AN doit également beaucoup à ses interprètes. Kirin Kiki, qui incarne aussi la grand-tante dans Notre petite sœur, dégage ne poignante sensibilité. Face à elle, Masatoshi Nagase, qui fut le jeune voyageur de Mystery Train, est davantage en intériorité, et fait ressentir avec nuances les failles de son personnage.
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