Tel père, tel fils ?
Le 19 mars 2015
Une histoire touchante qui évite les pièges racoleurs et moralisateurs tant par le scénario que la mise en scène, malgré quelques longueurs.
- Réalisateur : Sudabeh Mortezai
- Acteurs : Ramasan Minkailov, Aslan Elbiev, Kheda Gazieva
- Genre : Drame
- Nationalité : Autrichien
- Durée : 1h38mn
- Titre original : Macondo
- Date de sortie : 25 mars 2015
- Festival : Festival de Berlin 2014
L'a vu
Veut le voir
Une histoire touchante qui évite les pièges racoleurs et moralisateurs tant par le scénario que la mise en scène, malgré quelques longueurs.
L’argument : A 11 ans, Ramasan est déjà un homme sous ses allures de petit garçon. Réfugié en Autriche avec sa mère et ses deux soeurs, il essaie de remplacer du mieux qu’il peut son père mort en Tchétchénie. L’arrivée d’Issa, un ancien ami de son père, va bousculer son quotidien.
Notre avis : Le cinéma a déjà traité et traite encore largement de l’immigration, sujet pas aussi polémique et tabou qu’on veut bien le dire, même si la plupart des films ayant abordé ce thème se sont enfermés dans de mauvais sermons à trois francs six sous. Mais Sudabeh Mortezai, elle, parvient à garder un œil objectif et bienveillant sur la vie de ses personnages et du héros de son récit.
- © Memento Films Distribution
Pour son premier long-métrage de fiction, la cinéaste, connue principalement pour ses documentaires, a choisi de suivre le destin du jeune Ramasan, fils d’une famille de réfugiés tchétchènes, devenu malgré lui l’homme de la maison après la mort de son père. La problématique, énoncée dès les premières minutes du film, est exploitée et étoffée durant plus d’une heure et demie. Peut-on être un homme alors qu’on n’a que onze ans ? La réponse à cette interrogation n’est pas tranchée. C’est au spectateur de trouver sa propre réponse. Ce qui fait la force du Petit Homme, c’est justement le point de vue impartial de sa réalisatrice, qui, grâce à une distanciation assumée et maintenue, parvient à contourner les clichés et les a priori que l’on peut avoir sur les populations d’immigrés. Son film montre les choses telles qu’elles sont, les problèmes tels qu’ils surviennent et comment les personnages les surmontent ; comment Ramasan, aussi, fatigué d’assumer une fonction qui n’est pas la sienne, se laisse aller aux cris et à la colère.
- © Memento Films Distribution
C’est grâce à son sens de l’observation, aiguisé et attentif, que Sudabeh Mortezai parvient à porter son film au-delà des dimensions sociales et politiques. Le parcours initiatique de Ramasan transcende ces deux aspects de l’art et du cinéma, sources d’ergotage et de débats stériles. Déchiré entre ses devoirs de père de famille précoce et son insouciance d’adolescent, le jeune héros se perd en se cherchant, n’ayant plus aucun modèle masculin sur lequel prendre exemple. Le personnage d’Issa, ami de longue date de son défunt père, aurait pu incarner cette figure, mais le garçon se montre hostile à cet homme qu’il ne connaît pas et à qui il ne fait pas confiance. Leur relation est une jolie métaphore de l’adolescence, transition difficile de l’enfance à l’âge adulte. Tout au long du film, Ramasan mène un véritable combat intérieur, tentant de s’émanciper de sa condition d’enfant en même temps qu’il essaye de s’arracher à son rôle de petit patriarche. Les (trop) longues scènes de silence, où l’on le voit couché sur un vieux canapé défoncé au milieu d’un sous-bois, est une illustration très poétique de cette crise identitaire silencieuse. Identitaire au sens biologique comme au sens culturelle, puisque Ramasan est un fils de l’immigration.
- © Memento Films Distribution
Fable contemporaine empreinte de toute la sensibilité de sa réalisatrice, Le Petit Homme est un film qui se libère des idées préconçues des thèmes qu’il aborde pour ramener l’être humain à son état de nature, comme Rousseau, qui voyait dans l’état civil de l’homme une condition formidable « si les abus de cette nouvelle condition ne le dégradaient souvent au-dessous de celle dont il est sorti »
Galerie Photos
Le choix du rédacteur
Votre avis
Pour participer à ce forum, vous devez vous enregistrer au préalable. Merci d’indiquer ci-dessous l’identifiant personnel qui vous a été fourni. Si vous n’êtes pas enregistré, vous devez vous inscrire.
aVoir-aLire.com, dont le contenu est produit bénévolement par une association culturelle à but non lucratif, respecte les droits d’auteur et s’est toujours engagé à être rigoureux sur ce point, dans le respect du travail des artistes que nous cherchons à valoriser. Les photos sont utilisées à des fins illustratives et non dans un but d’exploitation commerciale. Après plusieurs décennies d’existence, des dizaines de milliers d’articles, et une évolution de notre équipe de rédacteurs, mais aussi des droits sur certains clichés repris sur notre plateforme, nous comptons sur la bienveillance et vigilance de chaque lecteur - anonyme, distributeur, attaché de presse, artiste, photographe. Ayez la gentillesse de contacter Frédéric Michel, rédacteur en chef, si certaines photographies ne sont pas ou ne sont plus utilisables, si les crédits doivent être modifiés ou ajoutés. Nous nous engageons à retirer toutes photos litigieuses. Merci pour votre compréhension.