La cour des grands
Le 23 septembre 2023
Vingt-cinq ans après La discrète, Christian Vincent retrouve Fabrice Luchini pour un faux film de procès, mais une vraie réussite.
- Réalisateur : Christian Vincent
- Acteurs : Fabrice Luchini, Jennifer Decker, Sidse Babett Knudsen, Corinne Masiero, Michaël Abiteboul, Victor Pontecorvo, Sophie-Marie Larrouy
- Genre : Comédie dramatique, Film de procès
- Nationalité : Français
- Distributeur : Gaumont Distribution
- Durée : 1h38 mn
- Date télé : 24 septembre 2023 21:10
- Chaîne : France 2
- Date de sortie : 18 novembre 2015
- Festival : Festival de Venise 2015
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Résumé : Michel Racine est un président de cour d’assises redouté. Aussi dur avec lui qu’avec les autres, il est appellé " le président à deux chiffres ". Avec lui, on en prend toujours pour plus de dix ans. Tout bascule le jour où Racine retrouve Ditte Lorensen-Coteret. Elle fait partie du jury qui va devoir juger un homme accusé d’homicide. Six ans auparavant, Racine a aimé cette femme. Presque en secret. Peut-être la seule femme qu’il ait jamais aimée.
Critique : L’hermine, ce sont d’abord de doubles retrouvailles : celles du réalisateur Christian Vincent avec L’acteur Fabrice Luchini, vingt cinq ans après leur dernier film ensemble (La discrète) ; et celles de Michel Racine, président de la cour d’assise et personnage principal du film avec un ancien amour, Ditte Lorensen Cotteret. L’action prend place dans le Nord, mais pas ou peu d’accent et encore moins de misérabilisme quand elle concerne un procès d’assise assez sordide. On s’intéresse plus aux personnages des jurés qu’aux accusés.
- © 2015 Gaumont. Tous droits réservés.
C’est un homme malade physiquement et moralement que Michel Racine au début du film. Il est atteint par la fièvre et dort à l’hôtel, mis à la porte par sa femme. S’il se soigne, ce ne sont évidemment pas les médicaments qui vont le guérir. Alors qu’il chute dans la rue, un couple s’avance un peu plus vite. Surprise : C’est pour le dépasser, comme on s’éloigne d’un lépreux, pas pour l’aider. Notre protagoniste est donc à terre, seul, malade. C’est là que la première délicatesse du film intervient. C’est merveilleux de voir Luchini livrer une interprétation sobre, sans gesticuler, sans être dans la caricature de lui-même, effacer son personnage public au profit de son personnage de fiction. Ce refus de faire de Michel Racine une caricature péremptoire intervient pile au bon endroit. La performance valait bien un prix d’interprétation à la Mostra de Venise. Sidse Babeth Knudsen, qui prend les traits de Ditte, à quant à elle été engagée par le réalisateur parce qu’il adore la série dont elle est la star, Borgen.
- © 2015 Gaumont. Tous droits réservés.
Racine est malade donc, et magistrat. Le trajet de sa guérison passera forcément par un procès. On nous introduit dans le tribunal avec une jeune dessinatrice et un vieux briscard qui lui explique la configuration des lieux et le rôle des gens. Si ce moment n’est pas une franche réussite, il est néanmoins nécessaire pour que le spectateur puisse se sentir chez soi en cour d’assises.
C’est dit et répété dans le film, en plus d’être relativement évident - la salle d’audience ressemble à une scène de théâtre. Il y a un texte, des costumes, des rituels. Outre les témoignages, qu’est ce qui peut venir bouleverser un procès, changer le cours des choses ? C’est là que réside sans doute la plus belle idée du film. Dans un téléfilm basique, le juge aurait été perturbé par la nature et la violence des faits reprochés aux accusés, qui l’auraient enjoint à reconsidérer son mode de vie, sa manière d’agir avec les autres. Mais Racine est juge depuis longtemps. Cette violence, c’est son quotidien. C’est donc l’irruption de la douceur qui va le perturber et venir tout changer. La douceur du souvenir amoureux. Cette dualité paraît simple. Et pourtant, elle donne une grande richesse au scénario (également récompensé par un prix à Venise). On fait intervenir des sentiments dans un cadre qui a des règles très strictes.
- © 2015 Gaumont. Tous droits réservés.
Qui dit procès dit rhétorique de rédemption. Pas nécessairement celle des accusés – dont on ignore jusqu’au bout la culpabilité - mais celle de Michel Racine, l’impitoyable. Ditte est anesthésiste, elle soulage de la douleur. C’est logiquement qu’elle va ramener Racine d’entre les morts. Le soigner de son cynisme. Il y a quelque chose de politique et de fondamental à préférer la douceur aujourd’hui. C’est ainsi que Racine, à la fin du procès, enjoint les jurés à faire preuve de sagesse. Accepter de ne pas savoir, accepter que peut-être jamais n’éclatera la vérité.
À la fois comédie du remariage et faux film de procès, L’hermine surprend par sa finesse et touche en plein cœur.
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