Verdadero Detective
Le 15 juillet 2015
Formellement impressionnant, le nouveau film d’Alberto Rodriguez nous confronte à une Espagne post-franquiste aux lourds secrets. Une histoire classique et efficace pour un contexte sociohistorique passionnant.


- Réalisateur : Alberto Rodriguez
- Acteurs : Javier Gutiérrez, Antonio de la Torre, Raúl Arévalo, Nerea Barros, Jesus Castro
- Genre : Policier / Polar / Film noir / Thriller / Film de gangsters
- Nationalité : Espagnol
- Durée : 1h44min
- Date télé : 3 septembre 2016 22:30
- Chaîne : Canal + Cinéma
- Titre original : La isla mínima
- Date de sortie : 15 juillet 2015
- Festival : Festival du film Policier de Beaune

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Formellement impressionnant, le nouveau film d’Alberto Rodriguez nous confronte à une Espagne post-franquiste aux lourds secrets. Une histoire classique et efficace pour un contexte sociohistorique passionnant.
L’argument : Deux flics que tout oppose, dans l’Espagne post-franquiste des années 1980, sont envoyés dans une petite ville d’Andalousie pour enquêter sur l’assassinat sauvage de deux adolescentes pendant les fêtes locales. Au coeur des marécages de cette région encore ancrée dans le passé, parfois jusqu’à l’absurde et où règne la loi du silence, ils vont devoir surmonter leurs différences pour démasquer le tueur.
Notre avis : Récompensé par 10 Goyas, la dernière réalisation d’Alberto Rodriguez pourrait bien représenter une nouvelle date dans l’histoire du cinéma policier espagnol, genre sacré (La secte infernal,Tesis). Après le très efficace Groupe d’élite, qui suivait un groupe de flics chargé d’éliminer le trafic de drogue à Séville avant l’Exposition universelle de 1992, le réalisateur pose désormais sa caméra en Andalousie.
- © Warner Bros Pictures España
Sur fond de "démocratisation" et de post-franquisme du début des années 80, deux flics que tout semble opposer sont chargés d’enquêter sur la disparition et le meurtre de deux adolescentes. Entre les lourds secrets d’une période trouble et les arrangements entre les autorités locales et les trafiquants, leur enquête ne sera pas des plus faciles. Privilégiant un rythme contemplatif typique du cinéma de genre ibérique et proche de l’atmosphère de True Detective, la dernière réalisation de Rodriguez impressionne par sa maîtrise, que ce soit sur le plan formel, avec de superbes paysages andalous, souvent filmé en plans aériens, ou encore la description d’une société gangrenée par la corruption, l’omerta et un passé douloureux qui obsède toujours le cinéma local, des décennies après la chute de Franco.
- © Warner Bros Pictures España
Pour Rodriguez, cette partie de l’Andalousie est un microcosme figé dans le temps ; une terre hostile, angoissante, mais également magnifiée par une photographie et une musique envoûtantes.
Évoquant le duo atypique de True Detective, les deux personnages principaux sont également l’incarnation de deux facettes d’un même pays : l’un, plutôt progressiste, s’est fait muter pour insubordination, l’autre, avec ses méthodes douteuses et sa réputation peu flatteuse qui le précède, est considéré comme un des pires reliquats du franquisme. S’ils peinent à passionner, à cause d’un certain manque de caractérisation et d’empathie, ils sont néanmoins incarnés avec force par deux acteurs talentueux : Javier Gutiérrez et Raúl Arévalo, le personnage de ce dernier - ancien flic politique en quête de rédemption - étant le plus intéressant.
- © Warner Bros Pictures España
Même si les influences américaines se font sentir dans La isla minima (de True Detective à Twin Peaks en passant par Mud ou Se7en], on baigne bel et bien dans le polar glauque ibérique, genre réputé dont on ne se lasse pas. La Isla minima est une belle réussite pour un réalisateur à suivre de près. La sortie estivale est un enjeu réel pour le distributeur français. Faisons-lui honneur.