Le 18 août 2015
Un documentaire personnel et modeste qui se transforme en quête d’identité et de vérité universelle.
- Réalisateur : Arnaud Khayadjanian
- Genre : Documentaire
- Nationalité : Français
- Durée : 1h
- Date de sortie : 16 septembre 2015
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Un documentaire personnel et modeste qui se transforme en quête d’identité et de vérité universelle.
L’argument : Arnaud Khayadjanian entame un périple en Turquie, sur la terre de ses ancêtres, rescapés du génocide arménien. À partir d’un tableau, de ses rencontres et de témoignages familiaux, il explore la situation méconnue des Justes, ces anonymes qui ont sauvé des vies en 1915.
Notre avis : Une montagne rocailleuse traversée par un sentier, une silhouette qui marche ; ainsi s’ouvre le film, et l’on pense immédiatement à une image de Kiarostami. L’ombre du maître iranien accompagne encore la suite, avec ces dispositifs simples, répétés et presque inaltérables ; dans son parcours à la recherche de traces de ses arrière-grands-parents arméniens, Arnaud Khayadjanian mêle deux types de plans, la plupart du temps fixes : les discussions avec des Turcs et les paysages arides qu’il arpente, avec, parfois, en voix off, les paroles de sa famille. Deux exceptions notables : la rencontre avec un jeune auteur à Istanbul, que l’on suit caméra au poing à la recherche d’une tombe disparue, et le travelling final, depuis une voiture, qui clôt le film et le voyage en un adieu mélancolique.
© Adalios
Dans son périple, le réalisateur rencontre de nombreux villageois, qui l’accueillent et discutent avec lui autour d’un thé. Leurs réactions sont passionnantes : les « je ne sais pas », les silences, la vérité officielle de massacres partagés, en disent long sur la gêne et les non-dits qui entourent le génocide arménien. Et même le jeune auteur doit arrêter l’enregistrement quand ce mot tabou, génocide, est prononcé : on apprend qu’il doit être précédé de « soi-disant » et mis entre guillemets sous peine de sanctions. Tout aussi intéressants, les discours esthétisants à propos du tableau que Khayadjanian trimbale ou l’accent mis sur les Justes permettent d’élider le sujet, de ne l’évoquer que de biais. Il n’est nul besoin de commentaires : on sent à quel point la vérité officielle imprègne les paroles, mais aussi qu’elle passe mal, que le refoulé affleure sans cesse, cent ans après. La visite de l’église en ruines est une matérialisation émouvante de ce passé qu’on cherche à enfouir et qui, modestement, résiste.
© Adalios
À ce refoulé d’état correspondent des secrets de famille : nul ne sait plus comment les arrière-grands-parents du réalisateur se sont retrouvés ; les légendes familiales (y a-t-il eu assassinat ?) reposent sur un sentiment de jalousie et le besoin têtu de combler les vides. C’est la force du film de partir d’un questionnement très personnel, du cinéma à la première personne, pour résonner dans les histoires de chacun, tout en élevant un tombeau, modeste mais bien réel, à ses aïeux et, partant, aux Arméniens disparus. Évoquer le particulier pour atteindre le général, sans grands discours ni pathos, voilà un axe efficace qui, à l’image d’une litote, nous atteint d’autant plus.
Le titre du film, Les Chemins arides, est à double sens : les sentiers sont autant réels que symboliques, la quête d’identité s’avérant au moins aussi difficile que le parcours à pied. La beauté austère des paysages évoque pareillement celle des dispositifs, en un écho émouvant qui trouve son point d’orgue avec la belle scène de la falaise et son vertige face au vide et face à la vérité. On le voit, en une petite heure et avec des moyens tout simples, Arnaud Khayadjanian interroge une histoire enfouie, celle d’une famille et celle d’un peuple, sur un ton modeste qui prend une force poignante.
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