Les jeux de l’amour et du mariage
Le 1er mai 2013
Primé à Venise pour la qualité de son interprétation, Le coeur a ses raisons marque d’ores et déjà par l’inédit de sa démarche : dépeindre de l’intérieur et du point de vue féminin la question du mariage chez les juifs orthodoxes. Une belle iniative pour un résultat beaucoup trop sage. Décevant
- Réalisateur : Rama Burshtein
- Acteurs : Hadas Yaron, Yittach Klein, Renana Raz
- Genre : Drame
- Nationalité : Israélien
- Durée : 1h30mn
- Titre original : Lemale et ha'halal
- Date de sortie : 1er mai 2013
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Primé à Venise pour la qualité de son interprétation, Le coeur a ses raisons marque d’ores et déjà par l’inédit de sa démarche : dépeindre de l’intérieur et du point de vue féminin la question du mariage chez les juifs orthodoxes. Une belle iniative pour un résultat beaucoup trop sage. Décevant
L’argument : Shira vit au sein d’une famille juive orthodoxe à Tel Aviv. À 18 ans, elle rêve de mariage. Lorsque sa soeur ainée Esther meurt en couches, Yochay, son beau-frère, est poussé par la communauté à partir se marier en Belgique. Sa mère a une meilleure idée : et si Shira épousait Yochay ? Entre le coeur et la raison, Shira devra choisir.
Notre avis : Premier film juif orthodoxe à être réalisé par une juive orthodoxe, Le coeur a ses raisons navigue entre marivaudage contemporain et chronique sociale. Plongée en plein cœur de la communauté hassidique de Tel Aviv, Shira, dix huit ans à peine, loin d’en rejeter les règles, tente d’y vivre en paix. Rêvant innocemment du grand amour, la tête toujours dans les nuages, elle ne l’entend pas frapper à la porte. Bientôt, Shira sera mariée. Médusée, elle assiste impuissante à l’exécution de son enfance. Sa sœur morte en couches un peu plus tôt, Shira a un devoir, épouser son mari. Pas une obligation certes, les époux se voyant chacun demander leur consentement, mais une forte incitation. Fort heureusement, l’intrigue ne s’arrête pas là et se complexifie d’une émotion : la passion. Profondément attirée par son futur mari, Shira observe cachée, l’objet de sa convoitise. Entre eux, le silence et une dynamique d’attraction / répulsion s’égrène au fil de leur rencontre. De ce huit-clos taiseux, ouaté et voilé de pudeur, se dégage une atmosphère déroutante, celle d’un monde à part, perdu dans l’espace et le temps, sans époque définie. Esthétiquement, l’essai est abouti. Lumineuse et pastellisée, l’image marque par la douceur de son grain. Hyper-composé, le cadre laisse place dans son champ à un éternel jeu de cache-cache, des corps, des mots et des regards. Dynamisée par une tension sensuelle forte, le film n’en reste pas moins un délicat tableau d’émotions, dans la lignée des romans de Jane Austen, dont la réalisatrice affirme s’être inspirée : ’’le parallèle est évident, dans la mesure où Le coeur a ses raisons se déroule dans un monde où les règles sont rigides et claires. Les personnages ne cherchent pas le moyen d’y échapper’’
Et c’est peut être bien là le problème : l’obsolescence de la démarche. Trop occupée à se focaliser sur un flot de détails, Rama Burstein en oublie de trancher et de choisir un point de vue. Au delà du fait que le film nous présente une réalité troublante, la communauté hassidique considérant finalement admise l’infériorité onthologique de la femme, c’est l’absence de sens critique de la cinéaste qui glace. Bercé par un perpétuel choeur religieux, une sensation d’enfermement nous prend à la gorge et pétrifie. Soumise et résignée, la jeunesse orthodoxe semble ne pas vouloir s’embraser au vent de la liberté. Constat fidèle ou assagissement scénaristique ? Impossible de percer le mystère. Reste l’interprétation de la jeune actrice Hadas Yaron, juste et spontanée, d’ailleurs récompensée à Venise. Une chose est sûre : il ne fait pas bon aimer en-dehors des clous dans la petite communauté orthodoxe de Tel Aviv.
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