Remake again à Hollywood
Le 4 novembre 2020
S’il ne fera pas oublier ses illustres prédécesseurs, Les 7 mercenaires, décliné à la sauce 2016, possède suffisamment d’atouts pour convaincre les amateurs d’authenticité cinématographique.
- Réalisateur : Antoine Fuqua
- Acteurs : Denzel Washington, Ethan Hawke, Peter Sarsgaard, Vincent D’Onofrio, Lee Byung-hun , Haley Bennett, Chris Pratt
- Genre : Aventures, Action, Western, Remake
- Nationalité : Américain
- Distributeur : Sony Pictures Releasing France
- Durée : 2h13mn
- Date télé : 1er septembre 2023 21:10
- Chaîne : France 3
- Titre original : The Magnificent Seven
- Date de sortie : 28 septembre 2016
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Résumé : L’industriel Bartholomew Bogue règne en maître sur la petite ville de Rose Creek. Pour mettre fin au despotisme de l’homme d’affaires, les habitants, désespérés, engagent sept hors-la-loi, chasseurs de primes, joueurs et tueurs à gages – Sam Chisolm, Josh Farraday, Goodnight Robicheaux, Jack Horne, Billy Rocks, Vasquez, et Red Harvest. Alors qu’ils se préparent pour ce qui s’annonce comme une confrontation sans pitié, ces sept mercenaires prennent conscience qu’ils se battent pour bien autre chose que l’argent…
Critique : S’il serait exagéré de dire que le genre est de nouveau en odeur de sainteté, le western semble néanmoins dans une certaine forme ces dernières années. Si tous les films ne peuvent prétendre au succès commercial et critique d’un Django Unchained, des productions variées comme Lone Ranger (blockbuster Disney), Jane Got a Gun (crépuscule féministe garanti), The Ridiculous 6 (parodie Netflix avec Adam Sandler) et le très recommandable Bone Tomahawk (l’épouvante chargé d’un Grand Prix à Gérardmer) perpétue avec diversité l’amour de l’Ouest rocailleux. Plus récemment, c’était The Hateful Eight, deuxième incursion authentique de Tarantino dans le genre, qui aura marqué les esprits, et notamment Sony aux vues de l’affiche de cette nouvelle mouture des 7 mercenaires qui ressemble étonnemment à celle des Huit salopards.
La comparaison s’arrête néanmoins là, car au brillant huis clos réfrigérant de Tarantino, assez proche du film de genre horrifique, le réalisateur Antoine Fuqua préfère ancrer son œuvre dans un classicisme scrupuleux, au sens noble du terme.
Les 7 mercenaires est donc le remake, oui encore un, après l’épouvantable Ben Hur, chez Paramount, d’un classique du début des années 1960, qui était, de façon ironique lui-même une relecture à l’occidentale du légendaire Les 7 samouraïs d’un certain Kurosawa. L’idée peut susciter la crainte d’une arnaque opportuniste, mais l’on succombe aisément au charme de cette entreprise savamment burnée.
Si l’intrigue est forcément connue, c’est donc le traitement calibré pour les esprits contemporains, notamment le rythme, qui affirme la différence. En cela l’œuvre réussit plutôt bien son pari, accélérant la trame, sans prendre de risque majeur, puisque s’accordant élégamment les moyens de son ambition.
- Copyright Sony Pictures
La scène d’introduction pose un décor familier pour ceux qui vouent un culte aux films de John Sturges et Akira Kurosawa. Tout comme ses deux prédécesseurs, le long-métrage s’ouvre sur la présentation d’une bourgarde dont la tranquillité se voit troubler par l’arrivée de ses futurs oppresseurs. Du calme surgit la tempête, une tension qui monte crescendo jusqu’à l’explosion de la poudre fumante.
À la suite de la fusillade initiale, Emma Cullen - interprétée par Haley Benett que le cinéaste a déjà dirigée dans Equalizer - décide de partir à la recherche d’une aide qui prendra la forme virile de sept hommes aux spécialités et personnalités bien trempées.
On retrouve ainsi Denzel Washington (lui aussi au casting d’Equalizer) dans les fringues d’un chasseur de primes impitoyable, mais non dénué d’une certaine noblesse ; Chris Pratt, toujours très bankable, dans son habituel rôle de bad boy dragueur et blagueur ; Ethan Hawke en vétéran traumatisé et un lanceur de couteau joué par Lee Byun-Hung (Coréen que l’on a adoré dans A Bittersweet Life et surtout le définitif et essentiel J’ai rencontré le diable). Nous n’oublierons pas de mentionner Vincent D’Onofrio, hyper-convaincant dans ses habits de trappeur bourru, et des noms moins connus, comme Manuel Garcia-Rulfo (incarnant un hors-la-loi mexicain) et Martin Sensmeier (prenant ici le costume d’un Indien exilé de sa tribu). Le casting royal nous console aisément du désistement de Tom Cruise d’un projet duquel Jason Momoa s’éloigna également pour apprivoiser les mers dans le super-héroïque Aquaman.
On mettra au crédit de cet avatar contemporain d’un genre souvent perçu comme déclinant depuis les années 70, sa propension à renouer avec une certaine violence propre aux westerns d’antan, notamment spaghetti, ou à la Peckinpah. Certes, on est loin de la sauvagerie crue et poétique de ce qu’a pu nous proposer l’auteur de La Horde sauvage, ou même des gueules cassées propres au cinéma de Sergio Leone, mais c’est tout de même l’image d’un Far West sale et loin d’être glamour qui nous est donné ici. Tout ceci découle sur des scènes d’action qui, sans tomber dans la débauche d’hémoglobine, chérissent une certaine férocité. Balles et explosions fusent : les impacts se font ressentir.
On pourra regretter que la musique, loin d’être mauvaise par ailleurs (et en partie due au regretté James Horner dont ce sera là la dernière contribution au septième art) ait parfois tendance à émousser l’intensité de l’action là où le bruit seul des munitions aurait suffi, mais le plaisir né des fusillades magnifiquement chorégraphiées est intense. On ne boudera pas son plaisir. Loin d’être une bouillie numérique comme c’est trop souvent le cas dans les grosses productions actuelles, la baston cogne "naturel" et se savoure dans la bravoure physique.
- Copyright Sony Pictures
Loin d’être indispensable, le remake n’est pas exempt de quelques âneries contemporaines. Dès que les déflagrations cessent, le principal défaut du film se dévoile, le rythme moins soutenu accentuant quelques faiblesses. L’alternance entre scènes de dialogues et moments costauds est systématique, au point de frôler la redondance dans la construction narrative. Un ventre mou se forme dès que les gâchettes cessent leur chorale. Les moments de respiration sont en effet sabotés par quelques maladresses et une certaine lourdeur d’écriture (certaines blagues ratent leur cible). Les impairs d’écriture n’épargnent pas les personnages eux-mêmes. Leurs motivations sont parfois floues et leur passé sous-exploité (c’est notamment le cas du vétéran de la guerre de Sécession, joué par Ethan Hawke, dont on sent le potentiel avorté, tout comme sa relation avec le personnage de Lee Byun-hung).
Les Sept mercenaires aurait-il alors privilégié le divertissement rentre-dedans à la substance ? A vrai dire, non, et c’est dans le sous-texte social que le film trouve sa vraie force, puisque le réalisateur fusille aussi métaphoriquement une certaine forme de capitalisme sauvage. Une envie qui se définit dès le début, en changeant le village mexicain aux prises avec des bandits du film original par une petite ville américaine dont l’ennemi est un industriel ambitieux n’hésitant pas à sacrifier la population pour son propre profit. On ne peut d’ailleurs que louer la volonté des scénaristes et du réalisateur d’assumer jusqu’au bout leur réflexion avec un climax et une situation finale évocateurs, permettant ainsi d’inscrire le film dans la noirceur et les préoccupations de son époque.
- Copyright Sony Pictures
Les 7 mercenaires s’achève sur un générique mené par l’illustre thème composé par Elmer Bernstein, pour afficher ostentatoirement sa filiation à l’œuvre de John Sturges. Un moment séduisant et rafraichissant dans un paysage de grosses productions aux couleurs monochromes.
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