D’amour et d’amitié
Le 12 août 2014
Un drame puissant, servi par un Jérémie Renier époustouflant.
- Réalisateur : Sarah Leonor
- Acteurs : Jérémie Renier, Ramzan Idiev, Surho Sugaipov, Miglen Mirtchev
- Genre : Drame
- Nationalité : Français
- Durée : 1h47mn
- Titre original : Le Grand homme (qui ne voulait pas mourir)
- Date de sortie : 13 août 2014
- Plus d'informations : La page Facebook du film
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Après Au voleur (2009), Sarah Leonor signe un second long-métrage d’une grande profondeur, en s’appuyant sur un scénario riche en thématiques et en émotions.
L’argument : Détachés en Afghanistan pour 6 mois, les légionnaires Markov et Hamilton sont pris en embuscade lors d’une expédition non autorisée par leur hiérarchie. Markov sauve Hamilton, grièvement blessé par des tirs rebelles, mais quitte la Légion sans les honneurs.
De retour à Paris, Hamilton, convalescent, souhaite rester légionnaire, tandis que Markov, désormais civil et sans papiers, tente de s’en sortir avec son fils Khadji. Hamilton prête son identité civile à son ami tchétchène, pour qu’il puisse travailler légalement. Mais un jour, Markov disparaît, laissant Hamilton désorienté et Khadji seul au monde.
Notre avis : Le comédien Jérémie Renier poursuit une carrière remarquable, toujours forte en projets ambitieux et sensibles, qui lui permettent de démontrer l’étendue de son talent et les multiples facettes de son jeu d’acteur. Flamboyant dans Cloclo, volontairement ridicule dans Potiche, d’une incroyable intensité quand il collabore avec les frères Dardenne, il se présente en homme dur et froid dans ce nouveau long-métrage de Sarah Leonor (Au voleur, en 2009, avec Guillaume Depardieu, Florence Loiret-Caille et Jacques Nolot). En prêtant ses traits à un militaire qui officie au sein de la Légion Étrangère, blessé et sauvé d’une mort certaine par son meilleur ami d’origine
tchétchène, il participe au portrait d’une amitié virile qui ira
bien plus loin que ce qu’ils imaginent.
{{© Les films Hatari}}La réalisatrice prend comme point de départ l’engagement militaire de deux hommes qui se
rejoignent grâce à leurs valeurs pour évoquer différentes thématiques :
la quête d’identité, l’immigration, l’adoption ou encore la naissance
d’une famille. Elle démontre qu’il est possible d’évoquer au cinéma (et dans
un même long-métrage) des sujets jugés sensibles par beaucoup de
spectateurs. Son souci du détail et la façon pertinente dont elle
expose différentes idées font de cette production une réussite, fort
agréable à découvrir tant elle incite à la réflexion sans lourdeurs.
{{© Claire Nicol}}La mise en scène audacieuse joue beaucoup dans la perception globale du film et de ses thématiques. Découpé en plusieurs parties, le long-métrage s’attarde sur chaque personnage important et cherche à démontrer ainsi en quoi il est primordial dans l’action, en écartant petit à petit l’entourage du trio de tête. Le découpage
permet de mieux comprendre les intentions de la réalisatrice, qui livre une
intrigue finalement assez simple mais féconde en véritables sujets d’actualité brûlante. Chaque partie entraîne ainsi une réflexion en suivant un fil conducteur bien précis, dans un film où rien, pas même le plus petit détail, n’est gratuit.
{{© Les films Hatari}}Ainsi, le chapitre sur le soldat tchétchène espérant obtenir des papiers français évoque les flux migratoires en Europe, la difficulté d’être accepté en tant qu’étranger ou encore le parcours du combattant pour s’intégrer via l’emploi. Interprété avec beaucoup de sensibilité et de justesse par l’acteur non-professionnel Surho Sugaipov, ce personnage incarne l’espoir d’une vie meilleure et donne de la chair à la délicate relation qui se noue entre le père absent qu’il joue et son fils.
{{© Les films Hatari}}Ce petit garçon, acteur principal de la seconde partie, incarne les difficultés d’intégration des enfants d’immigrés dans la souffrance de l’acculturation, et en quête de repère familiaux. Il est le trait d’union entre son père qu’il connaît peu et son meilleur ami fantasmé, héros de guerre, joué par un Jérémie Renier d’une grande densité. Renier joue un rôle essentiel dans la dernière partie, où il vient apporter un équilibre miraculeux entre les deux. Il se dégage des sapes de soldat pour laisser émaner une humanité qui dépasse son statut de militaire. Cet homme fermé et taciturne s’ouvre peu à peu et fait passer des émotions d’une grande puissance, qui donnent toute la valeur au film. C’est vraiment grâce à lui que ce trio de cinéma prend de la valeur à nos yeux, désormais pierre angulaire d’une nouvelle famille qui se crée de manière inattendue, y compris pour les protagonistes eux-mêmes.
{{© Les films Hatari}}Tout le talent de la réalisatrice est là : parvenir avec brio, en s’appuyant sur un scénario d’une grande clairvoyance, à évoquer des questions de citoyenneté, de frontière et de famille. Des thèmes universels qui prennent naissance dans l’intime, celle d’une amitié virile, que le destin et un petit garçon vont perturber.
{{© Claire Nicol}} Si le long-métrage était sorti sur les écrans en 2013, il y a fort à parier que beaucoup auraient interprété à contresens une relecture du schéma familial. Il est vrai que le film s’attarde sur les notions de couple, d’adoption et d’amour filial. Mais en s’éloignant volontairement de toute ambiguïté homosexuelle entre les personnages masculins, Sarah Leonor cherche à se baser uniquement sur une amitié sincère, point de départ de toutes les émotions du film entre un père impuissant, un militaire désorienté et un petit garçon perdu qui vont trouver, tous ensemble, le bonheur. Le message est beau et simple. Il nous touche forcément.
{{© Claire Nicol}}
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