Le 26 novembre 2014
Une satire plutôt réussie sur le monde du football, par un réalisateur italien qui aime faire évoluer des personnages grotesques.
- Acteurs : Stefano Accorsi, Jacopo Cullin, Paolo Zucca
- Genre : Comédie
- Nationalité : Italien
- Editeur vidéo : Blaq Out
- Durée : 92 mn
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Une satire plutôt réussie sur le monde du football, par un réalisateur italien qui aime faire évoluer des personnages grotesques.
L’argument : La plus mauvaise équipe de la 3ème division de football sarde, L’Atletico Pabarile, se fait humilier tous les ans par le Montecrastu, une équipe dirigée par l’arrogant Brai, qui se plaît à malmener les joueurs comme un seigneur des campagnes. Le retour au pays du jeune Matzutzi change cependant l’équilibre du championnat, et soudain l’Atletico Pabarile se met à gagner un match après l’autre grâce aux prouesses de son nouveau joueur prodige.
Notre avis : Neuf juillet 2006, l’Italie bat la France et remporte une quatrième coupe du monde de football. C’est l’euphorie en Italie où des millions d’habitants exultent et mettent sur un piédestal les joueurs de leur équipe nationale.
En 2014, avec L’Arbitro, son premier long métrage, le réalisateur italien Paolo Zucca prend le contre-pied du star système dans le monde du football. Comme son titre l’indique, la star (s’il y en a une) c’est... l’arbitre. L’acteur Stefano Accorsi incarne un jeune arbitre rongé par l’ambition qui rêve de s’occuper de grands matchs. Il s’entraîne d’arrache-pied pour arriver à ses fins, avec un souci méticuleux qui frise le ridicule. Mais il y a plus grave, cet arbitre est prêt à tout pour monter les échelons Toutefois, en vendant son âme au diable, il risque fort de rester planté le nez dans le gazon.
Paolo Zucca se plaît à tourner en dérision le sacro-saint football de son pays natal. La légèreté de façade qui caractérise son film lui permet de tacler sévèrement les dessous d’un sport qu’il décrit comme étant aussi honnête que les joueurs simulant une faute.
Que ce soit chez les professionnels ou les amateurs, le sport numéro un en Italie est dépeint comme gangrené de l’intérieur à tous les niveaux. Pots-de-vin et matchs truqués seraient monnaie courante. Les spectateurs pourront y voir un parallèle évident avec les affaires qui ont éclaboussé ce milieu sportif italien il y a quelques années. De nombreux clubs avaient alors été touchés, dont la mythique Juventus de Turin, ce qui avait entraîné pour le club un passage par la case de deuxième division. Avec l’importance prise par les paris en ligne et les faits divers qui pullulent le sujet, le problème est loin d’être éradiqué.
Le film laisse entendre que la corruption ne se limite pas au football professionnel. L’action de L’Arbitro se situe en Sardaigne, la région la plus pauvre et défavorisée de l’Italie. A des années-lumière des fastes de la série A (l’équivalent de la ligue 1 pour la France), des équipes s’affrontent sur une terre aride, où les nids de poule sont plus fréquents que le gazon.
Avec un certain amusement, Paolo Zucca dresse le portrait de personnages hauts en couleur mais délicieusement ridicules, pour qui le football est fondamental. Il faut voir ces équipes faites de bric et de broc, allant même jusqu’à faire participer des enfants ou des hommes dans la fleur de l’âge. Leur entraîneur est aussi une histoire à lui seul, délivrant des conseils tactiques sur le terrain alors qu’il est non-voyant ! Et puis que dire de cette scène où le héros local, Matzutzi, qui vient d’être expulsé, revient sur le terrain affublé d’une perruque.
Non sans un certain brio et assumant une irrévérence bien sentie – on est tout de même en Italie, l’un des pays les plus fervents du ballon rond - Paolo Zucca se moque de ce football qui est sacralisé. De nombreuses références, religieuses, évidemment, émaillent le film à cet effet. L’arbitre représente ainsi une figure christique ; des croix jouxtent un terrain de fortune ; on constate le retour de l’enfant prodigue et il y a cette caricature de la Cène avec l’entraîneur non-voyant qui est entouré de douze joueurs (songeons qu’il peut y avoir un remplaçant en plus des titulaires !).
L’ambition de L’arbitro ne se limite pas à se moquer gentiment du football. Il crée également des parallèles bien sentis avec le western. Après tout, pendant plusieurs années, les Italiens (Sergio Leone, Sergio Corbucci, etc.) ont marqué l’histoire de ce genre tombé depuis quelque peu en désuétude. L’Arbitro peut se targuer d’un très beau noir et blanc qui lui donne un côté intemporel. Et de nombreux éléments du film évoquent le genre, comme l’aridité du cadre. Sans compter les des clins d’œil : le “méchant” qui rentre dans un bar avec son cheval comme s’il faisait son apparition dans un saloon ou encore le duel final qui met aux prises deux équipes opposées prêtes à en découdre.
Pour autant, si les qualités du film sont indéniables, Paolo Zucca ne produit pas un "match complet". Son long métrage de 90 minutes (tiens, comme un match de football !) comporte des séquences convaincantes qui alternent avec des scènes moins palpitantes. L’humour n’est pas une chose aisée à manipuler et certaines séquences tombent à plat. Elles ne font pas franchement rires et peuvent même susciter un certain ennui. Tout au plus le spectateur le plus compréhensif pourra reconnaître que ce film comporte des scènes bien étranges.
Il en va de même pour les personnages de cet Arbitro. A trop vouloir forcer le trait, les personnages peuvent détonner quelque peu. Cela étant, tout reste une question de point de vue et certains pourront se retrouver dans des scènes absurdes et dans des personnages dont le trait a été volontairement grossi.
Au final, L’Arbitro est un premier film maîtrisé qui prend le parti de la satire pour se moquer sans détour d’un football sacralisé. Son originalité justifie clairement son visionnage.
Un DVD qui permet de regarder le film dans d’excellentes conditions. Seul bémol : une section bonus quasi inexistante.
Les bonus :
Les joueurs de L’arbitro ont dû se faire subtiliser leur équipement dans les vestiaires car les bonus sont maigrelets. On a droit à quatre scènes coupées très courtes dont deux correspondent plutôt à un bêtisier. Le making of qui ne dure que 5 minutes se limite à présenter l’équipe du film. Par ailleurs, un complément (d’une minute) permet de voir l’acteur Stefano Accorsi en train de répéter des pas de danse. Enfin, cette section des suppléments comporte la bande annonce du film. Tout cela est bien maigre.
L’image :
Une image superbe qui permet d’apprécier à sa juste valeur le très gros travail fourni par le directeur de la photographie du film. L’image en noir et blanc est d’une beauté à couper le souffle. Le master DVD est suffisamment précis pour restituer les finesses esthétiques du film.
Le son :
Le son est lui aussi au diapason avec un Dolby Digital 5.1 bien réparti dans l’espace. Les personnes non équipées d’une installation home cinema appropriée pourront se rabattre sur un stéréo convaincant.
Le film est proposé uniquement en version originale sous-titrée français. On louera l’initiative de l’éditeur Blaq Out qui permet aux sourds et malentendants de bénéficier de sous-titres adaptés.
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