Ils vivent. Nous dormons...
Le 7 avril 2023
Une parabole féroce sur le consumérisme, par le prisme de la science-fiction…
- Réalisateur : John Carpenter
- Acteurs : Keith David, Roddy Piper, Meg Foster, Peter Jason, Sy Richardson, Susan Blanchard
- Genre : Science-fiction, Épouvante-horreur
- Distributeur : Metropolitan FilmExport, Splendor Films
- Durée : 1h34mn
- Reprise: 12 avril 2023
- Box-office : 177 294 entrées France / 48 891 entrées Paris Périphérie
- Titre original : They Live
- Date de sortie : 19 avril 1989
- Festival : Festival d’Avoriaz 1989
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Résumé : Un ouvrier au chômage découvre un groupe discret qui fabrique des lunettes noires. Intrigué, il en essaie une paire et découvre un monde effrayant : de nombreux humains sont en réalité des extraterrestres aux visages hideux et écorchés ; les panneaux publicitaires ordonnent la soumission dans des termes dignes de Big Brother. Avec un autre ouvrier, il affronte les envahisseurs. Mais quel jeu joue Holly, la séduisante responsable des programmes du canal 54 ?
Critique : Dans ce deuxième film tourné sous contrat avec Alive Film (après Prince des Ténèbres), Carpenter se met en tête d’exprimer sa pensée profonde à propos de la manière dont son pays est dirigé (nous sommes en 1988), et donc de choisir comme (anti)-héros, un gars venu de nulle part qui s’appelle John Nada (un clin d’œil à l’Homme sans nom, personnage hantant nombre de westerns, si cher au réalisateur).
Dès les premières images, le thème musical de Carpenter donne le ton.
Nous voyons Nada apparaître sur une voie ferrée, et le suivons tandis qu’il traverse la Cité des Anges avec son sac à dos ; il passe des beaux quartiers (la société consumériste) au bidonville de Justiceville, où vivent les laissés-pour-compte ayant encore une vision réaliste de la vie. Il trouve malgré tout un emploi précaire dans le bâtiment (seule corporation ayant besoin de gens non-qualifiés) et y fera la connaissance de Frank.
- © Splendor Films
Nada voit une émission pirate sur le câble, dont le sujet est : "Eux qui décident pour tout le monde, eux qui uniformisent les pensées…" Et une étrange activité dans une ancienne église. Intrigué, il s’y rend et découvre que les chants perçus depuis l’extérieur ne sont qu’un enregistrement, et que des individus complotent quelque chose. Des verres solaires y sont également fabriqués… Le message diffusé illégalement semble nous renvoyer aux heures sombres de la Seconde Guerre mondiale et aux résistants et ce, appuyé par une réplique lorsque Nada ramène un adolescent dans un squat, et qu’un des occupants de lui dire négligemment : « c’est la troisième guerre mondiale, ou quoi ? »
Nada commence à comprendre que rien ne paraît tourner rond dans ce monde qu’il croyait connaître… La scène du déploiement de police dans le bidonville insiste un peu plus sur un certain fascisme latent, à savoir le nettoyage par le vide .
Puis il trouve ce fameux carton, rempli de lunettes solaires. Il en chausse une paire, et là l’image passe au N&B comme pour nous indiquer que la réalité sans fard se dévoile. Nada ne comprend rien à ce qui lui arrive, il lève les yeux sur une affiche grand format et s’y détache seulement sur fond blanc, le mot : obéis. Surpris, il les ôte et ne voit qu’une publicité quelconque. Lorsqu’il les remet c’est la même litanie sur tout ce qui l’entoure : affichage, couverture de magazines et pancartes dictent la même conduite à tenir : obéis, reste endormi, subis, consomme… De l’imagerie subliminale poussée à l’extrême.
- © Splendor Films
Mais notre homme n’est pas au bout de ses surprises ! En effet, il s’aperçoit avec horreur que l’homme qui est à côté de lui n’a que peu de rapport avec un être humain : écorché vif avec de gros yeux argentés… « Ils » se cachent donc parmi nous et tentent de nous donner le change.
S’ensuit une scène où Nada se brouille avec une vieille dame (un envahisseur,en fait) et celle-ci de dire dans sa montre-émetteur : « en voilà un qui voit » (traduction : en voilà un qui pense par lui-même). Tout l’enjeu pour Nada sera d’ouvrir les yeux à ceux qui en sont encore capables. Et il se rendra compte que ce n’est pas chose aisée. Au cours d’une bagarre homérique, il essaiera de convaincre son ami Franck Armitage du danger. À noter que Frank Armitage est le pseudo qu’utilisa Carpenter pour signer le scénario
Comme souvent chez Carpenter, pas de happy end et il se fait plaisir encore une fois (après le final fuck de New York 1997/Escape from New York en 1981 et celui postérieur de Los Angeles 2013/Escape from L.A en 1996), lorsque Nada détruit le transmetteur et que les E.T apparaissent sous leurs vraies formes, à la télévision et dans le lit d’une femme, mais surtout lorsque un flic tire sur lui depuis un hélicoptère : nous voyons Nada tendre le majeur, un sourire ironique aux lèvres.
Carpenter a beau dire qu’il n’a réalisé ici qu’un film d’action (ce que corrobore la bande-annonce axée sur les fusillades et explosions), il s’agit pourtant bien encore d’une satire sociale, dont notre Jean Charpentier se fait le chantre !
Gardez l’œil aux aguets, car peut-être sont-’Ils" déjà parmi nous !
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