Le 15 juin 2020
L’un des plus beaux films de Claude Chabrol. Troublant, inquiétant, d’une infinie richesse sur la nature humaine. Jean Yanne et Stéphane Audran y sont formidables.
- Réalisateur : Claude Chabrol
- Acteurs : Stéphane Audran, Jean Yanne, Antonio Passalia
- Genre : Drame, Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters, Thriller, Policier
- Nationalité : Français, Italien
- Distributeur : Les Acacias, Parafrance
- Editeur vidéo : Opening
- Durée : 1h33mn
- Date télé : 25 septembre 2023 23:15
- Chaîne : TV5 Monde
- Reprise: 25 juillet 2001
- Box-office : 1 149 950 entrées France
- Date de sortie : 27 février 1970
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Résumé : Dans un village du Périgord, la vie quotidienne des habitants cesse brusquement d’être tranquille. Des femmes sont égorgées. Par qui ? Le boucher, qui a fait les guerres d’Indochine et d’Algerie, semble devenir le suspect numéro un aux yeux de la directrice d’école, qui ressentait pour lui de tendres sentiments.
Critique : Après un coup de maître, Que la bête meure, où Jean Yanne excellait dans le rôle d’un salaud sans scrupules, face à Michel Duchaussoy, Claude Chabrol poursuit sa collaboration avec l’humoriste et comédien, alors à son zénith artistique : ce sera Le Boucher, à la fois un grand succès public et critique, qui marque la quintessence de l’art chabrolien. Le soleil du Périgord, ses reliefs escarpés constituent le superbe écrin d’une tragédie provinciale qui n’emprunte pas la voie d’une ironie à laquelle le réalisateur nous habituera plus tard, parfois dans une autoparodie quelque peu paresseuse, souvent dans une hybridation délectable entre Flaubert et Hitchcock.
Non, ici, Claude Chabrol n’a aucun intention belliqueuse envers qui que ce soit. Il documente simplement la vie d’un village de province, à travers des commerçants, dont un boucher, revenu des guerres d’Indochine et d’Algérie, sûrement impacté par la violence de chacune d’elle, comme on le comprendra plus tard. "Popaul" unit sa solitude à celle d’une institutrice qui le fait participer aux activités de sa classe et comble le vide de son existence par des discussions avec cet homme plutôt doux, dont le corps porte le poids de blessures irréversibles. Il est antithèse absolue de l’infâme Paul Decourt, qui terrorisait sa famille. Jean Yanne lui confère une complexité impressionnante dans ce qui reste un de ses meilleurs rôles. Face à lui, Stéphane Audran compose un personnage d’une belle opacité, presque abstrait, ce qui ne cesse d’intriguer. La photographie de Jean Rabier, collaborateur attitré des cinéastes de la Nouvelle Vague, permet de jouer sur des contrastes de couleurs qui adviennent à des moments décisifs : ainsi, on n’oubliera pas les tâches de sang qui tombe goutte à goutte sur des vêtements clairs, ceux d’une enfant, pour signifier la présence d’un cadavre.
Avec Le Boucher, les concepts de civilisation et de barbarie s’estompent : Popaul est certes un tueur en série, mais, au moment de s’attaquer à sa dernière victime, il retourne le couteau contre lui-même, dans un geste qu’élude une superbe ellipse. Et celle qui, peu après, le regarde agonir sur un brancard est saisie en contre-plongée dans une pénombre qui est aussi celle des assassins. Rarement on aura filmé une histoire d’amour impossible avec une telle maîtrise cinématographique, dans une configuration aussi inhabituelle, qui ouvre des abîmes de réflexion sur la nature humaine.
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