Rêve américain
Le 9 septembre 2015
Le rythme de l’action est inégal, mais la justesse de ton et la bienveillance avec laquelle la cinéaste saisit la vie de ses personnages font de cette chronique social un joli petit moment de cinéma.
- Réalisateur : Chloé Zhao
- Acteurs : Eleonore Hendricks, John Reddy, Taysha Fuller
- Genre : Drame
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Diaphana Distribution
- Durée : 1h34mn
- Titre original : Songs My Brothers Taught Me
- Date de sortie : 9 septembre 2015
- Festival : Festival de Cannes 2015
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Résumé : Johnny vient de terminer ses études. Lui et sa petite amie s’apprêtent à quitter la réserve indienne de Pine Ridge pour chercher du travail à Los Angeles. La disparition soudaine du père de Johnny vient bousculer ses projets. Il hésite également à laisser derrière lui Jashaun, sa petite sœur de treize ans dont il est particulièrement proche. C’est tout simplement son avenir que Johnny doit maintenant reconsidérer…
Critique : Le moins que l’on puisse dire, c’est que la jeune réalisatrice chinoise Chloé Zhao a fait une entrée remarquée dans le milieu du cinéma. Les Chansons que mes frères m’ont apprises, premier long-métrage très singulier, a en effet été bien accueilli à la Quinzaine des Réalisateurs du Festival de Cannes (où il concourait pour la Caméra d’Or). Inscrite dans la grande tradition des films contemplatifs et sociaux, cette première œuvre dresse un portrait humaniste et existentialiste de la réserve indienne de Pine Ridge, où la dureté de la vie compose magnifiquement avec les grandes plaines du Dakota-Sud.
La petite vingtaine, Johnny, jeune autochtone de la tribu des Lakotas, veut quitter sa terre natale avec sa petite amie, partir à Los Angeles, trouver du travail et s’en sortir. D’un point de vue citadin et occidental, ce genre d’attitude peut apparaître comme tout à fait logique et naturel. Mais quelle décision prendre lorsque le patriarche de la famille rend son dernier souffle ? Faut-il partir ou rester pour soutenir ses autres parents ? Si le film n’apporte pas de réponse claire et tranchée, il illustre très concrètement la désormais célèbre formule « L’existence précède l’essence » écrite et développée par Sartre dans son ouvrage L’Existentialisme est un humanisme.
Aucune définition – philosophique ou cinématographique – ne saurait être suffisamment large et précise pour définir l’Homme, et ce n’est pas le film de Chloé Zhao qui nous dira le contraire. En effet, tout au long du récit, Johnny fait l’expérience de son libre arbitre, sans n’en trouver aucune limite. Partir ou rester, le challenge reste entier. Ainsi déchiré entre ces deux partis, le jeune homme entre violemment dans le monde réel : celui des adultes.
Au milieu des squats et des petits trafics en tout genre, auxquels son frère s’adonne à contrecœur pour se faire un peu d’argent, Jashaun, la petite sœur de Johnny, doit elle aussi faire connaissance avec la réalité et la dureté de l’existence. La mort soudaine de son père et le départ incertain de son grand frère la plongent brusquement dans un bain glacé de désillusion. Mais elle y fait face, avec force et pudeur ; et l’histoire prend alors une tournure plus féministe, mais aussi plus violente, car finalement, Johnny et Jashaun se posent en fait les mêmes questions, malgré leur différence d’âge : quelles décisions prendre ? Que faire de nos vies ? Interrogations que nous avons tous, mais dont les réponses ne sont jamais très évidentes.
On l’aura donc compris, Les chansons que mes frères m’ont apprises n’est pas un film facile. Si la photographie soignée de Joshua James Richards sublime les magnifiques plans larges des paysages désertiques d’une Amérique marginale, l’intrigue, dans son ensemble, pourra paraître un peu molle et soporifique à un public non averti.
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