Les aventures de Philip et Francis, tome 3, S.O.S. Météo, la critique BD.

Le brave professeur Mortimer se transforme en génie du mal dans le meilleur opus de la parodie-hommage de Pierre Veys et Nicolas Barral.

L’histoire : un début de soirée orageux sur Londres, la pluie tombe à seaux, l’atmosphère est électrique quand la sonnette de la porte d’entrée retentit au domicile de l’honorable professeur Philip Mortimer...c’est le capitaine Francis Blake qui, suite à une dispute avec sa mère, vient s’installer avec armes et bagages chez son ami, et y prend tout de suite ses aises.

Tout le monde le sait et en profite, Mortimer est bien trop gentil, pour ne pas dire mou, pour s’imposer, même chez lui. Ce constat rend le professeur fou de rage, autant que faire se peut, bien sur : il décide donc de concocter une potion qui modifiera complétement cet aspect de sa personnalité...

Notre avis : les personnages de Philip et Francis sont très librement inspirés de Philip Mortimer et Francis Blake, les inoubliables héros créés par le génial Edgar P. Jacobs, à qui cet album est respectueusement dédié. Dès la dédicace, le ton est donné : l’oeuvre originelle, monument incontesté de la BD, est respecté, mais dans cet album, les auteurs vont s’employer à joyeusement déboulonner le mythe. Mortimer est ici un scientifique ventripotent timide, mis au régime par son domestique, le flegmatique et inflexible Nasir, Blake est un militaire bas de plafond, infantile et vaguement obsédé sexuel, et Olrik, "génie du mal" autoproclamé, est un loser pompeux, grand guignolesque, capricieux et pleurnichard que même ses hommes de main prennent en pitié. Tout le monde est là, les codes sont respectés, y compris les interminables récitatifs, la plupart du temps ironiquement en décalage avec l’action, mais tout est bouleversé.

Il faut, pour le croire, voir l’intrépide professeur se faire remonter les bretelles par un buraliste acariâtre.... ça vaut son pesant de tabac à pipe. Mais la Grande Foire aux Références ne s’arrête pas là, loin s’en faut : citons, pêle-mêle, Orange Mécanique de Kubrick, ou Dr Jekyll et Mister Hyde, de Stevenson, inspiration principale de la métamorphose qui fait de Mortimer un jouisseur mégalomane et machiavélique, porté sur les filles et la bouteille....... mais il ne serait pas charitable de gâcher votre plaisir en dévoilant trop de cet album réjouissant et corrosif, que l’on a envie de relire dès la dernière page atteinte. Coup de cœur du mois !!!